Une histoire de corbeaux bien noirs et de reliques lugubres en mer, cela colle pas mal avec Halloween, non ? Alors voici une version de la fable revue et corrigée par les marins lusitaniens, ce dimanche. Je vous emmène me rejoindre à Lisbonne (mais sans la pluie ! ).
Gabarre : Substantif féminin. Peut s’écrire « gabare » ou « gabarre ».
Tout débute il ya bien longtemps... près de Sagrès, au Portugal. Dans la lumière sombre du matin, les restes d'un homme sont retrouvés sur les rochers à l'extrême pointe Sud-Ouest de l'Europe. Ils sont gardés par des corbeaux (la légende raconte que c'est pour éviter que les vautours n'en fassent une bouchée). Ces restes humains, il s'agit de ceux du très vénéré Saint Vincent de Saragosse, un diacre chrétien persécuté avec une infinie créativité ( ! ) et décédé plus de quatre siècles plus tôt en Espagne à Valence.
De cet endroit hors du commun, s'élanceront des siècles plus tard, les plus grands navigateurs de ce monde, à la découverte de nouveaux continents (dont Henri le Navigateur). Le récit sera à l'origine du nom de ce cap : le Cabo de São Vicente ou Cap Saint Vincent.
© Photos : Wikipedia
En 1147, Afonso Enriques, le premier roi du Portugal fait le vœu de protéger les reliques de Saint Vincent s’il guide ses armées, en infériorité numérique face aux Maures, vers la victoire lors du siège de Lisbonne. Les Portugais conquèrent ainsi la ville. Et le roi, étant un homme de parole, les fait alors rassembler (le pauvre Saint avait été quelque peu "éparpillé" entre divers lieux de culte). Il les fait ainsi transporter jusqu'à la capitale du royaume lusitanien et inhumer dans la cathédrale de Santa Maria Maior ("la Sé") dans le quartier de l'Alfama. Pour ce faire, le Saint entame son dernier voyage - plus de trois cents kilomètres - via les eaux tumultueuses des côtes portugaises de l'Atlantique. La légende prétend que des corbeaux accompagneront, ici une fois encore, le navire tout au long de son dernier périple pour protéger la dépouille de leur défunt maître.
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© Photos : Rêves de Marins
Lisbonne prendra ainsi Vincent pour Saint patron. Et la capitale lusitanienne adoptera pour emblème, deux corbeaux sur un navire (probablement une caravelle plutôt qu'une gabarre, mais il fallait que cela rime ;-)).
Un protecteur au nom doux à l'oreille et au palais, puisqu'il sera également reconnu comme le patron des vignerons... Même si son histoire est quelque peu lugubre, il me plaît bien, ce Vincent ;-).
Alors, happy Halloween d’un Lisbonne lugubrement pluvieux en ce 31 octobre et je vous souhaite « a todos um bom domingo » comme on dit ici !
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« Tout le ciel n’était plus qu’une large chamarre… » (E. Rostand, Les Musardises, 1890)
Un petit billet juste pour le plaisir des yeux, des sons et des mots.
Larguons les (Ch) amarres, ce week-end ! Tintamarre de teintes, Chamarres de saison
© Photos – Rêvesdemarins
Un excellent (et beau) dimanche d’automne à tous.
Que diriez-vous d'une histoire de super héros, ce dimanche ?
Le marin était tranquillement assis sur la pont lorsqu’il sentit une infime caresse sur son bras dénudé. Il aperçut alors une minuscule araignée grimpant sur son coude. Comme une petite brise, mais un peu plus insistante. De caresse, la sensation se mua en brève douleur. “Aïe, elle m’a mordue, la goulue ! “
Un récit qui aurait pu débuter comme un roman de Marvel et un de ses super héros…
Les gabiers, hommes-araignées
Sur le plancher, une araignée, se tricotait des bottes...
Je me souviens de cette chanson enfantine que me fredonnait ma marraine pour m'endormir lors de ma toute petite enfance. Et pourtant, elle n’est pas tout à fait parvenue à me faire aimer les araignées... Même si je reconnais qu'elles sont d'utilité à notre environnment, qu'elles soient petites à longues pattes ou grosses velues, je les préfère loin de moi et surtout en dehors de mon habitation. Pourtant, résidant à la campagne, elles adorent s'y prélasser, surtout en automne.
Par contre, leur travail de tisserands m'épate et je dois bien reconnaître qu'elles s’avèrent être des couturières hors pair. Leurs toiles sont de véritables petits bijoux, surtout lorsque baignées de la rosée matinale. Et c’est alors que leur travail de patience me fait penser à toutes ces magnifiques architectures de cordages sur les vieux gréements et à ces Spidermen de la marine.
