Dernier jour de l’an. En guise de rétrospective, pourquoi ne pas vous lire le passé et l’avenir... dans les feuilles ?
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Lignes courbes, rides rondes, et points cardinaux de papier
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Pour cette année nouvelle, je vous souhaite de jolies feuilles de vie, de toutes les teintes et les formes. Qu'elles y dessinent de simples bonheurs, beaucoup de tendresse et une bonne santé, à travers toutes les saisons.
Meilleurs voeux à tous pour 2023 !
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Pour ce week-end de Pâques, un petit billet de circonstance. Partons à la découverte des traditions de Pâques dans mon pays de cœur, le Danemark. Une de ces traditions locales comporte un charme tout particulier, celle du « Gækkebrev « , ou de la « la lettre qui rend fou ».
Je vous rassure, il ne s'agit nullement d'une lettre à l'anthrax ou au produit des frères de Kih-Oskh (Tintin et les Cigares du Pharaon ou le Lotus Bleu). Il s'agit d'une lettre bien plus innofensive et surtout plus mystérieuse !
Missive d’un auteur inconnu
La « gækkebrev » est une vieille tradition danoise datant du début du XVIIIe siècle, encore perpétuée par quelques rares enfants aujourd'hui dans ce pays du Nord. Elle pourrait découler du folklore séculaire danois, qui stipule que lorsque les « vintergække » (perce-neiges) émergent du tapis immaculé hivernal, il est alors temps d'envoyer un message à quelqu'un qu’on aime. Le mot "gæk" fait référence à la notion de "rendre fou, taquiner, plaisanter". Comme le perce-neige taquine l'été en fleurissant en hiver. Les danois sont friands de mots d'esprit, d'humour et de divertissement.
Le principe en est simple. Un inconnu envoie une lettre à un être qui compte pour lui. La missive est faite de papier fin, fabriquée à partir d'un morceau de papier carré, plié 4 fois, habilement décoré de formes découpées dans le papier (cœurs, carrés, rayures, hexagones et triangles, etc.). Lorsqu’on déplie la lettre, apparaissent alors de jolis motifs élaborés. Certaines de ces lettres ont l'aspect d'un véritable chef d'oeuvre de dentelière. La lettre est parfois accompagnée d'une fleur, un perce-neige ou une autre des premières fleurs de l'année. Sur la lettre est écrit un poème dont le texte doit rimer. La lettre doit demeurer non signée. Seul indice pour le destinataire : un point pour chaque lettre du nom ou du prénom de l'expéditeur. Si le destinataire parvient à deviner l'identité de l'expéditeur, l'expéditeur doit alors lui offrir un œuf en chocolat. Le délai pour deviner l’identité de l’expéditeur et l’appeler est généralement d’une semaine environ. Faute de quoi, l’expéditeur de la gækkebrev prendra les devants pour révéler son identité. Dans ce dernier cas, ce sera alors au destinataire de devoir un œuf au chocolat à l’auteur de la lettre. Certaines de ces lettres se révèlent de véritables petites merveilles. Délicates, sensibles et inspirantes. Avec ce piment de mystère pour rendre l’expérience encore plus enivrante. Une recette de Pâques gagnante à tous les coups. "En Giæk lader hun sig kalde, det monne mit Hjerte befale, min Giæk skal hun være fra Vintren til Somren med Ære."
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Dans les campagnes danoises des années 1800, cette tradition n'était pas réservée aux enfants à Pâques ; c'était en fait une manière de faire sa demande en mariage... Les lettres n'étaient pas toujours décorées mais contenaient à la place un long poème et un perce-neige. De ce cas, la missive était rarement véritablement anonyme :-).
Puis, à la révolution industrielle, lorsque la population rurale s'est déplacée vers les villes, ces types de lettres ont été commercialisées. Et au lieu d'un œuf de Pâques, le prix à obtenir en en devinant l'auteur s'est transformé en une invitation à prendre un café ou à aller à un bal.
Lettre de Liaison
Dans un registre similaire, il existait également la tradition de la « lettre de liaison ». Un autre exemple de lettre en rimes, comportant une énigme à résoudre. Celle-ci était le précurseur de la "gækkebrev". Cette tradition originaire d'Allemagne au départ, avait été reprise au Danemark entre 1600 et 1800.
