Comme tout dernier jour de l’année, je pourrais vous parler des faits marquants de cette cuvée 2021, mais les médias s’en chargent déjà. Je pourrais également vous faire la liste rétrospective de ma vie récente, mais franchement, cela n’intéresse personne mis à part peut-être quelques très rares intimes. Un regard par-dessus notre épaule sur les mois passés nous monterait un ciel sombre et voilé cette année et beaucoup se souviendront de 2021 comme d’un horizon bien lourd. Toutefois, à quoi bon se lamenter sur le passé puisqu’il est irrémédiablement révolu ?
Le ciel, qui sait nos maux et nos douleurs, prend en pitié nos jours vains et sonores. Chaque matin, il baigne de ses pleurs nos aurores. (Les Contemplations, Victor Hugo)
Alors, je préfère rêver à d'autres types de voiles pour le ciel de 2022. Celles dont on s'emplit le regard avec émerveillement. Pour y parvenir, il nous faudra sans aucun doute emprunter un chemin tortueux. Un sentier de montagne, rocailleux et escarpé à souhait, qui s’enfoncera d'abord dans le brouillard glaçé. Mais, au bout, il y aura la satisfaction d’avoir franchi le col qu'on pensait ingravissable. En route, il y aura le refuge où reprendre haleine et se réchauffer. Il y aura aussi les compagnons de cordée qui ne vous laisseront pas seul sur le bord et vous porteront pour un bout du chemin lorsque vous n'en pourrez plus. Arrivés au sommet, il y aura la promesse d’une vue fantastique sur les versants enneigés dans le rosé du soleil couchant. Et puis... Une fois la nuit tombée, il y aura ce ciel incroyable d'aurores boréales et leurs voiles mouvantes, reflets d'une réalité magique. Un nouveau dôme illuminé pour la coupole de nos vies.
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Je veux rêver aux voiles des ciels nordiques, aux soleils rougeoyants et à la musique du vent, aux levers de lune et de Vénus sous le firmament, Je veux espérer ces douces étreintes, ces tendresses et même ces baisers enivrants. Je veux songer à ces moments de grâce, petits ou grands. Je veux continuer à croire en l’avenir et au présent, peu importe leur durée. Et que le plus beau reste à venir. A chaque anniversaire, rémission, ou printemps renouvelés, un présent à chérir.
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Noël sans conte ne serait pas vraiment Noël… Alors, c’est parti pour une légende de circonstance. Il était une fois….
Il était une fois un arbre tout de glace vêtu…
Il était une fois un arbre pas comme les autres… Dans l’immensité hivernale, il se fondait dans le paysage immaculé. Ses branches pendaient jusqu’au sol gelé, comme de vastes larmes coulant le long de ses joues végétales. Le froid piquant semblait l’avoir figé dans son chagrin glacé. Et lorsque que le soleil bas le caressait de ses pâles rayons, il rayonnait de mille feux. Les cristaux renvoyaient la lumière dans toutes directions, comme un kaléidoscope enneigé. Son tronc avait pris l’aspect d’une tour d’argent, transparente de pureté.
Il était magnifique dans ses habits nordiques. Et tous l’admiraient pour sa grandeur miroitée. Et pourtant, l’arbre était silencieux. Pas même le vent ne parvenait à le sortir de son mutisme. Il paraissait dur et implacable. Comme s’il avait décidé de se renfermer sur sa beauté glacée. Prisonnier de son écrin argenté. Cela faisait des années que l’arbre n’avait plus prononcé un seul mot, ni montré un quelconque signe de vie. Pas même lorsque la sève du printemps avait coulé dans ses veines. Pas même lorsque l’été était revenu chauffer ses branches, ni lors du festival des couleurs automnales. L’arbre était resté de glace, immuable dans sa froideur distante. Alors, même ceux qui l’aimaient avaient fini par croire que le froid avait définitivement eu raison de sa chaleur. On ne parlait plus de lui. On avait fait son deuil de cette statue étrange au regard d’émeraude définitivement clos.
