Peut-être avez-vous déjà une indigestion des articles sur le sujet. Moi aussi, entre nous. Cependant, je ne résiste pas à la tentation de vous offrir un dernier et différent point de vue sur la question.
Elles m’ont toujours fascinée. Leur cocon de pierre m'apporte toujours quelqu' admiration et une certaine dose de sérénité. Et où que j'aille aux quatre coins du monde, j'y dépose toujours une petite flammèche pour un voeu. Et celle-ci plus que toutes ses sœurs... Leurs bâtisseurs ont toujours éveillé mon respect, mon admiration et mon émerveillement. Elles ont traversé les siècles, les combats et les catastrophes (qu’elles soient naturelles ou non). Et celle dont je compte vous entretenir ce dimanche vient de défier le sort... Elle est, à mon sens du moins, la plus Grande Dame de Paris.
Et pourtant, les images de son toit en flammes me touchent profondément malgré moi. Un sentiment bizarre. Un peu comme si une partie de moi s’envolait en fumée. Pourquoi ce malaise ? Alors qu’il ne s’agit rationnellement que d’un bâtiment (et heureusement, l'accident n’a causé aucune victime). Pourquoi cet événement a-t-il ému tant de personnes (avec l’aide subliminale des médias...) tandis que tant d’autres sujets méritent bien plus de considération ? Alors, j’ai cherché la réponse.
God help the Outcasts
Tout d’abord, Notre Dame, pour certains, c’est un navire, un refuge, un sanctuaire où pauvres hères et infortunés pouvaient jadis demander l’asile. C’est une nef, une mère, des bras de pierre où l’on pouvait venir se blottir et épancher ses larmes sans honte ni crainte. C’est une maison où l’on se sent chez soi... C’est une arche de Noé, un vaisseau à bord duquel toutes les couleurs de peau, langues et même religions peuvent monter s’ils le désirent. Au diable les différences de religions. La culture et la beauté architecturale, les vraies, n’ont pas de frontières ni d’opinions politiques. Tous ceux qui l’ont visitée sont tombés sous son charme ensorceleur. Ses tours et sa flèche comme des bras tendus vers le ciel. Ses vitraux comme un hymne à la lumière. Ses arcades comme un défi à la gravité. Ses gargouilles comme un clin d’oeil aux démons. Son parvis comme une ode à la pierre. Ses cloches comme un psaume à l’oreille. Sa silhouette comme un cantique à la ville... Sans oublier le fait que Victor Hugo (et Walt Disney....) ont fait d’elle une héroïne millénaire.
© Photos - Rêvesdemarins
Le Grand Feu
Ensuite, le fait que ce soit le feu qui l’embrase. Quoi de plus banal pour un vieux bâtiment ? Elle n'est ni la première, ni la dernière à subir ce péril. Bien d'autres églises, palais ou sites culturels d'exception sont passés par là : les illustres Troie, Rome, Alexandrie (et sa merveilleuse bibliothèque) et Constantinople, le Temple de Jérusalem, les cathédrales de Nantes, Chartres, et Reims, le Palais des Doges à Venise, le Mont St Michel, les villes de Rouen, Rennes, Londres, Lisonne, New York, Boston, Montréal, Chicago, Bergen, Hambourg, Troyes, St Malo, Heidelberg, Copenhague, le Théâtre du Globe à Londres, le Reichstag à Berlin, le magasin Printemps Haussmann à Paris ou l'Innovation à Bruxelles, le Grand Bazar de Constantinople, le Grand Théâtre de Marseille, le château royal de Stockholm, le Palais Royal et l'Hôtel-Dieu à Paris, les Palais de Westminster à Londres jusqu' à celui de Bruxelles, les tours du WTC à New York et des centaines d'autres encore. Et certains d'entre eux ont eu le privilège de brûler plus d'une fois !
Toutefois, ce détail me renvoie à des souvenirs d’enfance, ceux d’un autre lieu où je me sentais chez moi et qui fut étrangement détruit exactement de la même manière : mon école secondaire. Notre Dame de Jupille. Un bâtiment classé dont une tour (la Tour Charlemagne) datait du XVIe siècle mais dont on soupçonnait des origines du VIIIe déjà comme étant un des endroits favoris de Pépin Le Bref. Une bâtisse de charme, recoins et mystères, où j’ai même eu l’occasion de découvrir les parties les plus secrètes lors de quelques séjours en internat. Planchers de chêne centenaires, portiques à l’odeur de cire, greniers sombres et surtout combles aux charpentes alambiquées. Une chapelle majestueuse, un péristyle de colonnes et des orgues au son enchanteur. Bref, une mini Notre Dame, sans les touristes... Le soir du 30 avril 1990, le feu prend dans les combles et les chambres de bonnes de l’école dirigée par les chanoinesses. La bâtisse est heureusement vide. Les pompiers sont rapidement sur place, mais le brasier s’avère incroyablement destructif et les endroits touchés difficilement accessibles vu la hauteur du vieux bâtiment. La toiture succombe, les étages supérieurs aussi. C’est ensuite au tour de sa grande chapelle. Notre professeur de musique, désespéré, doit assister à l’agonie de ses chères orgues dans la chapelle, venant juste d’être restaurées. Les flammes dévorent tout l’intérieur sauf l’ancienne tour Charlemagne et l’aile attenante. Mes souvenirs s’envolent en fumée. Mes années et bonheurs de mon adolescence s’effacent soudainement sous l’éponge calcifiée du tableau de mon passé. Une page se tourne sur mon histoire. Des années durant, jusqu’à aujourd’hui encore, cette ancienne bâtisse continue de peupler mes rêves et ceux de mes anciens compagnons scolaires. Ce bâtiment d’exception nous a tous marqués.
© Photos - INDJ - Stephanegilson.be
Nothing can be destroyed...
J’ai peur pour elle. Je crains que ses cendres n’emportent avec elles une partie de mes souvenirs, de mes émois, de mon passé. Mais la Grande Dame de Pierre tient bon les flammes. Ses cheveux boisés se consument mais elle ne faiblit pas. Sa robe de tuiles se découd mais elle reste debout, telle un fier et preux chevalier millénaire à présent nu pieds et dévêtu de son bliaud. Et puis, personne ne peut me voler ma mémoire, mes bonheurs, cet émerveillement et ce ravissement sans fin face à ses trésors sculpturaux. Son image restera à jamais gravée dans ma pierre à moi, celle de mon cœur.
Ne soyez pas triste. Mon heure était venue. J'étais lourde de milliers de prières. J'ai traversé les siècles. Sans bouger, j'ai voyagé la terre entière grâce à vous. J'ai vu tous les visages et entendu toutes les langues. En attendant de renaitre de mes cendres, je reste dans vos images et vos souvenirs. Gardez à l'esprit que je suis dans toutes les pierres, le sol sur lequel vos pieds se posent, l'air que vous respirez et aussi dans l'odeur d'encens. La pluie terminera de diffuser ma mémoire dans toutes les artères du monde. (Nuit étoilée)
Les endroits se modifient. Les objets disparaissent. Les repères déménagent. Les sentiments se fanent. Les images ternissent. Les gens changent... Tout dans ce monde n’est que mouvance. Cependant rien ne peut détruire notre passé. On peut le renier, le bannir, l’oublier, l'enfermer, le mettre derrière nous. Mais il ne cesse d’avoir réellement existé. Tous ces évènements réels, émotions, sentiments et monuments de l’histoire d’antan continuent ainsi d’exister à travers notre mémoire, nos récits et nos cœurs. C’est pour cette raison qu’ils demeurent immortels. Ceux qui ont démantelé des temples pour en rebâtir de nouveaux avec les anciennes pierres ne l’ont pas compris. Ceux qui ont bombardé les merveilles construites par leurs ennemis sont des ignares. Ils n’ont pas réalisé qu ‘en croyant les faire ainsi disparaître, qu’en réalité, ils sublimaient leur souvenir et les rendaient impérissables.
Et quand bien même le brasier t’aurait consumée ce soir-là à Paris, Notre Dame, tu continuerais d’être là, en moi... « La jeune femme déroule alors l’écharpe de laine noire qu’elle porte, lui enroule et lui noue autour du cou avec une cajolerie déconcertante. La silhouette de la Cathédrale se profile dans son ombre. Le parvis est désert. Les pavés gris reluisent dans la lumière des lanternes. » (L’Autre Mer, P. M. )
Maîtres Bâtisseurs
Si les récits médiévaux et en particulier ceux à propos des bâtisseurs de cathédrales et maîtres verriers vous tentent, ma collection de romans historiques sur ce sujet vous tiendra encore souvent éveillés avant d’aller dormir (non, je ne lis pas que des ouvrages de mer). Quelques exemples : “Les Pilliers de la Terre” (Ken Follet). “Aubertin d’Avalon” ou “le Passeur de Lumière” (Bernard Tirtiaux), “le Grand Feu” (Jeanne Bourin), Le Printemps des Pierres” (Michel Peyramaure) ou encore l’indétrônable “Notre Dame de Paris” (Victor Hugo). Et j'ose espérer que la comédie musicale de Luc Plamondon vous plaira autant qu’elle ne m'a ravie pour invoquer la magie de la cathédrale dans le récit d'un grand auteur.
