La semaine passée, pour mon anniversaire, j’ai reçu de ma famille un splendide ouvrage d’un grand voyageur, particulièrement doué pour dépeindre la mer et les navires. Un artiste bourlingueur qui me ravit à chaque toile depuis mon adolescence.
Alors, pourquoi ne pas partager ses œuvres avec vous ce dimanche ? Certains le nommaient le peintre de la lumière. D'autres le considéraient comme un illuminé... Moi, je l'admire tout simplement comme un artiste au génie lumineux et à la vision éclairée pour son époque ! Et mon peintre préféré.
Il était une fois à Londres...
Tout a commencé il y a trente-deux ans... Londres, début septembre. J'ai dix-sept ans et la capitale britannique m'appartient pour un WE. Pour une fois, il ne pleut pas (trop)... Je marche le long de la Tamise direction Millbank. De Westminster au Vauxhall Bridge, il fait bon se promener. Les balades le long des quais ont toujours quelque chose de magique et d'envoûteur. Mes pas me mènent jusqu'à une large bâtisse couleur pierre de sable à l'entrée de colonnes : la Tate Gallery, aujourd'hui renommée Tate Britain.
Une section du musée, la Clore Gallery, est entièrement consacrée à un artiste que je ne connais pas encore. Ce doit être un grand Monsieur pour qu'on lui offre tel privilège, pensai-je en moi-même. Je décide donc d'aller à sa découverte. Mais comme je ne fais pas toujours les choses dans l'ordre indiqué (un esprit un peu rebelle malgré les apparences bien élevées, surtout dans un musée), je me rends droit aux dernières salles. Celles par lesquelles on est censé terminer (rassurez-vous, je ne fais jamais ceci avec un livre pour en connaître la fin. J'aime trop le suspense... ). Coup de tonnerre dans mon ciel bleu... Je reste littéralement subjuguée par les oeuvres qui pendent au mur devant moi... J'ai le coup de foudre pour ces mers de lumière, ces flous éclatants de couleurs et ces tourbillons de teintes subtilement mélangées. La lumière semble irradier de l'intérieur. A première vue, un tohu-bohu de coloris en désordre, informes et chaotiques. Cependant, en fixant les tableaux plus attentivement, de la lumière apparaissent des ombres, puis des formes, et ensuite des personnages incroyablement finement dessinés. Et plus je recule, plus le tableau me parle et me délivre ses secrets. De près, on ne voit qu'un amas de couleurs qui s'entremêlent. A une certaine distance, le flou devient alors magiquement précis et livre ses précieuses confidences. On croirait des oeuvres du XXe siècle ! Et pourtant, non, je ne me trompe pas, l'artiste dont je découvre ici le fabuleux travail est bien né en... 1775 !
Joseph Mallord WilliamTurner
"My son, sir, is going to be a painter. " (William Turner, père)
Le jeune Turner débute ainsi sa carrière par des esquisses architecturales et topographiques. Abbayes et châteaux, qui sont légion en Grande Bretagne, constituent d'excellents modèles pour ses premiers travaux. Il y visitera le Pays de Galles, l 'Ecosse et le Sud de l'Angleterre. Il fait partie de ces paysagistes romantiques, tels que son contemporain (et concurrent) John Constable. Dessin, peinture, gravure, il excelle dans de nombreuses disciplines.
Ensuite, il se lance dans l'art de l'aquarelle, dont il deviendra un des plus grands maîtres de son siècle. Il y développe une technique originale : au lieu de mélanger les couleurs sur sa palette, il les utilise pures en commençant par les plus claires pour terminer par les plus foncées. Placées au premier plan, les plus sombres renforcent la perspective. Il joue également sur le mouvement et la lumière. William est fasciné par les phénomènes atmosphériques (lever/coucher de soleil, tempêtes, violence des vagues, brouillard, pluie, neige... ) et les incendies (ex. L'incendie du Parlement à Londres), qu'il cherche sans cesse à recréer sur la toile. Il rendra ainsi toute sa splendeur à l'art du paysagisme.