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Son costume de glace n’était en réalité qu’une armure qui l’empêchait de se consumer et de blesser ceux qui s’approchaient de trop près de son cœur enflammé. Un brasier brûlait dans ses veines. Son silence transi le protégeait de ces conversations qui trahiraient son secret. Un heaume impénétrable comme seul rempart contre les caresses de mains vulnérables. Un masque de dureté comme seul bouclier pour contrer la tendresse des doigts sensibles. Son cœur incandescent dévorait les imprudents qui tentaient de l’étreindre de trop près. Et il avait ainsi, jadis, bien malgré lui, irrémédiablement enflammé un elfe des bois qu'il avait tendremment enlacé de ses grandes branches. Il s’était alors juré de ne plus jamais laisser le brasier de son torse embraser ceux qui se risqueraient à s’approcher de lui. Laissant croire que son cœur s’était éteint et pétrifié à jamais dans une immuable chape de glace.
Cependant, chaque année, le soir de Noël, alors que la neige tombe en gros flocons, au plus sombre de la nuit de décembre, un ange aux ailes dorées rend visite à l’arbre de glace. Du bout de ses ailes éthérées, il effleure l’armure brillante du triste géant boisé, jusqu’à l’enserrer de ses immenses voiles. Alors, apparaît une infime lueur au plus profond de son tronc. Comme un petit feu qui prend naissance à l’intérieur de son écrin de givre. Une petite flammèche monte ainsi de son antre. Elle danse de ses entrailles, le long de son écorce blanchie par la bise, lentement, imperceptiblement. Dans la noirceur environnante, les elfes et les farfadets peuvent alors être témoins de ce miracle de Noël. Et à ces moments, l’arbre peut montrer sa vraie nature de feu. Le dragon de glace laisse enfin libre cours à sa nature torride. Son cœur de feu peut battre sans crainte. Et l’arbre respire à nouveau, reprenant vie pour quelques instants de grâce. Et sa cuirasse de glace fond ainsi chaque année pour quelques heures durant la nuit de Noël, pour se reformer avant le lever du soleil. Une trêve avec lui-même, une trêve avec le monde…
Depuis, dans ma famille et cela depuis des générations, nous plaçons un verre d’eau et un morceau de pain dehors le soir de Noël, à l’attention de l’ange. Pour qu’il les bénisse et reprenne des forces pour enlacer tous les arbres figés dans la froidure et leur rende vie pour quelques heures.
Pour que Noël ravive le feu de tous les arbres de glace de ce monde et ramène un peu de chaleur dans nos cœurs. Un joyeux Noël à tous.
Je vois souvent la vie en bleu… Cependant, la période de fin d’année a plutôt tendance à la peinturlurer en vermeil. Les dernières teintes de l’automne, les levers de soleil flavescents, la lune rousse, les champignons des bois, la mitre de Nicolas, la tunique de Santa, jusqu’au nez de Rudolph. D’ailleurs, connaissez-vous les rennes du Père Noël?
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Le nez de Rudolph
Ils se nomment Dasher, Dancer, Prancer, Vixen, Comet, Cupid, Donner, Blitzen et Rudolph. Au départ, ils ne sont sur huit et tirent le traîneau du grand Santa au départ de sa demeure, tout là-haut en Laponie. Mais une année, le temps est tellement exécrable qu’on n’y voit pas à deux pas. Et les rennes sont bloqués par le brouillard épais et la neige qui tombe en tourbillons. C’est alors que Rudolph apparaît. Il est le plus jeune de la bande et ses congénères à quatre pattes se moquent de lui à cause de son nez écarlate.