La lettre de liaison se lisait comme un poème, contenant généralement une énigme, qui était envoyée aux personnes le jour de leur fête nominale ou l'un des jours des quatres temps (Sainte-Croix, Sainte-Lucie, Mercredi des Cendres, Pentecôte), jours de jeûne entamant chaque saison dans la tradition chrétienne. Les deux personnes étaient alors déclarées "liées entre elles" jusqu'à ce qu'elles aient résolu l'énigme, soit en personne, soit en s'invitant à une fête. Typiquement adressées à des adultes, les énigmes de ces dernières lettres étaient plus sophistiquées que celles des "gækkebrev". Dans les recueils de poèmes des XVIIe et XVIIIe siècles, on trouve de nombreuses lettres de ce style aujourd''hui encore visibles au musée de la poste danoise. Au lieu d'une énigme, certaines requéraient de leur destinataire de défaire une série de nœuds sur une ficelle de soie ornant la lettre. Des noeuds marins, bien entendu... Jolies traditions, non ? "Jeg binder dig hverken med baand eller bast
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Alors, si vous recevez une lettre anonyme énigmatique, bordée de noeuds marins, ce dimanche, dites-vous que quelqu'un vous veut du bien. A moins que son expéditeur n'aie simplement envie d'un bon festin en votre compagnie !
Bonne fête de Pâques ! Un excellent dimanche à tous.
Comme tout dernier jour de l’année, je pourrais vous parler des faits marquants de cette cuvée 2021, mais les médias s’en chargent déjà. Je pourrais également vous faire la liste rétrospective de ma vie récente, mais franchement, cela n’intéresse personne mis à part peut-être quelques très rares intimes. Un regard par-dessus notre épaule sur les mois passés nous monterait un ciel sombre et voilé cette année et beaucoup se souviendront de 2021 comme d’un horizon bien lourd. Toutefois, à quoi bon se lamenter sur le passé puisqu’il est irrémédiablement révolu ?
Le ciel, qui sait nos maux et nos douleurs, prend en pitié nos jours vains et sonores. Chaque matin, il baigne de ses pleurs nos aurores. (Les Contemplations, Victor Hugo)
Alors, je préfère rêver à d'autres types de voiles pour le ciel de 2022. Celles dont on s'emplit le regard avec émerveillement. Pour y parvenir, il nous faudra sans aucun doute emprunter un chemin tortueux. Un sentier de montagne, rocailleux et escarpé à souhait, qui s’enfoncera d'abord dans le brouillard glaçé. Mais, au bout, il y aura la satisfaction d’avoir franchi le col qu'on pensait ingravissable. En route, il y aura le refuge où reprendre haleine et se réchauffer. Il y aura aussi les compagnons de cordée qui ne vous laisseront pas seul sur le bord et vous porteront pour un bout du chemin lorsque vous n'en pourrez plus. Arrivés au sommet, il y aura la promesse d’une vue fantastique sur les versants enneigés dans le rosé du soleil couchant. Et puis... Une fois la nuit tombée, il y aura ce ciel incroyable d'aurores boréales et leurs voiles mouvantes, reflets d'une réalité magique. Un nouveau dôme illuminé pour la coupole de nos vies.
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Je veux rêver aux voiles des ciels nordiques, aux soleils rougeoyants et à la musique du vent, aux levers de lune et de Vénus sous le firmament, Je veux espérer ces douces étreintes, ces tendresses et même ces baisers enivrants. Je veux songer à ces moments de grâce, petits ou grands. Je veux continuer à croire en l’avenir et au présent, peu importe leur durée. Et que le plus beau reste à venir. A chaque anniversaire, rémission, ou printemps renouvelés, un présent à chérir.
Noël sans conte ne serait pas vraiment Noël… Alors, c’est parti pour une légende de circonstance. Il était une fois….
Il était une fois un arbre tout de glace vêtu…
Il était une fois un arbre pas comme les autres… Dans l’immensité hivernale, il se fondait dans le paysage immaculé. Ses branches pendaient jusqu’au sol gelé, comme de vastes larmes coulant le long de ses joues végétales. Le froid piquant semblait l’avoir figé dans son chagrin glacé. Et lorsque que le soleil bas le caressait de ses pâles rayons, il rayonnait de mille feux. Les cristaux renvoyaient la lumière dans toutes directions, comme un kaléidoscope enneigé. Son tronc avait pris l’aspect d’une tour d’argent, transparente de pureté.