© Peintures - J. M. W. Turner
Les Carnets du Bourlingueur
Cependant, le Royaume-Uni ne lui suffit plus. William ne rêve que de grands voyages et de découvertes d'autres lumières que celles du soleil britannique sur les prairies vertes du Kent et du Sud de l'Angleterre. Alors, il empoigne son baluchon, ses carnets, crayons, aquarelles et chevalet. Et il s'en va ainsi vagabonder en Europe. Il y passera entre autres par Paris, les Pays-Bas, Lyon, Calais, Le Havre, Le Tréport, Boulogne, Dieppe, Mayence, les Alpes, la Suisse, Turin, Milan, Côme, Vérone, Naples, Florence, Rome, Venise, la vallée du Rhin, l'Allemagne romantique, le Danemark et ... notre petit pays belge (de Dinant sans oublier la vallée de la Meuse, jusqu' au Mont Rigi dans mes fagnes adorées... ).
De chacun de ses voyage naîtront des chefs-d'oeuvre aussi divers par la lumière que les formes. Au fur et à mesure de sa quête géographique, Turner avance dans sa quête artistique. Son art se parfait, se peaufine, se précise. Il parvient à maîtriser la couleur et la lumière, avec un savoir-faire que seuls les impressionnistes du siècle suivant parviendront à reproduire quelque peu. William Turner est en avance sur son temps. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il sera ensuite catégorisé de "pré-impressionniste".
© Peintures - J. M. W. Turner
Dans ses Veines coule la Mer
Turner demeure indéniablement un maître des marines. Sous ses doigts, navires, vagues et écume ne forment plus qu'un seul avec la toile et la mer dans un halo de lumière diffuse, même en pleine tempête. Il sait capter la moindre parcelle de couleur dans une effluve salée. Les plus tragiques naufrages ou plus impétueuses tempêtes se transforment sous son art en émouvantes scènes d'aquarelles. On dira de son art pictural marin qu'il est presque "violent" par la force, l'émotion et la passion qu'il émane de ses toiles. Moi, il me laisse sans voix par sa beauté...
"Et Toiles de Mer..."
© Peintures - J. M. W. Turner
William turner nous a laissé plus de 2.000 peintures et 19.000 esquisses en héritage, toutes plus fabuleuses les uns que les autres. Alors, si vous avez un jour l'occasion d'aller admirer ses oeuvres, que ce soit à Londres à la Tate Britain ou à la National Gallery, ou dans quelqu'autre exposition temporaire (il y en a actuellement une à Rome), n'hésitez pas un seul instant !
Je vous souhaite un dimanche lumineux...
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“Prendre la Clé des Champs”.
L’expression viendrait, selon certains, de la référence aux “claies” des champs, une barrière ou clôture dans les champs treillés, ou encore de la référence aux grands espaces libres. Allez savoir...
N’avez-vous, comme moi, jamais eu envie de prendre cette fameuse “ clé des champs” ? Humer un parfum de liberté, répondre à l’appel de l’indépendance, loin du contrôle des autres. Partir loin des obligations sociales. S'échapper et s'affranchir des contraintes qui vous pèsent. S'enfuir des situations oppressantes. Respirer une essence de grand large...
Et la voile, c’est un peu cela aussi... c’est prendre son envol pour un moment d’évasion. Evasion des autres. Evasion du monde. Evasion de la partie de soi qui empêche d'être réellement soi-même un peu aussi... Ces moments-là sont précieux. Souvent en été, lorsque je rentre du travail au coucher du soleil et que je passe par les champs bordant la région où j'habite, la nature me fait la surprise de paysages féériques. S'opère alors la magie des coloris, lumières et teintes dont elle peint alors la campagne environnante. Et lorsque le vent se mèle à son oeuvre, j'ai parfois l'impression de me retrouver en pleine mer, bercée de marées ambrées, flavescentes ou émeraude déferlant sur les champs. L'ondulation des blés dans la brise se transforme en vagues et je crois presque entendre le vent dans les voiles. Quelque fois, en lieu et place de faune marine, c'est la tête d'un autre type d'hippocampe qui fait son apparition dans le crépuscule rosé entre les sillons verdoyants. Et je crois alors, pour un instant, distinguer des mâts de navires en place de pylônes. Et les soirs d'orage, le ciel de plomb sous le soleil en feu semble vouloir s'effondrer dans cet océan champestre où les herbages argileux se transforment en rivières de lave pour quelques instants fugaces, juste avant que l'astre ne disparaisse sous un horizon de sombres larmes à venir. Je vous laisse ainsi apprécier quelques images de mes fugues marines à travers champs.