Sur les navires traditionnels et les vieux gréements à voiles carrées, les échelles de haubans qui permettaient de monter au mât, ressemblaient étrangement à d’immenses toiles d'araignées. Et les marins qui devaient s’y rendre jouaient aux équilibristes pour y grimper en pleine houle. Ils y déambulaient tels des funambules entre espars, vergues et haubans. Imaginez-vous devoir imiter Tarzan, mais sur des lianes en pleine mer à plus de soixante mètres de hauteur, et surtout par une mer démontée et des vagues qui font tanguer le navire dans tous les sens, dans un roulis amplifié par la hauteur des vergues. Les gabiers étaient ainsi les ancêtres de l’homme-araignée pour monter dans la mâture, et manœuvrer les voiles en marchant sur les enfléchures, cordages horizontaux fixés sur les haubans entre les divers mâts. En plus d’un diplôme de marin, il leur fallait les qualités d’alpinistes expérimentés pour escalader les centaines d’échelons brinquebalants pour y aller prendre un ris dans les huniers, atteindre les voiles à ferler, les bouts à démêler, la lanterne de mât ou encore le panier ou la plateforme du gabier.
Le mot “gréement “ vient d’ailleurs du vieux norrois “greida”, qui signifie “arranger”, “serrer” ou “défaire”.
© Photos – Rêvesdemarins
“Chargé des manœuvres les plus hautes, il perçoit par conséquent une solde plus élevée que les autres matelots. Les voiles les plus hautes sont les plus difficiles à ouvrir ou fermer, surtout par gros temps où les mouvements du navire sont amplifiés par la flèche du mât pouvant atteindre jusqu'à 60m sur les plus gros navires (navires de premier rang).” (Source: Wikipedia)
Les gabiers chargés des manœuvres les plus hautes, commandaient aux matelots même s’ils n’avaient pas le statut d’officier. Ils étaient considérés comme les meilleurs marins du navire et bénéficiaient d’un statut particulier. Ils étaient des experts en noeuds marins et maniement des garcettes de ris servant à ouvrir ou fermer les voiles.
© Photos – Valéry Vasilesvskiy @photonord.ru
Bon, alors, la prochaine fois que je croiserai une de ces petites (ou grosses) bestioles, j’y réfléchirai deux fois en pensant à toutes ces jolies échelles de mâts qu’elle pourrait tisser. Et qui sait, pourrais-je tolérer la cohabitation de sa toile devant ma fenêtre (euh... à l’extérieur… ).
Un excellent dimanche à tous.
Nous avons tous un jour découvert un endroit insolite qui nous a marqués ou charmés. Que ce soit dans un port, une destination en vacances, une ruelle inconnue ou encore chez des parents ou amis. J’ai eu la chance de découvrir un de ces petits coins hors du commun dans mon bureau à Copenhague. Ce dernier se trouve à 200m des quais du canal et tout proche du vieux port de Nyhavn. Tout pour me plaire.
Localisé dans une de ces belles bâtisses classiques du centre, il comprend plusieurs pièces immaculées aux hauts plafonds moulurés et portes secrètes, dont un “bureau ovale” sur l’angle du bâtiment (parfois, je me demande si je ne vais pas voir y apparaître le président des Etats-Unis ;-). Cependant, une des salles de réunion de ce bureau est régulièrement boudée par mes collègues car vieillotte, petite, peu confortable et au mobilier disparate, bien loin du minimalisme danois et de la prestance de sa sœur ovale. Mais, moi, elle me plaît bien, cette petite salle… Mes collègues l’ont baptisée “Le Musée”. Et en effet, elle porte bien son nom. On y trouve un bric à brac incroyable : six chaises de bois différentes, une longue table ovale, d'antiques carafes à eau, des anciens almanachs, quelques piles de vieux livres et surtout… quelques jolies références à la mer et aux marins. Voyez plutôt en images ci-après.
Je n’ai pas encore percé le mystère de l’origine de cette salle mais je compte bien investiguer auprès du personnel local. Qui sait, découvrirai-je que je travaille pour un ancien capitaine de frégate royale (ou plus probablement de navire de guerre viking) ? En tout cas, le cadre est plaisant. Même au travail, la mer et les bateaux semblent se fondre invariablement dans mon environnement. Alors, ne vous demandez plus quelle salle de réunion je choisirai pour mes prochaines discussions…
Et vous, quel est l’endroit insolite qui vous a plu ?
Un excellent dimanche à tous. Et bon vent si vous avez la chance de naviguer en ce beau WE ensoleillé.
Et pourquoi pas un petit billet météo ce dimanche ?
Une pause scélérate
L' oeil du cyclone : le terme est porteur et fait tout son effet. On en parle souvent mais on peut rarement l'observer… Mis à part dans les photographies prises au départ d'avions de haute altitude ou de l'espace ou encore dans les films catastrophes du style "Twister" où l'imagination (pas si débordante que cela face à la réalité) des producteurs nous emplit les yeux d’effets impressionnants.