Il était magnifique dans ses habits nordiques. Et tous l’admiraient pour sa grandeur miroitée. Et pourtant, l’arbre était silencieux. Pas même le vent ne parvenait à le sortir de son mutisme. Il paraissait dur et implacable. Comme s’il avait décidé de se renfermer sur sa beauté glacée. Prisonnier de son écrin argenté. Cela faisait des années que l’arbre n’avait plus prononcé un seul mot, ni montré un quelconque signe de vie. Pas même lorsque la sève du printemps avait coulé dans ses veines. Pas même lorsque l’été était revenu chauffer ses branches, ni lors du festival des couleurs automnales. L’arbre était resté de glace, immuable dans sa froideur distante. Alors, même ceux qui l’aimaient avaient fini par croire que le froid avait définitivement eu raison de sa chaleur. On ne parlait plus de lui. On avait fait son deuil de cette statue étrange au regard d’émeraude définitivement clos.
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Son costume de glace n’était en réalité qu’une armure qui l’empêchait de se consumer et de blesser ceux qui s’approchaient de trop près de son cœur enflammé. Un brasier brûlait dans ses veines. Son silence transi le protégeait de ces conversations qui trahiraient son secret. Un heaume impénétrable comme seul rempart contre les caresses de mains vulnérables. Un masque de dureté comme seul bouclier pour contrer la tendresse des doigts sensibles. Son cœur incandescent dévorait les imprudents qui tentaient de l’étreindre de trop près. Et il avait ainsi, jadis, bien malgré lui, irrémédiablement enflammé un elfe des bois qu'il avait tendremment enlacé de ses grandes branches. Il s’était alors juré de ne plus jamais laisser le brasier de son torse embraser ceux qui se risqueraient à s’approcher de lui. Laissant croire que son cœur s’était éteint et pétrifié à jamais dans une immuable chape de glace.
Cependant, chaque année, le soir de Noël, alors que la neige tombe en gros flocons, au plus sombre de la nuit de décembre, un ange aux ailes dorées rend visite à l’arbre de glace. Du bout de ses ailes éthérées, il effleure l’armure brillante du triste géant boisé, jusqu’à l’enserrer de ses immenses voiles. Alors, apparaît une infime lueur au plus profond de son tronc. Comme un petit feu qui prend naissance à l’intérieur de son écrin de givre. Une petite flammèche monte ainsi de son antre. Elle danse de ses entrailles, le long de son écorce blanchie par la bise, lentement, imperceptiblement. Dans la noirceur environnante, les elfes et les farfadets peuvent alors être témoins de ce miracle de Noël. Et à ces moments, l’arbre peut montrer sa vraie nature de feu. Le dragon de glace laisse enfin libre cours à sa nature torride. Son cœur de feu peut battre sans crainte. Et l’arbre respire à nouveau, reprenant vie pour quelques instants de grâce. Et sa cuirasse de glace fond ainsi chaque année pour quelques heures durant la nuit de Noël, pour se reformer avant le lever du soleil. Une trêve avec lui-même, une trêve avec le monde…
Depuis, dans ma famille et cela depuis des générations, nous plaçons un verre d’eau et un morceau de pain dehors le soir de Noël, à l’attention de l’ange. Pour qu’il les bénisse et reprenne des forces pour enlacer tous les arbres figés dans la froidure et leur rende vie pour quelques heures.
Pour que Noël ravive le feu de tous les arbres de glace de ce monde et ramène un peu de chaleur dans nos cœurs. Un joyeux Noël à tous.
En ce dimanche de fête, quelques jolies filles ont malgré tout bravé les vilains microbes et trouvé le moyen de venir de Rome pour venir délivrer de précieux colis dans nos jardins ou devant nos portiques. Alors, je vous ai pondu un petit billet en leur honneur ce WE.