© Photos - Rêvesdemarins
© Photos - Rêvesdemarins
Alors, la prochaine fois que vous passerez à travers des champs, regardez l'onde verdoyante. Imaginez vous en mer. Fermez les yeux et ecoutez le vent. Et il vous emmènera naviguer au bout du monde pour un instant. Bon dimanche champêtre à tous !
L'auteur : Pierre-Yves Touzot
Le récit
Oldforest, parc national de l’Ouest canadien réputé pour sa forêt originelle. Imaginez-vous un instant dans de vastes plaines en bordure de montagnes et canyons, ainsi que d'une dense forêt d'arbres centenaires, emplies de cerfs, bisons aux imposantes silhouettes dans la brume. Et surtout hantées au crépuscule par les hurlements d'innombrabres loups et autres bêtes sauvages... Une rivière en zigzag parsemée de fumerolles dantesques. Et des flocons glacés partout...
Anton y était il y dix ans déjà. Il faisait un froid glacial. La neige, le blizzard, le brouillard dans cette région hostile en pleine nature. Une route dans la forêt, la voiture file. Un loup blanc sorti de nulle part. La route qui lui échappe et c'est l'accident fatal. Il lui semble que Déborah reste là, sans vie à ses côtés. Lorsqu'il revient à lui, elle a disparu. Ou il ne se souvient plus vraiment... A-t-il rêvé ? Elle lui manque cruellement... Dix ans plus tard, il est de retour dans ce village perdu au fin fond d'une nature encore intacte. Il ne sait plus où il en est ce soir. Il est revenu sur les lieux pour... Un reportage sur le parc ? ... Enfin, il ne sait plus vraiment pourquoi. Pour parvenir à faire son deuil, probablement. Au fond de lui, il ne parvient pas à accepter la disparition de celle qu'il aime encore après toutes ces années. Il rentre dans le seul restaurant ouvert dans la petite localité. Il s'y prépare une fête privée. Par mégarde, il ouvre une porte. Et c'est là qu'elle apparaît... C'est elle ! Déborah ! "Vous n'avez rien à faire ici. C'est privé. Non, désolé, vous devez vous tromper de personne, elle se prénomme Claire...". La porte se referme sur son espoir. Non, c'est impossible. Il hallucine, il divague. La ressemblance est frappante. Il faut à tout prix qu'il sache !
Alors, Anton décide d'investiguer un peu plus longtemps et se met à la recherche d'un logement. Mais, comme par enchantement, plus aucun hotel ne dispose d'une chambre disponible pour lui. On tente clairement de le dissuader de découvrir la vérité. On l'enjoint poliment, mais fermement à quitter la ville au plus vite. Mais c'est mal juger Anton...
Il finit par trouver refuge pour une nuit chez Alaska, une photographe vivant sur place. Chez elle, le mystère se renforce : elle lui explique que, là-haut, au fond des bois, à des jours de marche du village, se trouve un ancien hôtel où se passent de choses étranges. Tous les habitants semblent garder un secret sans précédent. Elle aussi cherche des réponses... Mais le danger est partout. Ils décident alors de partir ensemble au coeur de cette forêt mystérieuse et d'en décrypter les secrets pour enfin trouver une réponse à leurs questions respectives. Cependant, la nature environnante est sans pitié : la survie en plein hiver dans ces contrées demande des aptitudes physiques et mentales sans précédent. Anton sait. Il est formé pour ce genre d'expédition. Il compte à son expérience une longue pratique de survie dans des environnements hostiles. Mais Alaska tiendra-elle par moins vingt-cinq, dans la neige et la météo glaciale, avec des heures et des heures de marche devant elle avant d'atteindre leur but...
Alors, si vous avez jamais visité et aimé Yellowstone, ce roman vous transportera dans les fascinants tréfonds d'un endroit unique. Si vous n'avez pas encore vu Yellowstone, qu'attendez-vous encore pour vous procurer ce roman et réserver votre billet d'avion !!!
Je vous souhaite un excellent dimanche de balade en nature, ou en ... lecture.