Alors, je vous partage ici quelques uns de mes souvenirs forts de Notre Dame. Peu importe les médias, peu importe l'image que la presse t'a donnée et peu importe tes détracteurs. Tu restes en moi une grande dame en souvenir, qui défiera les siècles à venir.
Je vous souhaite un excellent dimanche et de très joyeuses Pàques !
0 Comments
J’ai eu l’immense chance de pouvoir travailler au départ d’endroits fabuleux, un peu partout en Europe et un peu plus loin même. Et si ces dernières années, j’ai beaucoup moins voyagé pour mon travail qu’auparavant, pour diverses raisons, je garde néanmoins un souvenir et une tendresse toute singulière pour ces endroits où j’ai bénéficié d’un bureau à la localisation particulièrement idéale et que j’aime ainsi à nommer « office with a view ». Alors, j’ai eu envie de vous les faire partager dans ce billet.
Vue sur Mer et Navires
Indubitablement, certains endroits m’ont charmée plus que d’autres, à commencer par ceux avec une vue sur mer et navires... Et mon lieu de travail favori, qui a remporté la palme d’or à mon palmarès demeure sans conteste ma chère ville des Vikings... La sublime Copenhague. Quatorze mois de pur bonheur dans un bâtiment en forme de navire, et dont la proue (le réfectoire... ) se profilait au-dessus d’un des bras de mer entrant dans la cité danoise. Le rêve ! Avec une terrasse sur le toit en prime et la vue des bateaux durant toute la journée. Que vouloir de plus ?
Plus récemment et encore aujourd’hui, deux clients localisés au port de Bruxelles, face au yacht club (BRYC) et au pont Buda. Voiles, péniches et mouettes au menu de mes réunions. De quoi me distraire des discussions sans fin ou des dossiers quelque peu ennuyeux.
Mais l’endroit le plus fantastique où j’ai pu travailler très brièvement se trouve face à la East River, à New York. Un des bureaux des Ressources Humaines se trouvant à Water street, juste en face du très fameux Pier 17 et ses anciens trois-mâts. Une vue tout simplement époustouflante.
© Photos - Rêvesdemarins
Lieux de Prestige et Corner Office
Un tout premier poste de travail dans un temple grec d’un architecte de la démesure néoclassique, à l’atrium de verre où poussaient de magnifiques bambous jusqu’au plafond, dans un parc de plusieurs hectares. Et une vue, par jour de chance, sur des biches venant se coucher nonchalamment derrière les vitres teintées des bureaux. Puis dans un second et un troisième temple, de verre cette fois. Pour terminer ensuite dans un bâtiment classé tout en rondeur, puis un bureau de coin dans une tour d’argent.
Une époque où mon employeur se targuait encore d'avoir pignon sur rue, pas moins qu'au numéro 1 de Wall street à New York... Des années suivantes où le business lunch se prenait face à l’Arc de Triomphe ou celui de La Défense à Paris, ou même dans une brasserie parisienne de renom sur les Champs-Elysée : la joie de pouvoir passer de longues heures dans un décor somptueux de la Ville Lumière. Les réunions dans une charmante auberge face à un des nombreux lacs de Rotterdam (encore des bateaux... ) ou dans un cottage typiquement britannique en pleine campagne du Sud de Londres, au jardin ombragé où venaient gentiment gambader un couple de renards sous le nez des employés locaux au flegme indécrottable.
Sans oublier mon séjour à la Big Apple pour mon métier, qui m’a également apporté le sentiment incomparable de me promener le matin tôt dans Manhattan pour rejoindre mon autre bureau, se trouvant, lui, sur Wall street. Costume classique et brodequins de mise. Avec une vue imprenable de la skyline du haut de la tour de mon employeur de l’antan. Petit déjeuner paisible dans un coffee shop au Pier 17 en admirant les séances de tai chi des maîtres asiatiques à l’oeuvre dans la lumière du soleil levant, avant de rejoindre la foule grouillante de Wallstreet. Le rêve...
© Photos - Rêvesdemarins et Wikipedia
Et comme les voyages d’affaires forment la jeunesse, j'ai poursuivi par des étapes mémorables aux quatre coins de l’Europe et même un peu plus loin : Dubai, Tokyo, Los Angeles (meetings à Anaheim Disney ! ), Barcelone, Madrid, Milan, Rome, Zurich, Stockholm, Malmö, Düsseldorf, Francfort, Versailles, Oslo, Amsterdam, Den Haag, Luxembourg, Chypre, Londres, Manchester, Coventry, Glasgow et quelques autres...
Et si les voyages d'affaires sont rarement de tout repos (je me souviens entre autres de réunions budgétaires à 2h du matin en plus du décalage horaire à Tokyo.... ), je suis reconnaissante à tous ces employeurs et clients de m'avoir permis de jouer au pigeon voyageur car ces séjours m'ont laissé des souvenirs impérissables.
To Travel or not to Travel, that is the Question...
Dans la problématique actuelle du climat, certains argumenteront qu’il faut idéalement réduire drastiquement nos déplacements. Ou dans les cas où ces derniers s’avèrent absolument nécessaires, il devient urgent de les rendre plus verts. Tout d’abord, les trajets domicile-travail. Ensuite les voyages d’affaires. L’avènement des nouvelles technologies de communication permet en effet de tenir des réunions et communications sans bouger de sa chaise, derrière un écran.
Cependant, si l’on veut être consistant, il faudrait aussi à notre société moderne revoir drastiquement ses pratiques commerciales, touristiques, jusqu’à celles de nos loisirs. Si les voitures personnelles ou professionnelles constituent indéniablement une source de pollution, les modes de transport par camions, cargos maritimes et aériens ou méga-navires de croisière représentent à eux seuls une proportion bien plus large encore des sources d’émissions polluantes pour la planète. Cependant, les habitudes, le confort et le progrès ont la vie dure... Les défenseurs de l’environnement hurlent sur les voitures de société, mais consomment régulièrement des bananes, des ananas ou des denrées en provenance de lointaines contrées. Ils ne rechignent pas de prendre des vacances de manière extensive aux quatre coins du monde avec des lignes aériennes low-cost. Et ne prennent rarement leur vélo pour gérer la logistique complexe et exigeante de leurs multiples activités privées et familiales. Bref, modifier son mode de vie en matière de déplacements demeure un défi de taille. Cependant, en matière d'humain, rien ne vaut une bonne discussion face à face pour régler les problèmes ou consolider de bonnes relations. A mon sens, les voyages d'affaires ne sont donc pas encore prêts à être remplacés par Skype, Whatsapp ou l'email (du moins, je l'espère). Et même lorsque mon travail me garde près de chez moi en Belgique, j'ai tout de même souvent des vues épatantes, le soir au coucher du soleil, même sans voyager... An Office with a View...
© Photos - Rêvesdemarins
Je m'en vais donc rêver de la destination de mes prochains voyages d'affaires - il faut absolument que mon prochain client compte des bureaux aux Açores, aux Bahamas, en Finlande ou en Islande, où il aura absolument besoin de m'envoyer en mission ;-)). Mes amis dont le métier est le voyage (marins, pilotes et autres oiseaux migrateurs), ont, quant à eux, déjà trouvé le bon filon !
Je vous souhaite un excellent dimanche et, qui sait, d'aussi belles prochaines destinations de travail.
Quoi de mieux que d’un peu de soleil pour nous consoler du froid et de la grisaille des mois d’hiver... Alors, je vous emmène dans le Sud ce WE, au pays des tapas et des castagnettes. Et plus précisément dans le grand Sud pour y découvrir quelques unes des merveilles de l’Andalousie.
Tout commence à Gibraltar...