Femmes d’airain
Elles se prénomment Marie, Anne-Geneviève, Bertha ou encore même Denis, Marcel, Étienne, Maurice, Emmanuel ou Ben... Elles portent le patronyme de saints patrons, bienfaiteurs, anges ou de leur créateur. A l’époque médiévale chrétienne, elles recevaient un baptême avec un parrain ou une marraine et une bénédiction en bonne et due forme pour lesquelles elles étaient même vêtues de robes, aspergées d’eau bénite, puis ointes d’huile sainte. On les trouve partout au monde et virtuellement dans toutes les religions. Elles ne font pas de politique. Elles existent depuis la nuit des temps, depuis que l’homme a appris à durcir l’argile à l’aide du feu.
Femmes d’airain, fer, cuivre, bronze ou laiton, elles se parent parfois même d’argent, d’or, de porcelaine ou de cristal. Elles portent une robe taille extra small à extra large, de quelques grammes à plusieurs centaines de tonnes (la « Tsar Kolokol » avec ses 200 tonnes, fondue à St Petersbug). Certaines sont des solitaires, d’autres aiment la compagnie de groupe. Mais toutes possèdent une et même qualité : elles chantent merveilleusement bien, du soprano à la basse. Du tintinnabule au gong. Et leur son enchanteur résonne dans toutes les têtes. Quel beau métier que celui de carillonneur...
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Grandes voyageuses
Sur les bateaux, les cloches sont appelées cloches de bord ou de marine. Elles portent le nom du navire, la date de construction et parfois celui de son constructeur. Avant la mise en place de lentille de Fresnel, la navigation nocturne côtière et fluviale était guidée par des cloches. Elle est encore utilisée aujourd'hui sur des navires de plus de 20m de long, le plus couramment pour transmettre l'information concernant le nombre de maillons de chaîne de mouillage à l'eau, ou de signaler que l'ancre a bougé. Elle peut se prouver utile par temps de brouillard également. On les retrouve aussi sur certaines bouées.
Durant des siècles, les dames de fer avaient ainsi pour mission de sonner l’alarme (tocsin, glas), de donner l’avertissement (clochettes des lépreux, conciergerie, cloche du repas, sonnaille des bêtes d’élevage pour les repérer dans le brouillard... ), de célébrer les événements et cérémonies (matines, mariages, baptêmes, enterrements... ) et bien entendu, de ponctuer le passage du temps (comme les Suisses qui sonnent toutes les demi-heures, au grand plaisir de ceux qui logent près de leur clochers et ont le sommeil léger ;-)). Mais avant tout, nos demoiselles des campaniles ont toujours eu pour vocation de rassembler les hommes, de les protéger, peu importe leurs origines et leurs différences. Il en est de même pour les cloches romaines qui, inlassablement, siècle après siècle, quittent la ville sainte pour parcourir le monde et y déposer leur présent Pascal, en signe de printemps, de renouveau et d’espoir. Et là où les cloches ne peuvent passer, ce sont les lapins qui se chargent de cette mission à leur place. Et cette année, elles n’ont pas manqué à leur tradition.
Je vous souhaite une très heureuse fête de Pâques si vous la célébrez. Et si ce n’est pas le cas, c’est toujours une bonne excuse pour déguster quelques petits œufs en chocolat (attention à la crise de foie...) ! Un excellent dimanche à tous.
Tous les beaux voyages débutent souvent par un bon café brûlant avant de larguer les amarres. C'est aussi la petite tasse qui nous réchauffe à bord ou nous aide à tenir l'oeil ouvert durant les quarts. Alors, si nous partions ce dimanche à la quête de cette boisson qui ouvre le sillage vers l'aventure à travers le monde ?
Café ou Thé ?
Originaire d'Ethiopie et du Yémen, les confréries Soufies de l'Arabie utilisèrent le café pour faciliter les veillées de prière. La boisson se diffusa dès le début du XVIe siècle dans les grandes villes du monde arabe du Caire jusqu’à Damas, Istanbul et Ispahan, sans oublier la Turquie ottomane.