Pour expliquer sa particularité physique empourprée, les commérages vont bon train. Les ascètes affirmeront qu'il boit trop... Les frileux penseront qu'il doit son appendice nasal rubescent au fait qu'il vive dans des contrées aux températures terriblement basses (jusqu’a moins 50°c). Les médecins clameront haut et fort qu'il est toujours enrhumé ou pire, qu'il porte en lui le méchant virus du "c...." (dont on n'ose même plus prononcer le nom ces derniers temps). Les scientifiques jugeront qu'il s'agit d'une vascularité étendue jusqu'au bout du renifloir. Les sportifs imagineront qu'il est dû à une respiration accélérée par les narines pour se préserver du froid. Les électriciens assureront qu'il a probablement avalé une pile électrique lorsqu'il était petit. Les maraîchers sussureront qu'il a mangé trop de baies de sureau par gloutonnerie. Les peintres conteront qu'il a trempé son museau dans un pot de couleur indélébile, par curiosité et gourmandise. Et les plus incrédules crieront haut et fort que son pif n'est pas pivoine, mais que vous avez tout simplement rêvé (et que d'ailleurs, tout le monde sait que les rennes, cela ne vole pas). Bref, personne ne connaît réellement la raison de cette couleur bizarre au bout de son museau. Toutefois, Rudolph possède un pouvoir hors du commun : sa truffe cerise est tellement brillante qu’elle permet de distinguer la route à prendre dans les airs à travers le blizzard. C’est ainsi que Santa l’adopte et qu’il rejoint la horde de rennes. Et depuis lors, c’est le petit renne au nez groseille qui prend la direction de l’équipage, lourdement chargé de présents à distribuer le soir de Noël à tous les enfants, petits et grands, de ce monde.
Encore six fois dormir avant que Rudolph ne passe dans les chaumières avec le grand Santa. Alors, si vous avez été sage, peut-être entendrez-vous les grelots de son traîneau passer au-dessus de votre cheminée.
Mais, moi, je le connais le secret de son joli nez cramoisi... Ce qu’il apportera, à tous comme présents, qu'ils soient riches ou pauvres, jeunes ou moins jeunes, sera surtout beaucoup d’amour... Amour tout aussi écarlate que son nez. Un excellent dimanche à tous.
Back to my favourite place, il y a quelque temps. Nieuport, mer du Nord. Les dunes entre Nieuport, Lombardsijde, Oostdunkerke et Coksyde. L’estacade. Le port de plaisance. Les mouettes, les phoques et les cormorans. Le froid qui s’insinue et la bise qui pique. Les vagues incessantes. Le phare rouge et blanc et sa lueur rassurante. Le vent et sa musique dans les haubans. Le soleil couchant sous les nuages de décembre.
La mer en hiver, superbe et majestueuse. La mer et ses rouleaux, puissants et incessants, comme ceux de la vie. Ceux qui retournent, renversent, fatiguent. Ceux contre lesquels on nage et se bat inutilement. Ceux qui empêchent de dormir et réveillent dans la douleur et l’épuisement. Ceux qu’il vaut mieux suivre et étreindre plutôt que de tenter de repousser. Des rouleaux sans surcis, qui dansent et submergent. Ceux qui semblent parfois les plus forts. Ces rouleaux qui malmènent l’immunité, alliés des petits monstres houleux et autres hydres, ogresses d’énergie. Ces rouleaux dont on ne voit pas la fin dans leur ronde récurrente. Ceux qui cassent, pèsent et exténuent le corps et l’âme. Ces vagues scélérates qu’on voit venir sans pouvoir les éviter ni changer de cap. Ces tourbillons qui chavirent nos navires sans qu’on puisse les éviter. Alors, on remonte le zip de son ciré, on baisse la tête et on attend patiemment que la tempête passe. On s’enferme dans le carré. On met le voilier à la cape et on s’accroche à tout ce qu’on peut. Et avec beaucoup de patience, de courage, de repos et de philosophie, les vagues rondes finiront bien par s’éloigner. Elles laisseront parfois les voiles en lambeaux et le marin au bout du rouleau. Quelques fois, la tourmente emportera même le mât ou le gouvernail. Mais, si la coque tient le coup, le marin reprendra des forces et trouvera un moyen de franchir la houle pour rentrer à bon port. "Le Temps est la laisse sans mer, sans sable, sans rive, sans rouleau, sans écume. Echouage d'un espace autre que l'espace en amont de l'espace. Site perdu du perdu. Vide." (Sordidissimes, Pascal Quignard)
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Un excellent dimanche à tous, sans trop de rouleaux.
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AuteurArchives
August 2023
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