Septième siècle après JC. Détroit de Gibraltar. Tariq Ibn Ziyad inspecte l’horizon. Un gigantesque rocher se dresse dans la mer, tel un magistral portique ouvrant la route vers le monde occidental. Le fameux rocher tient son nom de l'arabe « Djebel Tarik », qui signifie « La montagne de Tarik ». Après les Ibères, Celtes, Tartessiens, Phéniciens, Carthaginois, Romains, Wisigoths et Byzantins, les Maures prennent ainsi possession de l’Andalousie. La culture et l’art mauresque exerceront une influence majeure sur la région. Les arabo-berbères y demeureront jusqu’en 1492. Les chrétiens, dont Ferdinand III de Castille, reprendront Cordoue en 1236, Séville en 1248 et Grenade en 1492.
Les cités andalouses comptent un lien indéniable avec la mer... Les Phéniciens, marins expérimentés, fondent Cadix. Christophe Colomb, autre marin mémorable, découvre ce qu’il croit être les Indes et Séville devient alors le principal port espagnol pour les voyages avec le Nouveau Monde, car il est le seul à avoir le droit de commercer avec les Amériques, jusqu’à ce que Cadix le remplace trois siècles plus tard. En 1802, c’est au large de Cadix, encore, qu’aura lieu une des plus grandes batailles navales, à savoir, celle de Trafalgar (sous le commandement de Sir Horatio Nelson pour la flotte anglaise).
Au Carrefour des Cultures
L’Al-Andalus, devient le lieu des croisées des cultures par excellence. Philosophes, mathématiciens, scientifiques, poètes, architectes de toutes obédiences se côtoient et échangent. Juifs, chrétiens et musulmans y vivent en communauté pacifique. Cordoue devient la plus grande ville d’Europe au Xe siècle et brille par son essor scientifique. La période médiévale dans la péninsule ibérique constitue un épanouissement culturel et intellectuel sans précédent.
Les vestiges architecturaux y sont un des seuls au monde où les diverses cultures et religions cohabitent et sont encore visibles sur un même site. Alors, que partout ailleurs, les architectes commandités par les divers pouvoirs religieux ou politiques ont successivement toujours eu grand soin de détruire toutes traces des religions ou régimes antérieurs, anéantissant ainsi des merveilles architecturales. Rien que pour ce point précis, l'Andalousie constitue un joyau universel.
© Photos - Rêvesdemarins
L’Alhambra, Palais de Légendes - Grenade
La Forteresse rouge au pied de la Sierra Nevada devrait son surnom dû à la teinte de ses murs (à moins que ce ne soit à celle de la barbe de son fondateur Mohammed Ben Nasr). Elle était réputée imprenable. Arcades, colonnes, azuléjos, fontaines, plans d’eau, jardins luxuriants, architecture d’une finesse extrême. D’après des écrits arabes datant du XIVe siècle, le Mexuar présentait à l'origine un toit entièrement fait de cristal, reflétant la lumière du soleil andalou. Seule une fenêtre en demeure encore visible, au plafond du mirador de Lindaraja. Si les diverses bâtisses n’ont pas été élues au rang de la huitième merveille du monde, elles en valent toutefois entièrement leur réputation. On raconte que les émirs nasrides cherchèrent à y recréer un paradis sur terre (probablement pour se consoler de leur pouvoir déclinant). Un endroit exceptionnel, digne d’un conte des mille et une nuits. Impossible de ne pas tomber sous le charme. Washington Irving y écrira d'ailleurs ses "Contes de l'Alhambra ".
"Perhaps there never was a monument more characteristic of an age and people than the Alhambra; a rugged fortress without, a voluptuous palace within; war frowning from its battlements; poetry breathing throughout the fairy architecture of its halls." (Washington Irving, Tales of the Alhambra)
Sur la colline en face, le mirador de St Nicolas. La montée à travers les ruelles blanches en vaut plus que la peine, pour atteindre le parvis de l’église donnant une vue imprenable sur l’Alhambra et les montagnes enneigées a l’arrière-plan, sa petite place ombragée et l’occasion d’une pause pour goûter à la gastronomie locale dans un décor féerique.
© Photos - Rêvesdemarins
Les Trois Grâces
Cordoue, la ville des cordonniers. Sa Mezquita (mosquée/cathédrale) et sa forêt de colonnes bariolées. Plus de 850 colonnes de granit, jaspe et marbre, qui convolent en noces architecturales avec le mirhab (niche à prière) richement décorée, Son charmant quartier juif (Juderia) et sa synagogue. En passant par l'Alcazar de los Reyes Christianos et ses jardins rafraîchissants. Ici encore, un exemple de mélange subtil de cultures. Réminiscences d'une époque d'ouverture.
© Photos - Rêvesdemarins
Séville, la cité aux milles balcons. Les loggias colorées y ont pignon sur rue. Sa cathédrale fabuleuse, ses innombrables cafés, ses rues couvertes, son Barrio Santa Cruz, son Museo Palacio de la Condesa de Lebrija et puis, un endroit moins connu - La Casa Pilatos - mais époustouflant si vous aimez les endroits insolites et les azulesjos... Et enfin, son Alcazar (amoureux de l'art mauresque, à ne manquer sous aucun prétexte ! ).
Encore une référence à la mer et aux navigateurs... Qui sait, y rencontrerez-vous, comme moi, peut-être Christophe Colomb et Rodrigo de Triana (voir le billet du blog "Frère Rodrigo, ne vois-tu rien venir ? " ) au détour d'une abside de la cathédrale ou d'une place citadine.
© Photos - Rêvesdemarins
Cadix, enfin, pour ceux en manque d'air marin et de calme, Une perle de sérénité. L'occasion de flâner dans le plus vieux marché couvert d'Espagne, celui aux poissons (avec des exemplaires de bébètes marines sortant tout droit d'un roman de Jules Verne ! ). La certitude d'une promenade le long de la mer (par exemple au départ de la Caletta en passant par son château de Santa Catalina), les pieds dans l'eau salée au soleil couchant, entre les nombreuses petites barques colorées de pêcheurs locaux. Pour ceux qui veulent faire un peu de sport, la Torre Tavira avec ses centaines de marches pour atteindre la Camera Obscura. Mais qui vous donnera une vue imprenable à 360° sur la ville. Son hôpital des femmes, sa cathédrale ou son Oratorio de la Santa Cueva. Bref, impossible de s'y ennuyer. Et une bonne idée de fin de séjour après un bain de foule dans les autres villes andalouses. Pour plus de photos, jetez donc un coup d'oeil à l'onglet "rêves andalous" de ce site web.
Alors, peut-être l'occasion ce week-end, d'une bonne auberge espagnole ? Que vous soyez chez vous ou que ce billet vous ait convaincu de prendre un vol de dernière minute pour l'Andalousie. Au son du flamenco et devant un bon plat de tapas... Un excellent dimanche à tous !
Qui dit mer, dit parfois dunes... Dans un lointain billet précédent, je vous parlais d’un autre rêve encore à devenir, qui demeure sur ma liste de souhaits depuis bien longtemps sans pourtant encore y larguer mes amarres. Alors, je vous emmène pour une traversée différente ce dimanche : une traversée du désert...
Histoire de vous mettre dans l'ambiance, cliquez donc sur une des musiques ci-dessous au hasard, fermez les yeux un instant et imaginez-vous dans un décor de circonstance pour lire la suite de ce billet... Si vous ressentez déjà les premiers signes du mal de mer, c'est normal, c'est le vaisseau du désert (de son petit nom "dromadaire") qui vous (em)porte !
Désertitude, Infinitude
Mer de soleil avec pour seul azur, celui du firmament Mer de terre, sous le brasier de l'air et le vent ondulant Mer de mouvance à l'aspect sans cesse variant Mer de vagues et de brises aux formes et au jeu incessant Désertitude, Longitude Caps de milles et de millles avant la terre ferme revoir Equipages de sables et de voiles au gré du vent du soir Capitaines de navires de bleu vêtus, de lin masqués Vaisseaux bossus et haut perchés à l'allure lente et balancée Désertitude, Solitude Mer sableuse de réflexion, introspection Rendez-vous avec soi-même en discussion Voyage de rêve éveillé, émerveillé Dans un désert voguer pour se ressourcer Désertitude, Incertitude Inconnu du sort du lendemain Crainte du corps, de la soif, de la fin Des méandres du cœur turpitude De sa propre endurance aptitude Désertitude, Quiétude Nuitées étoilées, rassurante mâture Plénitude du silence, tête à tête avec dame Nature Béatitude de liberté et de vivant se sentir Et à la fin du voyage, de vers le rivage vert revenir Désertitude, Plénitude Pour quelque temps une traversée quelque peu différente Malgré des tempêtes le souffle doré éblouissant Une mer de vagues, sans eau, ni ports Un havre de pierre, îlot de paix dans une mer d'or...