"L’art du thé", similairement, a été introduit de Chine par les moines bouddhistes de la secte Zen dans le même but : celui de maintenir l’état de veille pour la méditation. Au Japon, la "cérémonie du thé, "cha-no-yu" ou "sadô", un partage ritualisé d'un boisson chaude non alcoolisée et revigorante, a pris une fonction sociale importante à travers les siècles. Elle touche toutes les classes sociales et tous les milieux, hommes comme femmes. Bien au-delà de sa fonction de bienvenue et d'hospitalité, cette cérémonie joue un rôle majeur dans la cristallisation d'une série de valeurs fondamentales pour les Japonais, telles que la sobriété, la discrétion et le respect.
Le choix du café ou du thé dépend de l’endroit de la planète où nous nous trouvons. Si vous voyagez chez les Bédouins d'Arabie ou de Syrie, en Turquie ou encore au Moyen-Orient, vous aurez beaucoup de chance d'y déguster les grains nord-africains. Par contre, si l'envie vous prend de pousser une tête dans les déserts berbères, en Asie ou tout simplement dans les eaux anglo-saxonnes, vous n'échapperez pas aux fameuses herbes dans de l'eau chaude.
Qu’ils sont doux les levers de soleil dans le fond d’une baie irlandaise… Le bateau, l’équipage dort encore, l’eau limpide est parfaitement calme et le soleil tiède inonde déjà les collines boisées et descend vers les berges de granite. Tout est calme. La bouilloire vient de siffler, la table du petit déjeuner est dressée, les équipiers les plus courageux ouvrent l’oeil et se préparent à une courte baignade dans l’eau fraîche avant d’attaquer l’ « Earl Grey », la marmelade d’orange et le lemon curd.
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La Tasse du Faste
La célèbre "türk kahvezi" ou "cérémonie du café" en Turquie ottomane allait jusqu'à un niveau de détail engloblant toute une série d'objets d'art lié au rite du café : cafetières, poêles à griller les grains, cezve (tasses), plateaux, réchauds, étoffes assorties, souvent en métal précieux richement décoré ou en porcelaine... Bien entendu, au départ, ceci était réservé au classes sociales supérieures dont le mobilier raffiné décrit ci-avant servait notamment à quelque peu affirmer la puissance et l'attachement à un ancien régime.
On retrouve les mêmes éléments pour la cérémonie du thé asiatique. Les objets, le lieu et les gestes entourant le rituel du thé revêtent une importance primordiale dans la tradition de la petite boisson herborisée. Olfactif, visuel, gustatif, le partage du café, dans ce contexte très hiérarchisé de la société ottomane, relevait aussi d’une véritable recherche esthétique : ameublement, les motifs des tapis en particulier, s’accordaient à ceux des étoffes et des vêtements portés par les servantes. L’odeur du café, accompagnée parfois de celle de parfums ou d’encens que l’on brûlait participaient à la délimitation d’un espace (même provisoire) réservé au café avec lequel on honorait ses hôtes.
Ce n'est qu'à partir du XVIIe siècle que l'ancêtre du cappucino fait son chemin hors des salons privés, des tentes du caravansérail et des riches demeures vers les coins de rue (les "maisons de café") ou échoppes ambulantes, y compris en Italie et en France, où la tradition du café est restée bien présente jusqu'à nos jours.
Le Breuvage du Dialogue
Les deux boissons, si différentes soient-elles, ont fréquemment été sources d'accueil, rencontres et échanges. Elles constituent un petit havre de paix le temps d’une pause, d’une écoute de l’autre, de l'hospitalité autour d'une tasse et d'un rituel de respect mutuel. Elles facilitent et accompagnent les rapprochements, les voyages, les ouvertures au monde.
Les plus grandes négociations entre nations de ce monde l'ont souvent été autour d'un de nos deux breuvages. La petite tasse y a rempli son rôle de facilitation, de créateur de trêve, le temps d'un dialogue entre belligérants ou nouveaux alliés. Nul doute sur le fait que Lawrence d'Arabie, David Lloyd George, Vittorio Orlando ou encore Benjamin Franklin aient bu leur café ou leur thé bien chaud pour parlementer des traités de paix historiques. On pourrait donc surnommer ces deux boissons des "médiateurs universels" en vertu de leur pouvoir de conciliation.
Se réunir autour d'un café ou d'un thé, c'est ainsi toujours une manière aisée pour lancer un dialogue ouvert, une base pour une (ré)conciliation, un premier regard à l'autre, un moment convivial et chaleureux même pour une conversation difficile. Un peu comme si la tasse bouillante contenait une potion magique créant une certaine intimité, faisant s'ouvrir les esprits et s'envoler les animosités dans ses volutes de fumée.