"L'oeil d'un cyclone tropical est une zone de vents calmes et de temps clément siégeant en général au centre de la circulation cyclonique. Il est délimité par le mur de l'œil, un mur d'orages où les conditions météorologiques sont les plus extrêmes. Il est plus ou moins circulaire et son diamètre caractéristique est de l'ordre de 30 à 60 kilomètres, bien que ce diamètre varie grandement selon l'intensité du système. La pression y est la plus basse du système mais la température en altitude est plus élevée que l'environnement, contrairement à une dépression classique qui a un cœur froid. Il arrive parfois à l'œil de ne pas être au centre et de tourner ou de se déplacer dans diverses directions autour du centre du cyclone. Les vagues convergent cependant en dessous de l’œil, rendant la mer très dangereuse." (Source : wikipedia)
Source : Accuweather.com/NOAA/CIRA - Hurricane Sam's eye spinning on 30 Sep 2021
En gros, l’oeil du cyclone, c’est cette zone un peu moins violente au sein même d’un ouragan, où la tempête semble prendre une courte pause et où les vents ont temporairement cessé de hurler. On peut même parfois y aperçevoir un coin de ciel bleu. Les vents y sont descendants ("subsidents") et la température généralement plus élevée dans les types de cyclones tropicaux. Il s'agit d'un endroit où le temps semble plus clément et les vents relativement légers.
Mais l'oeil d'un cyclone représente également un endroit particulièrement dangereux en mer. En effet, les vagues qui pénètrent dans l’œil, depuis son mur, se dirigent l’une vers l’autre et peuvent ainsi former des crêtes gigantesques en se rencontrant et s’ajoutant à l’onde de tempête, remontant la houle causée par la pression du système. Elles en deviennent "scélérates". Près du mur de l’œil de l’ouragan Ivan, on a d'ailleurs enregistré des vagues d'amplitude de 40 mètres entre leur creux et leur crête.
Saildrone
Les scientifiques de la NOAA ont relevé un défi de taille ce 30 septembre 2021. La National Oceanic and Atmospheric Administration est une agence scientifique et réglementaire américaine au sein du département du Commerce des États-Unis qui prévoit la météo, surveille les conditions océaniques et atmosphériques, cartographie les mers, mène des explorations en haute mer, et gère la pêche et la protection des mammifères marins et des espèces menacées aux États-Unis.
Cette institution est parvenue à envoyer un drone maritime - un "Saildrone" - dans l'oeil d'un de ces cyclones destructeurs et à y filmer et capter des données scientifiques d'exception. Ce drone est capable d'aller là où aucun navire de recherche ne s'est jamais aventuré, naviguant droit dans l'œil de l'ouragan. Ce véhicule est conçu pour être capable de fonctionner dans les conditions météorologiques les plus extrêmes sur terre. En voici quelques images (sujets au mal de mer, s'abstenir... ).
Le Saildrone Explorer SD 1045 a été dirigé au milieu de l'ouragan Sam, un ouragan de catégorie 4, qui est actuellement sur une trajectoire au côté est des Etats-Unis. SD 1045 combat des vagues de presque 13 mètres et des vents de plus de 250 km/h... pour collecter des données scientifiques critiques et, dans le processus, nous donne une toute nouvelle vision de l'une des forces les plus destructrices de la Terre.
Équipé d'une « aile ouragan » spécialement conçue lui permettant de fonctionner dans des conditions de vents extrêmes, le SD 1045 brave l'ouragan Sam en haute mer, collectant des observations en temps réel pour les modèles numériques de prévision des ouragans, qui devraient fournir de nouvelles informations sur la façon dont de grands cyclones tropicaux destructeurs se développent et s'intensifient. Le drone fait partie d'une flotte de cinq Saildrones ayant opéré dans l'océan Atlantique pendant la saison des ouragans, recueillant des données 24h/24 pour aider à comprendre les processus physiques de ces forces de la nature. Ces connaissances sont essentielles pour améliorer la prévision des tempêtes et devraient réduire les pertes de vies humaines en permettant une meilleure préparation des communautés côtières.
© Photos : NOAA.org
L'intensification rapide de la force de l'ouragan, lorsque ses vents se renforcent en quelques heures, constitue une menace sérieuse pour les communautés côtières. De nouvelles données provenant de drones à voile et d'autres systèmes sans équipage utilisés par la NOAA aideront à mieux prédire les forces qui conduisent les ouragans et à être en mesure d'avertir les communautés plus tôt. Il s'agit là d'une avancée majeure dans la technologie des recherches météorologiques. (Source : NOAA)
Il y a des ouragans dans la vie qu'on ne peut prévenir ni éviter malgré tous les efforts du monde. Et ils démolissent tout sur leur passage. Et parfois, on a le sentiment de se trouver en plein dans leur oeil. Alors, il ne nous reste qu'à faire le gros dos, prendre une bonne inspiration et rassembler toutes nos forces nécessaires pour franchir leurs murs, affronter la suite de la tempête jusqu'à ce qu'elle s'affaiblisse ou change de trajectoire. Et un jour, on en verra la fin pour retrouver le ciel d’azur.
Un bon dimanche à tous. |
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August 2023
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