© Photos - Armand & AM Burguet
Un souvenir, c'est comme un mirage dans le désert de son esprit, une oasis dans les dunes de son cœur... (P. M. )
Un peu de poésie pour terminer ce dimanche en attendant de vous lancer (si ce n'est encore fait) dans une magique traversée du désert. Une excellente fin de WE à tous.
Janvier. Il neige sur la ville aux mille tours. Le Pont Charles (Karluv Most) est encore désert, immaculé sous les flocons à cette heure, avant que la horde de touristes ne le noircisse de monde. De l'autre côté du fleuve se dresse fièrement le château. Le long de ses remparts s'y étire la ruelle d’Or et ses maisonnettes colorées. Construite, selon la légende, sur ordre de l’empereur Rodolphe II, un passionné de sciences occultes et d’arts ésotériques au XVIème siècle, elle y aurait abrité les alchimistes chargés de trouver la pierre philosophale permettant de changer le plomb en or et l’élixir de vie... Je vous emmène ce dimanche faire un voyage dans le passé de la romantique et très mystérieuse Prague.
La Ville des Fables
Les contes et légendes font partie intégrante de Praha. Partout où l'on pose le pied dans la cité tchèque, les vieilles pierres transpirent le mystère, la sorcellerie et l'occulte. Jusqu'aux enseignes des maisons, faute de numérotation jusqu'au XVIIIe siècle, qui portaient pour nom des signes dignes d'une fable de Jean De Lafontaine : le renard bleu, le lion d'or, la chaussure blanche, le raisin d'or, la licorne, les trois violons, l'arbre d'or, le soleil noir, la grenouille verte et bien d’autres encore.
© Photos - Rêvesdemarins
Chat noirs, magie noire... La cité regorge d’animaux les plus inattendus. Les frontons des bâtisses rivalisent d’imagination lorsqu’il s’agit de nommer leur huis d’un animal fantastique. Et en plus des chats noirs et autres reptiles en bocaux ou singes, compagnons (d’expérimentation) des maîtres alchimistes, j’y ai croisé ragondins, cygnes et même ours polaire (à mon avis, il s’était perdu celui-là...) !
© Photos - Rêvesdemarins
Festin médiéval
Mon premier souvenir culinaire de Prague m’avait laissée un peu sur ma faim. Mais ma seconde tentative de goûter à la gastronomie tchèque ne m’a pas déçue par contre (à condition de ne pas être végétarien ni trop regardant sur sa ligne). Travers de porc fondants, pain au goulash, volaille ou gibier rehaussé de raifort aux pommes (si, si, la combinaison est réussie), sans oublier les fameux pretzels locaux croquants ou les pains d’épices et une bonne rasée d'absinthe pour arrondir le tout. Une condition : oser la gargote du coin où la carte reste résolument un mystère en langue locale ou se décline en traductions anglaises ou allemandes pour le moins farfelues (celles en russe me demeurant un Code de Da Vinci tout aussi complexe à décrypter que la tchèque). En outre, comme la cité se révèle une incroyable machine à remonter le temps, j’ai résolument tenté un voyage vers le Moyen-Age en terminant mon séjour par un repas médiéval dans une cave chaleureuse sous l’oeil bienveillant du chevalier en armure aux pieds pointus gardant l’entrée et aux réserves bien arrosées : hydromel et alcool de prune local à la lueur des bougies, concert de ménestrels du pays en prime. Un festin !
© Photos - Rêvesdemarins & Wikipedia
Cité légendaire et de Légendes
Les mythes et contes font partie intégrante de Prague. A chaque coin de rue, on risque de se retrouver nez à nez avec l'un de leurs personnages ! (Surtout en hiver lors de averses de neige ou du brouillard local qui reflète parfaitement bien l'ambiance fantasmagorique de la cité. ) Pour n'en mentionner que quelque uns : la légende de St Jean Népomucène, le patron des bateliers, ponts et toute autre personne ayant un quelconque rapport avec l'eau. Ou encore celle du Golem (un être fait de vase et d'argile ayant reçu la vie pour agir comme protecteur des Juifs de la cité contre les pogroms), le Templier sans tête, le Poilu, les Gnômes du château, Laura sans tête, l'Homme de fer, le Squelette de la colline, le Bébé du pont Charles, le Barbier Fou, le Marchand Obèse ou encore le Canal du Diable... Sans oublier la fameuse légende du docteur Faust, qui adepte de magie noire, au XVIe siècle, aurait vendu son âme au diable en échange du secret de l'amour et de la jeunesse éternelle. Bref, on ne s'ennuie guère à Prague.
© Photos - Rêvesdemarins
Les Artisans du Temps
Si le temps semble s’être figé aux siècles passés dans la vieille ville, les horloges, elles continuent inlassablement d’y tourner... Rouages, aiguilles, contrepoids et mécanismes complexes d’horlogerie passionnent les artisans du temps. Réminiscence d’une ancienne invasion helvétique ? L'horloge astronomique (en réalité un astrolabe sensé montrer la position des astres célestes), date de 1410 et est toujours fonctionnelle. Et lorsque toutes les cloches de la cité se mettent en branle pour sonner le méridien sur ordre de l'horloge, on se croirait au Vatican un jour de Pâques. Qui dit méridien, dit astronomie. Et qui dit temps dit... astrologie.
Copernic, Galilée et Kepler. Des noms qui résonnent toujours de nos jours. Tous ont travaillé à Prague. Et puis, un quatrième larron - Tycho Brahé, Tyge Brah de son nom danois - moins connu que ses illustres contemporains. Pourtant, à l’aide de quadrants (ancêtres du sextant) et systèmes de miroirs complexes, bien avant l’avènement du télescope, le mathématicien de la cour fut le premier à observer une supernova et à permettre la découverte des lois fondamentales du mouvement des corps célestes. Il est considéré comme le plus grand astronome du XVIe siècle. La légende raconte qu’il portait un nez en or, suite à une blessure encourue lors d’un duel. En 1601, il meurt subitement à la table de son mécène, l’empereur Rodolphe II, roi de Bohême et de Prague, dans des circonstances étranges faisant penser à un empoisonnement par des métaux lourds. Un geste de la part d’un rival astronome ? Des recherches et une exhumation en 2010 dévoileront un décès naturel coupant court aux spéculations d’intrigues de meurtre, à la légende, ainsi qu’à la nature de sa prothèse nasale, en réalité faite de cuivre/zinc. Le scientifique repose aujourd’hui dans l’église de Tyn, dont les deux flèches pointent vers le ciel en hommage à ses travaux sur la voûte céleste.
© Photos - Rêvesdemarins
L'empeur Rodolphe II, passionné de culture et de sciences, promeut un essor culturel sans précédent à la ville sortant d’une longue période de stagnation. Il possède une collection sans pareil d'oeuvres d'art. En en faisant le lieu de destination préféré d’intellectuels, scientifiques et d'artistes célèbres de l'époque, il lui vaudra le titre d’ « Âge d’Or ». Le peintre italien Giuseppe Arcimboldo (vous savez, ce peintre de tableaux souvent composés de fleurs, fruits et légumes), se risquera même à faire un portait de l’empereur lui-même sous les traits d'un jardinier. L’assemblage ingénieux de fleurs, de fruits et de légumes qu’on y voit à première vue se transforme ainsi sous un œil averti en Vertumne - un Dieu multiforme représentant les quatre saisons et surtout protecteur de l'alchimie... Ce qui nous amène au thème de ce billet...
L'Alchimiste des Sens
En plus de scientifiques, philosophes et savants, l'empereur Rodolphe II de Habsbourg s'est entouré de mages, astrologues et alchimistes. John Dee en fait partie. Dee est un mathématicien, géographe, astronome et astrologue britannique réputé pour ses connaissances en navigation, ayant lui-même formé toute une série d'équipages qui dirigèrent les grandes explorations et expéditions britanniques. Dee a collaboré avec Gerardus Mercator et possède une importante collection de cartes, globes et instruments astronomiques. Il invente des instruments et des techniques de navigation spécifiques pour la navigation polaire. John Dee aurait, dit-on, servi de modèle d'inspiration à William Shakespeare pour le personnage de Prospero dans sa pièce "La Tempête".