Pêche Sauvage
Si les pêcheurs, en haute mer, surtout, méritent sans aucun doute un grand respect - un métier dur qui requiert du courage et de la résistance, je suis triste d'apprendre que c'est encore trop souvent la pêche, l'appât du gain et le comportement d'une partie de la profession qui participe à la pollution des mers et à la destruction de leur faune. Des filets abandonnés ou perdus, des flotteurs en plastique à la dérive, des hameçons ou des nasses enfoncés ou entortillés autour du corps d'innocentes créatures marines. Des animaux qui n'ont rien demandé. Qui ne se sont pas méfiés de ces drôles de jouets colorés aux allures inofensives ou appétissantes dans l'eau et qui se prouvent d'implacables prédateurs.
La surpêche et un commerce piscicole de masse exigeant toujours plus, toujours plus vite, toujours plus loin. Pas le temps ni l'attention pour récupérer les filets indésirables. Un désintérêt ou une inconscience des équipages pour la survie des espèces. Notre monde souffre d'un besoin criant de revenir vers des pratiques de pêche durables et respectueuses de l"équilibre de l'écosystème.
Je vous épargne les photos plus dérangeantes encore ou tout simplement insoutenables. Celles-ci suffisent déjà amplement à se rendre compte de la criticalité de ce problème poignant.
© Photos - www.unoceandeplastique.fr (la propriété des photos demeure celle de leur auteur originel).
L'Homme dit à la mer : "T'es la Poubelle, tu sais..."
L'ingestion de plastique touche plus de 600 espèces marines. Que ce soit des plus grands aux plus petits morceaux. Les grands cétacés qui filtrent l'eau avalent de larges quantités de microplastiques que leur organisme est incapable de digérer, causant ainsi de graves problèmes respiratoires ou digestifs à ses victimes. Sans parler du continent plastique. Je ne reviendrai pas sur cette problématique déjà abordée dans plusieurs autres billets de ce blog. Mais, le temps passe, et le souci s'intensifie partout autour du globe.
La bonne nouvelle, c'est que depuis quelques années, de nombreux projets ont visé à inventariser l'ampleur du phénomène et à trouver des moyens de dépolluer un peu les océans, ou tout simplement à sensibiliser les populations (par ex. le projet "Tara Méditerrannée", l'appel de François Gabart lors de son tour du monde record le mois passé et le tout récent projet "Manta" d'Yvan Bourgnon pour ramasser les déchets de grosse taille flottant dans les océans (à découvrir via ce lien). Les choses bougent tout de même, mais tellement lentement par rapport à l'amplitude de la calamité. A nous de poursuivre la quête vers un monde plus propre.
Economie circulaire dans un carré
Ou comment faire de l'économie circulaire dans un carré, tout en faisant un rond dans l'eau...
A bord d'un voilier, on récupère, on recycle, on transforme, on invente avec les moyens du bord et surtout, on gaspille le moins possible. Tout d'abord, par manque d'espace. Dans les voiliers de course, chaque gramme a son importance, alors, on élimine tout ce qui n'est pas strictement nécessaire, quitte à boire dans la même bouteille ou ne prendre qu'une demi brosse à dents... pour 10 membres d'équipage ;-). Alors, comment faire pour stocker diverses poubelles (résidus, plastique, métaux, carton... ) dans un espace restreint ? C'est en effet souvent un défi. Et pourtant, un bateau renferme pas mal de petits recoins qui permettent de stocker ce qu'on ne peut pas réutiliser ou transformer immédiatement à bord. On fait appel à la créativité de l'équipage pour y parvenir.
Ensuite, parce que la voile est l'art de la débrouille et du bricolage par excellence. Alors, éclatez-vous, les marins ! Le recyclage est le meilleur moyen de titiller et d'assouvir votre besoin d'inventivité. Enfin, parce que les voileux sont (censés du moins) être conscients, respectueux et sensibles à la protection de l'environnement. Malheureusement, il y a encore du travail de fond à faire pour l'éducation des navigateurs du dimanche. La gestion des déchets serait probablement un sujet qui vaudrait d'être inséré dans le programme des cours de voile et de navigation (tout comme dans les manuels de camping d'ailleurs).
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August 2023
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