Ces équipes de savants ont pour mission de décrypter les mystères de la création et de découvrir les secrets de l'invisible. La légende raconte qu'ils habitent "la ruelle d'or", en référence à leurs travaux ésotériques, aux abords du château de Prague, pour y réaliser leurs travaux en toute discrétion. En réalité, la rue aux petites maisons colorées, est habitée à l'époque par les domestiques du château, puis la garnison et ensuite des orfèvres, d'où l'origine de son nom. John Dee est conseiller de la reine Elisabeth d'Angleterre. Il part donc en mission en Europe au service de Rodolphe. Mais s'il est un expert en navigation, ses dons en matière d'alchimie ne font de lui qu'un charlatan notoire. Il doit s'enfuir de la cour avec bon nombre de ses collègues alchimistes (et pour la plupart escrocs), par peur de la persécution. Son assistant, un certain Edward Kelley (alias Talbot), plus habile, devient magicien en titre de la cour en prodiguant à l'empereur un "Elixir Vitae" (Elixir de Vie), dont ce dernier se trouve tout à fait satisfait. Kelly prétend également avoir trouvé le secret de la transmutation des métaux en or via le biais d'une poudre secrète... Il affirme aussi pouvoir entrer en contact avec des anges par l'intermédiaire d'une boule de cristal. Cependant, ses recherches durent trop longtemps pour la patience du souverain et Kelley est mis en geôle. Ses secrets meurent avec leur père spirituel, lorsque l'alchimiste tente de s'échapper de prison, sans que le secret soit jamais révélé à ce jour... Faust pensait avoir obtenu le secret de la longévité et de l'amour en vendant son âme au diable...
© Photos - Rêvesdemarins
Enfin, des notes de musique, polkas de Bohème, airs aux consonances tziganes et vieux chants folks retentissent dans les auberges ou au coin des ruelles et de ses musiciens ambulants. Les fantômes de Dvoràk, Smetana et Janacek rôdent dans la cité et le long des rives de la magique Vltava. Tout pour me charmer...
© Photos - Rêvesdemarins
Si je n'y ai pas découvert le secret de la pierre philosophale, de la création de l'or ou de l'élixir de vie, j'y ai par contre revu une ville au charme fou, que je ne peux que conseiller de découvrir malgré le froid de canard en hiver (ce qui expique peut-être la présence de l'ours polaire... ). Saison qui, par contre, compense et réduit considérablement le nombre de touristes.
Alors, si entre-temps, vous trouvez le secret des alchimistes, faites-moi signe ! Un excellent dimanche à tous.
Hello again chers lecteurs. Premier billet de l'année. Donc... Bonne année à tous !!!
Que diriez-vous de débuter la série des billets de 2019 par une petite devinette ? "Quel est le point commun entre un plat de spaghetti et votre poste de radio ? "
Les Mille Arcades
Alors, ce point commun ? Vous l'avez trouvé ? Serait-ce l'ondulation et la ligne de leurs courbes ? Le plaisir qu'ils procurent ? L'indigestion lorsqu'on en a trop abusé ? Bon, je vous donne un indice...
Tout débute un matin ensoleillé en Emilie-Romagne (entre la plaine du Pô et les Appenins), dans la cité dont la plupart se souviennent du nom seulement lorsqu'il s'agit de l'évoquer dans leur assiette de pâtes... (Et moi, la première... ).
Fondée par les Etrusques au 6e siècle avant JC, la ville jouit au cours des siècles d'une réputation de sciences et connaissances hors du commun qui lui vaudra son surnom de "La Dotta" (la Savante), comptant la plus ancienne université du monde occidental (érigée en 1088). S'y succèderont au fil des siècles, des personnages plus brillants les uns que les autres, dont les philosophes et écrivains Pétrarque, Dante Alieghieri, Umberto Eco, les musiciens Farinelli, Respighi et le scientifique Luigi Galvani et bien d'autres... La cité se couvrira de toits aux tuiles rouges qui lui vaudront son second surnom "la Rossa" (en plus de ses inclinaisons politiques) et d'innombrables tours. La ville se dotera également de portiques magnifiques et pas moins de 38 km de galeries couvertes d'arcades reliant les bâtiments du centre historique. Pas besoin de parapluie pour sy' promener ! Sans oublier sa fameuse tradition culinaire (qui lui vaudra son troisième surnom "la Grassa") et son inmanquable "spaghetti al ragu".
© Photos - Rêvesdemarins
De Fil en Ondes...
Toujours pas trouvé ce point commun ? Mmm... Allons bon, je vous aide : qui dit spaghetti, dit pâtes et par association, maccheroni... Qui dit maccheroni, dit... Marconi... Et tous deux sont des purs originaires de ... Bologne.
Revenons ainsi à nos moutons et retrouvons un de ces fameux personnages qui ont fait sa renommée. Nous sommes en décembre 1894, dans le grenier d'une de ces magnifiques demeures aux couleurs chatoyantes. L'homme passionné en électricité pousse un "hip hip hip hourra" (ou plutôt... "evviva " en langue locale) retentissant. Voici des mois qu'il travaille à des recherches sur un mode de communication sans fil en se basant sur les travaux déjà réalisés par d'autres scientifiques tels que Samuel Morse, Thomas Edison, Nikola Tesla, Heinrich Hertz et Edouard Branly (l'inventeur du "cohéreur", un radioconducteur). Et ses efforts viennent enfin d'aboutir. En améliorant et combinant les réalisations de ses prédécesseurs, Guiglielmo Marconi parvient à réaliser une liaison radio à grande distance en télégraphie.
Le processus n'est pas encore parfaitement au point et nécessitera pas mal d'ajustements. Il réalisera ainsi une première liaison télégraphique de 24 km dans les Alpes suisses un an plus tard. Mais à son grand dam, les autorités italiennes lui refusent le soutien et Guiglielmo décide de rallier la Grande-Bretagne pour y poursuivre ses recherches. Les Anglais puis les Américains auront plus d'estime pour les résultats de ses travaux. Il obtiendra alors un premier brevet pour son invention et fondera la société Marconi (à l'origine, nommée "Wireless Telegraph & Signal Company"). Nikola Tesla contestera d'ailleurs à plusieurs reprises la légitimité de sa découverte, clamant que les signaux radio ne sont qu'une autre fréquence nécessitant un émetteur et un récepteur. La US Patent Office américan finira par laisser le crédit de l'invention à Marconi. En 1901, il réalise la première transmission radio transatlantique entre le Canada et les Cornouailles (Angleterre), ce qui lui vaut le prix Nobel en 1909, partagé avec Karl Ferdinand Braun.
© Photos - Wikipedia
Comment ça marche ?
Les ingénieurs en électro-techno-mécanique me pardonneront mon explication simpliste. La communication sans fil est rendue possible par la diffusion dans l’espace d’ondes électromagnétiques. On observe ainsi la transformation de la voix (dans le micro) en signal électrique vers un émetteur, qui le transforme à son tour en onde électromagnétique. Ces ondes passeront alors d'un émetteur vers un récepteur (par un système d'antennes) sur la surface de la Terre, en se reflétant sur des couches de l’atmosphère ("l'ionisphère") à une certaine vitesse. Les charges électriques dans l’ionosphère font effet de miroirs pour transporter les ondes vers le récepteur. Ensuite, à la réception, l’onde électromagnétique ainsi parvenue se remodulera en un signal électrique, qui redeviendra à son tour un signal sonore. Emetteurs et récepteurs comprennent diverses pièces permettant la diffusion des ondes (antenne, amplificateur, oscillateur, modulateur, haut-parleur... ), ou le filtrage des parasites du son.
"Allo, A l'Eau..."
L'histoire de la radio et de la communication sans fil est donc une oeuvre collective, résultant des efforts combinés et successifs de divers hommes de science (ondes électromagnétiques, TSF, télégraphe... ). Ses applications seront multiples, mais c'est en mer qu'elle se révèlera rapidement comme le moyen par excellence de communication sans fil. La première usine de radios voit le jour en Angleterre, sur une commande de la flotte britannique, pour améliorer ses communications maritimes et la sécurité en mer. La flotte française suivra. Lors de leurs fortunes de mer, c'est ainsi grâce à la radio que le Titanic et le République-Florida purent envoyer des messages de détresse permettant tout de même le sauvetage d'une partie de l'équipage.
Naufrage du Titanic.
Qu'en est-il de la radio maritime de nos jours ? La communication par satellite (du type Iridium ou Inmarsat) a peu à peu conquis les ondes maritimes. Divers systèmes basés sur l'utilisation des ondes existent en parallèle et servent des bandes distinctes pour des utilisations diverses en matière de sécurité et communication en mer : VHF (very high frequency), Navtex, Navdat, radiotélégraphie, BLU marine, UHF, AIS... Même le Morse continue d'être utilisé dans quelques régions d'Afique du Nord, du Moyen-Orient, de Chine ou de Russie (Algérie, Irak, Kazakhstan, Koweït, Liban, Libye, Mauritanie, Ouzbékistan, Soudan, Yémen... ).
Un brevet de radiotélégraphiste (ou... , hé oui, "Marconist" en néerlandais... ) est toujours exigé des navigateurs. Le système mondial de détresse et de sécurité en mer (SMDSM) coordonne la gestion des appels de détresse et opérations de secours en mer, telle que celle des canaux et procédures pour les cas de détresse, comme les fréquences 2182 kHz en MHF et canal 16 en VHF. La bande métrique VHF maritime couvre de 156 à 162 MHz. Sa portée d'exploitation varie de 2 à 30 milles marins selon la puissance et la hauteur des antennes. La VHF portable, par contre, est limitée à une portée théorique de 3 à 9 milles selon le relief. Mais, toujours avoir une VHF portable à bord et surtout dans le cockpit n'est pas un luxe pour les navigateurs... Elle en vaut l'investissement. A bon entendeur salut.
D'ailleurs, pour revenir à notre introduction, la ville de Bologne, même si elle n'est pas portuaire, ne peut nier son lien certain avec la mer, jusqu'à dans son architecture citadine...
© Photos - Rêvesdemarins
Je vous laisse donc méditer les bienfaits de l'invention de Marconi, sur quelques airs de circonstance. Et qui sait, ce petit billet aura-t-il suscité chez vous l'envie de découvrir la ville d'où proviennent non seulement votre poste de radio ainsi que votre spaghetti ?
Et en prime, histoire de voir si vous connaissez encore votre code morse, voyons qui d'entre vous décryptera le message ci-après ? -*** |---|-*|-**|**|--|*-|-*|-*-*|****|*|-*-*--|
Une large barbe blanche. Des cheveux parsemés d’argent, animés de boucles rebelles. Des yeux clairs, vifs. Un regard qui pénètre. Un physique imposant. Une redingote sombre. Un gilet couleur d’ardoise. Sur sa chemise immaculée, un fier nœud papillon.
Jules regarde par la fenêtre. Le vent s’est levé sur la petite ville du Crotoy. Sur la table près de la fenêtre à croisillons, une lampe à huile et des plumes à écrire. Un manuscrit de pages jaunies gît ouvert sur le bois foncé. Quelques lignes imprimées à l’encre noire, garnies de ratures. La bise du soir qui tombe mugit contre les volets de chêne. Comme une plainte, une lamentation qui n’en finit pas. Il repense à sa ville natale, Nantes et son port où il a passé sa tendre enfance. L’eau, les rivières et la mer font partie de lui. Il a fait l’acquisition d’un petit navire – le Saint Michel, avec lequel il va faire des tours d’Europe. Au loin, l’homme peut imaginer le murmure de l’eau qui se retire doucement de la baie sous le soleil couchant. Le jusant… Fort et insaisissable à cet endroit. L’eau. Un élément qui l’attire et l’intrigue. Une force de la nature renfermant des trésors et des dangers indescriptibles. Et si… Pas si indescriptibles que cela, se dit l’homme. Et il se remet à sa table. L’inspiration arrive. Soudain, elle coule à flots. Elle le submerge. Et les pages jaunies se remplissent soudain avec la rapidité d’un torrent qui dévale une montagne. Jules vient d’entamer l’écriture du second volume de ses « Voyages Extraordinaires », débuté six années plus tôt. Les aventures du Capitaine Nemo et de son sous-marin deviendront une des plus grands références littéraires de romans d’aventure.
A la Recherche de Nemo
La presse regorge de récits quant à un monstre marin géant à la force titanesque qui aurait causé une série de naufrages dans plusieurs mers du globe. Une grande chasse est alors organisée pour débarasser les océans de cette créature monstrueuse. Un navire américain – l’Abraham Lincoln - est affrété pour se mettre en expédition. Après des mois de recherches et une collision frontale entre le navire et le monstre, quelques marins sont projetés par-dessus bord et faits prisonniers du monstre, qui n’est en réalité qu’un sous-marin en acier – le Nautilus, dirigé par un capitaine pas comme les autres : Nemo.
Nemo en veut à la planète toute entière. Il a choisi le monde sous-marin pour nouvelle patrie. Il emmène les prisonniers découvrir son monde. Ils partent ainsi à la rencontre de merveilles englouties au fond de l’océan et de créatures de cauchemar, telles que des calmars géants (qui sait, la progéniture du fameux « Kraken » ? ). "Ce ne sont pas de nouveaux continents qu'il faut à la terre, mais de nouveaux hommes ! " (Vingt Mille Lieues sous les Mers, Jules Verne, 1870)
© Photos - Wikipedia
Visionnaire
S'il était visionnaire sur les découvertes scientifiques qui allaient révolutionner le monde des années plus tard, Jules l'était également en ce qui concerne l'environnement et les terribles dangers qui le guetteraient à notre époque... J'aimerais qu'il se soit trompé à ce propos... Hélas...
"Cependant, le capitaine avait raison. L'acharnement barbare et inconsidéré des pêcheurs fera disparaître un jour la dernière baleine de l'Océan. " (Vingt Mille Lieues sous les Mers, Jules Verne, 1870)
Le Jusant
Le soleil brille au bord de l’horizon. Il fait scintiller le sable à marée basse. Durant la journée, cette immense plage se transforme en mer où bateaux de pêche et amoureux des vagues se baladent gaiement. Un peu comme le Mont St Michel, la baie du Crotoy change de paysage deux fois par jour, totalement. On se croirait à un autre endroit. Les marées sont puissantes et envahissent toute la superficie qui borde les maisons aux couleurs et parfums de mer. Même les prés où broutent tranquillement les moutons ont ici un goût de sel. L'océan n'est pas loin... L'endroit parfait pour l'inspiration d'un roman sur la mer.
© Photos - Rêvesdemarins
"Marin" rime avec "Train" à Saint-Valéry
Un peu plus loin dans la baie : Saint-Valéry sur Somme. Une charmante bourgade médiévale. La pucelle de Rouens y aurait été emprisonnée brièvement. L'idéal pour y bourlinguer un dimanche matin ensoleillé le long de l'eau. Malgré ses touristes, l'endroit y reste attrayant. Le train à vapeur qui relie les ports de la baie semble tout droit sortir d'un roman de Jules... Les ruelles colorées y portent la marque de la mer. Aucun portique sans son caractère nautique. Tout pour me plaire...
© Photos - Rêvesdemarins
Envole-Moi
Enfin, Le Crotoy, c'est aussi la première école de pilotage au monde. Un peu comme pour faire hommage à Jules... En 1910, les frères Gaston et René Caudron se lancent comme pionniers de l'aviation et créent la première école de vol avec des traversées Le Crotoy - Le Touquet. Ils sont également à l'origine du premier hydravion.
© Photos - Wikipedia
C’est ce WE l’anniversaire d’une amie chère, américaine vivant en France, qui m’a fait découvrir l’année passée ce très bel endroit de baie de Somme qu’est Le Crotoy et sa région. Alors, ce billet est pour toi, chère D.
Je vous souhaite tous un excellent dimanche. Et peut-être l’occasion de planifier un voyage dans la région où Jules a écrit ce merveilleux roman, ou encore de lire (ou de relire) cet ouvrage très en avance sur son temps.
Les archéologues y trouvent chaque jour de nouvelles merveilles. Chaque centimètre carré de terre y met quotidiennement à jour les beautés du passé, si bien que les bras (et les finances) manquent pour révéler tous ses splendides secrets. Une île pas comme les autres... Je vous emmène ce WE au pays des Mille Colonnes... La Sicile.
Mille Cultures
Le Bassin Méditerranéen : une mer riche en histoire, voyages et mélanges de cultures. Les diverses civilisations s’y sont croisées, mêlées et confrontées depuis toujours. Et franchement, lorsque l’on découvre ses rivages ensoleillés et ses richesses naturelles, on aurait aussi envie de s’y installer. Une île volcanique en particulier a fait la convoitise de pas mal de peuples, et sa situation géographique relativement centrale n’a fait qu’accentuer son attrait pour les navigateurs de passage vers de nouveaux rivages. Phéniciens originaires du Liban actuel et Carthaginois d'abord. Ensuite Grecs, Romains, Byzantins et Musulmans. Suivent alors Normands, Germains, Français puis Italiens. Tous ont fini par poser leurs tentes et leur dévolu sur ce lopin de terre flottant au milieu de... la Mer du Milieu.
Chacune de ces civilisations y a laissé ses empreintes et un héritage culturellement et architecturalement fertile. La diversité de ses conquérants respectifs ont ainsi fait de l'île un savant patchwork, mélange du meilleur de chacun de ses dominateurs.
Mille Colonnes
Il y a dans ce monde, quelques endroits qui ont marqué ma mémoire... Quatre sites archéologiques gréco-romains en font partie : Phaselis et Thermessos en Asie mineure (Turquie actuelle) - Segesta (Ségeste) et Selinunte en Sicile... Ces quatres endroits m’ont interpellée de par leur situation géographique particulière : en pleine nature, loin des hommes et de leur civilisation, dans leur état quasiment originel. On s'y croirait revenus à l'époque de leur construction.
Et souvent comme à Selinunte, les défis relevés par les archéologues me laissent sans mots, face à leur incroyable savoir-faire pour recomposer un bâtiment au départ de milliers de morceaux de pierres éparpillées dans un puzzle géant. Le résultat en est tout simplement époustouflant pour rendre vie à ces vieilles pierres (et dans le bon ordre, s'il vous plaît ! ). Avec parfois, encore même le gardien du temple lui-même (comme ce petit vigile fourreux, aux yeux dorés et écailles de tortue, qui n'a pas manqué de me réclamer mon offrande aux Dieux (à savoir : quelques caresses ! ) avant d'entrer dans le lieu sacré... Dû que je me suis empressée de lui donner sans rechigner aucunement ! ).
© Photos - Rêvesdemarins
Les Mille Couleurs
En sus des magnifiques temples, stades et théâtres érigés par les Grecs (comme ceux de Taormina ou Syracuse), les Romains, eux aussi, ont laissé à la Sicile des oeuvres d'art fabuleuses. Notamment à l'aide de milliers de petites pierres colorées : les mosaïques. Preuve d'un raffinement sans précédent et d'une vie prospère. La villa romaine de Casale en demeure une preuve indéniable.
© Photos - Rêvesdemarins
Les Mille Pavés
Lors de l'époque phénicienne, une colonnie s'est installée sur l'île de Mozia (ou Mothia) en face de Marsala au Nord-Ouest de la Sicile. Je vous en avais quelque peu parlé en vous présentant les marais salants dans un billet précédent. A cet endroit, la lagune est très peu profonde. A l'époque phénicienne, une route reliait les îles... On peut aujourd'hui encore la deviner sous l'eau. Mille pavés pour joindre les hommes. Les fouilles y ont encore lieu actuellement et on y retrouve des témoignages de toute finesse de cette peuplade aux moeurs pourtant relativement brutales (adorateurs de Baal où les sacrifices humains faisaient partie des offrandes courantes au Dieu du feu).
Mille pavés également pour Erice, la ville médiévale fortifiée perchée sur son promontoire. Des ruelles chaleureuses malgré le brouillard qui entoure souvent la cité. Un petit voyage qui nous replonge dans le Moyen-Âge.
© Photos - Rêvesdemarins
Les Mille Kashbas
Mazzaro del Vallo. Selon les dires, la ville au plus haut taux d'émigration de toute la Sicile, spécifiquement dans l'industrie poissonnière. Petit port de pêche du Sud, la cité abrite un quartier arabe : la Kashba. Un dédale de ruelles charmantes, un labyrinthe délicieusement décoré de céramiques colorées aux motifs marins, jusqu'aux marches des escaliers ! Un endroit où il fait bon se perdre et y entendre le muezzin à côté des cloches des églises toutes proches et y déguster un couscous local au poisson. Un bon mélange de cultures, juste comme je les aime.
© Photos - Rêvesdemarins
Je pourrais encore vous parler des mille autres endroits splendides de cette petite île, des mille plats succulents que les Siciliens savent préparer et des mille autres photos que j'y ai prises... Seul bémol, les mille sacs de détritus le long des routes que l'on retrouve absolument partout sur l'île...
Mais, je m'en tiendrai là, histoire de ne pas vous donner une indigestion de la Sicile. N'empêche... Aux amoureux des vieilles pierres, de la culture, du soleil et de la proverbiale convivialité méridioniale : à mettre sur votre liste de voyages ! Je vous souhaite mille bonnes choses ce dimanche.
La Mer en regorge. Et il finit souvent dans notre assiette... Alors pourquoi ne pas lui consacrer un billet. Le quoi? Le Poisson, dites-vous ? Et non, pas cette fois-ci... Le sujet d’aujourd’hui vous emmène découvrir une denrée rare et précieuse : l’Or Rose.
Il fait flotter les bateaux et nous parfume les lèvres. Depuis des millénaires, l’homme le récolte comme un objet de culte. Formé de riche évaporite, ce cristal fait l’objet de commerce et de convoitise depuis la préhistoire. Ses propriétés de préservation et conservation alimentaire ont joué un rôle crucial dans les grandes conquêtes et navigations au long cours. Il a dès lors revêtu un aspect stratégique dans pas mal de découvertes de nouveaux mondes et de batailles sans possibilités de ravitaillement. Il a même servi de monnaie ou d’impôt et les Normands ont été jusqu’à en faire un monopole. Il existe dans notre corps, en préserve un certain équilibre, notamment pour son hydratation et se retrouve jusque dans nos larmes. Sans lui, certains aliments (notamment le pain) paraissent bien fades. Et comme pour toutes les bonnes choses, il ne faut pas en abuser.
Son petit nom ? Na Cl, ou chlorure de sodium. Sur votre table, il prend le sobriquet de "sel", ou encore "saumure" en référence au procédé qui lui permet la conservation de produits périssables.
Entre Terre, Ciel et Mer
Le sel peut provenir de trois sources principales : la mer (salines ou marais salants - les mers et océans constituant la plus grande réserve de sel au monde), la terre (les mines ou salins) ou la synthèse artificielle.
Dans le premier cas de figure, qui nous intéresse aujourd’hui, l’environnement doit être propice à cette culture et compter les quelques conditions nécessaires, à savoir : une eau de mer riche en cet élément chimique, des eaux stagnantes ou peu profondes, un climat aride, chaud et venteux. Ce condiment traverse alors diverses phases pour sa récolte. L’eau stagnante passe par une série de bassins de profondeurs diverses, du plus profond (et froid) au moins profond, environ 30 cm (et donc plus chaud), ce qui permet l’évaporation et la hausse du taux de salinité. Des moulins à vent gèrent le drainage de l’eau vers les bassins et sa moulure. Le sel ainsi sédimenté est ensuite récolté à la main, cela depuis l’antiquité et placé pour sécher en tas autour des bassins. Il est récolté environ trois fois par an. « L'eau de mer contient environ 35 grammes de sel par litre d'eau, ce qui représenterait si toute l'eau des océans s'évaporait une hauteur de 60 mètres de sel répartie sur 71 % de la surface du globe (soit la superficie actuelle occupée par les eaux). » (source - Wikipedia)
La Route du Sel Sicilienne
Dans nos pays du Nord, on connaît souvent les marais salants de Guérande, de l’Île de Ré ou de Noirmoutier, ou à la limite, le sel rose de l’Himalaya (mais pas marin celui-là... ) pour les plus férus d’exploration et d’exotisme culinaire. À moins d’avoir, comme moi, de la proche famille dans ce très beau pays qu’est celui de Dante Alighieri, le sel italien, par contre, nous est moins familier et atterrit moins fréquemment sur notre table.
Si le monde gréco-romain disposait du miel et autres produits sucrés pour la conservation des aliments, ces derniers étaient onéreux. Le sel fut donc considéré comme un produit beaucoup plus abordable et très répandu à cet effet. Il était également utilisé pour des rituels religieux et des offrandes aux dieux. Chez les Phéniciens, en particulier ceux s’étant installés en Sicile et aux alentours de Marsala, Trapani (Nord-Ouest) et de l’île de Mozia (ou Mothia, de l’akkadien "Metu"signifiant "eaux stagnantes"), on parlait parfois du sel local comme de « l’Or Rose »... Ce surnom reflèterait sa teinte en fin de cycle en raison des micro-organismes marins qui entrent dans sa composition (crustacés ou autres) à cet endroit spécifique. Si le sel de la région de Trapani généralement commercialisé, surtout pour la haute gastronomie, est bel et bien blanc et intégral, il en existe en effet, une variété - produite en toutes petites quantités - qui peut se targuer de détenir cette couleur singulière rosée (ainsi qu’un goût hors du commun). Mais les locaux conservent ce met précieux principalement pour leur propre consommation. La légende affirme qu’il possèderait des vertus de longévité. Qui sait...
Cette appellation d’ « Or Rose » convient particulièrement bien aux marais salants de cette localité sicilienne, surtout au coucher du soleil, qui les transforme en lieu féerique en termes de jeux d’ombres et de coloris pastels, dont le... rose. Voyez plutôt.
« Sea, Salt and Sun... »
© Photos - Rêvesdemarins
Alors, sans vouloir y mettre mon grain de sel, je vous invite à prendre votre bâton de pèlerin et à aller faire un tour sur cette île où les Grecs, Romains, Phéniciens et Normands firent un jour escale en y laissant des vestiges fabuleux que je vous ferai découvrir dans une prochaine note (qui ne sera pas salée ;-)).
Enfin, le sel est aussi un symbole antique d'amitié, de finesse et de gaieté… Alors, pourquoi pas l’occasion de préparer cette semaine un bon poisson grillé en croûte... de sel. Je vous souhaite un excellent dimanche, salé juste à souhait.
Un peu de mythologie ce dimanche. Histoire de nous remémorer nos ancêtres gréco-latins. Et puis surtout, de suivre mon envie de vous emmener quelque part sur un archipel ensoleillé, riche en récits de volcans et de créatures fantastiques (et non, ce ne sont pas les Açores cette fois-ci).
Eole avait Sept Filles...
Le Dieu Eole avait sept filles, toutes plus belles les unes que les autres. Elles se prénommaient Vulcano, Lipari, Stromboli, Panarea, Salina, Filicudi et Alicudi. Elles vivaient dans une région reculée de la mer du Milieu, sur un continent aujourd’hui disparu. Eole tenait tellement à sa progéniture qu’il ne laissait personne s’approcher de ses filles ni ne leur permettait d’aller se promener hors de cette partie de son royaume. Et les pauvrettes se lamentaient en silence de devoir demeurer en marge du reste du monde. Cependant, Eole aimait tendrement ses filles et il finit par écouter leurs souhaits de sortir de leur prison dorée pour aller prendre l’air.
Lors d’une de leurs balades, l’une d’elles, la plus jeune des sept, Stromboli, à la longue chevelure couleur de feu, tomba éperdument amoureuse de Polyphème, un Cyclope venu d’une lointaine contrée du Levant. Polyphème était un berger. Il était laid, avait l’air d’une brute et faisait peur aux habitants par son air repoussant. Mais il avait bon cœur. Et Stromboli l’avait remarqué. Au fond de son gros œil unique, brillait une lueur de grande gentillesse et de tristesse aussi. S’il était un demi-Dieu, la nature ne l’avait pas doté là d’un physique très attirant. Stromboli n’avait cure de son aspect et elle sut que son cœur lui appartiendrait. Elle avait beau se pavaner devant lui et se parer de ses plus beaux atours, ce dernier ne semblait pas la remarquer. Des semaines durant, elle lui montra sa tendresse et son attention. Elle lui envoyait des pétales de fleurs et des senteurs délicieuses, en vain. Le géant demeurait insensible à ses charmes. En réalité, Polyphème ne pouvait pas voir Stromboli car elle, tout comme ses sœurs et son père, avaient une forme éthérée, donc invisible aux yeux des autres. Il pouvait, tout au plus, sentir la caresse de sa main sur sa joue, sans se douter qu’il s’agissait là d’un geste d’amour, En outre, Polyphème ne partageait pas les sentiments de la belle. Le géant n’avait d’yeux (au singulier... ) que pour une nymphe au regard couleur de l’océan se prénommant Galatea. Et la fille d’Eole se lamentait de son malheur. Elle en devint tellement triste qu’elle en pleurait à chaudes larmes toutes les nuits. Et de ses larmes naissait une nature verdoyante. Son père décida alors de régler la situation une fois pour toutes en éliminant la cause du problème : il lui fallait trouver un moyen de rendre Stromboli visible à son prétendant et de lui faire comprendre à quel point sa fille cadette était un bon parti. Eole se mit donc en route pour rencontrer le Cyclope, lui montrer le chemin de son palais et lui parler en tête à tête, Arrivé en bord de mer où le géant faisait paître ses moutons, il commença à lui souffler à l’oreille la route vers le continent éolien ainsi que toutes les qualités de sa fille, doucement puis avec plus d’insistance. Cependant, puisque Polyphème ne pouvait pas distinguer Eole non plus, il ne remarqua qu’une forte brise, se muant ensuite en bourrasques dans les voiles des navires croisant au large. Et plus Eole s’appliquait dans son discours, plus le Cyclope prenait peur en voyant la houle monter et les arbres se plier sous le vent de manière incontrôlable. Par crainte d’afronter un ouragan, le géant prit ainsi parti de s’enfuir. Voyant son futur beau-fils prendre la poudre d’escampette face à ses insistances, Eole en prit ombrage et se mit à crier si fort que toute la mer se leva d’un coup. Et ce n’est que par miracle que le géant réchappa à la vague titanesque que le Dieu des vents avait ainsi soulevée jusque sur la terre.
© Photos - Rêvesdemarins
Blessé dans son égo divin et sa fierté de père, le Dieu des Vents décida alors de se venger. Et pour se faire, il lui fallait éliminer la cause du problème, a savoir, Galatea. Sans Galatea, Polyphème allait certainement épancher son chagrin chez Stromboli et le tour serait joué. Il imagina alors un stratagème machiavélique pour écarter la nymphe. Il susurra alors à l’oreille d’un autre berger, le très beau Acis, que Galatea ne rêvait que de lui et qu’il lui fallait à tout prix conquérir la damoiselle. Aussitôt murmuré, aussitôt fait. Il mit Acis sur le chemin de la jolie nymphe. À leur rencontre, près de la rivière au pied de la montagne toute proche, l’Etna, ils tombèrent tous deux immédiatement sous le charme et décidèrent de s’enfuir ensemble. En découvrant que sa belle lui échappait ainsi pour un autre, le Cyclope poussa un cri inhumain, déracina les arbres à mains nues et arracha un énorme rocher de basalte pour le précipiter sur les deux tourtereaux. Galatea parvint à s’enfuir de justesse et alla se jeter dans les flots de la mer toute proche. Acis, lui, ne survécu pas à la fureur du géant et son sang se versa dans la rivière. Et les méandres de la rivière se mêlent aujourd’hui encore aux vagues marines, réunissant ainsi les deux infortunés à jamais.
Eole, voyant le résultat de ses manigances, se retira, se frottant les mains, l’air guilleret, la rivale ayant ainsi été prestement éliminée. Le Cyclope allait certainement oublier son chagrin dans les bras de sa fille Stromboli. Cependant, il restait un souci, et pas un moindre : comment Stromboli allait-elle se faire aimer du géant sans qu’il ne puisse la voir ??? Eole avait beau réfléchir, il ne voyait pas de solution. Alors, il s’en alla demander conseil au Dieu du feu, Ephaïstos, son ami de toujours. Ephaïstos tenait sa forge dans l’Etna. Ephaïstos sourit en entendant son récit et lui dit : « Mon cher Eole, si tu acceptes de me donner ta fille Vulcano en noces, je rendrai Stromboli visible pour Polyphème. Acceptes-tu? ». Et comme Eole ne pouvait rien refuser à sa fille cadette, il accepta le marché.
En rentrant chez lui, au lieu de retrouver ses filles diaphanes sur une mer bleue sans fin, il aperçut sept formes noires se dresser dans la brume du petit matin sur son royaume. Et la plus haute d’entre elles brillait d’une chevelure de feu volant dans les nuages. Il reconnut alors immédiatement Stromboli et ses cheveux flavescents. Ephaïstos avait tenu parole, il avait bel et bien donné une forme visible à sa fille. Et à ses six autres sœurs.... Et non, le Dieu avait un peu trop bien fait les choses. À présent toutes ses filles avaient un aspect bien tangible et formaient un incroyable archipel au Nord de la montagne Etna. Les sept îles se dressaient fièrement dans leur écrin marin sur un océan miroité des lumières rosées du soleil couchant. Eole gémit de tout son être en réalisant qu’il venait de laisser pétrifier ses filles à jamais et continue encore aujourd’hui à geindre entre les différentes îles éoliennes. Tres fréquemment avec une force imprévue, lorsqu’il ne peut contenir sa colère vis à vis d’Ephaïstos. Et le Cyclope, me direz-vous? Polyphème, pour épancher son chagrin, s’assied depuis toutes les nuits en bord de mer pour admirer le mont Stromboli au loin, ses gerbes de feu et ses torrents rougeâtres de lave en fusion. Sans le savoir, il est finalement tombé amoureux de la belle Stromboli, qu’il peut à présent contempler de son œil triste et s’émerveiller. On prétend qu’il ne s’en est jamais lassé depuis et que la belle continue depuis les millénaires à offrir son spectacle de feu toutes les. nuits à son berger.
|
AuteurArchives
August 2023
Catégories
All
Suivez Rêves de Marins sur Twitter
|