Si je suis passée au thé le matin depuis quelques années, je ne dédaigne pas un café léger, latté et sucré. Et vous, comment aimez-vous votre "caoua" ?
En attendant des cieux plus cléments pour enfin partager un de ces cafés, je vous souhaite un excellent premier jour de printemps, avec une bonne tasse pour vous réchauffer le corps, le coeur et l’esprit.
Premier dimanche de l’année.
Voyons voir.... Que dire dans un premier billet de l’année ? Faire le point rétrospectif sur douze mois pour le moins bizarres ? Se lamenter sur une période difficile ? Repenser à ces moments particulièrement lourds à porter pour certains d’entre nous ? Verser quelques larmes sur cette minuscule partie de nos vies où nous n’avons pas pu faire ce que nous souhaitions, voir ceux que nous voulions ou vivre comme bon nous semblait ? Nous plaindre des décisions que nous n’avons pas prises et dont nous avons dû subir les conséquences ? Mmm, pas trop inspirant à mon goût. S’il débute par la même lettre que le gros mot de l’année 2020 (vous savez : « c...d/a »), ce billet se termine bien différemment... Alors, c’est parti pour quelques lignes au titre digne d’un film joué par Louis de Funès.
Le gendarme de 2021
Rien à voir avec les histoires qui circulent sur les médias à propos des forces de l’ordre. Jean Girault, par contre, aurait pu en faire un épisode cinématographique dans sa célèbre série des « gendarmes ». De quoi nous changer les idées. L’année qui vient, c’est celle que je veux du changement, souriante. C’est celle dont je ferai le meilleur, même dans les pires moments. C’est celle des rêves, des nouveaux projets et des coins de ciel bleu à travers les ciels sombres (nos fameuses « culottes de gendarme »).
Bleu comme un pantalon d’uniforme. Comme un message d’espoir. Comme une lumière dans le gris du ciel. Bleu comme l’océan et nos rêves de navigation. Bleu comme la couleur d’un regard qui pétille. Et comme les bulles qui dansent dans mon verre pour célébrer l’an nouveau, je m’imagine une année pétillante. Il m’est aisé de voir les choses en... bleu. La vie m’a relativement épargnée comparé à des milliers d’autres. Et j’ai, jusqu’à présent, toujours passé les tempêtes sans trop de casse, en suivant le petit coin d’azur derrière les nuages.
Même s’il reste encore compliqué et hasardeux de faire des projets de vie pour les mois à venir sans garantie qu'ils pourront se réaliser, cela ne m’empêche pas d’envisager 2021 avec optimisme. Elle s’annonce spéciale. Avec des perspectives différentes et quelques changements prévus dans l' agenda dont je vous reparlerai le moment venu. Je peux juste déjà vous dire qu’il est temps pour moi de relire l'histoire des premiers grands navigateurs, de ressortir mon Assimil et de redescendre du grenier mes bonnets de laine, mes écharpes et mes gants fourrés. Et je m'en réjouis ;-).
Histoire de perpétuer la tradition, voici un petit conte de Noël.
Il était une fois un loup nommé Noyé...
Il était une fois un loup qui vivait dans les Hautes Fagnes...
Il vivait en solitaire, au plus profond des plateaux ardennais. Il arborait un pelage feu et noir. Et comme le sol, le bout de sa queue était entièrement couleur de l’ébène, comme un pinceau trempé dans les tourbières de la région. Il arpentait les longues étendues rousses parsemées de sapins entre deux forêts. Fin et souple, il se faufilait entre les longues herbes et entre les points gorgés d’eau ferrugineuse. Durant de longues années, il avait appris chaque recoin, chaque motte de tourbe, chaque mousse émeraude. Il connaissait les bois sur le bout des pattes et admirait chaque lever du soleil à travers les branches d’épines. Il vivait à cet endroit depuis sa tendre enfance et s'y sentait chez lui.
Cet hiver-là, le loup venait de compter son douzième printemps. Une éternité pour un animal solitaire. La neige avait recouvert les étendues de son immense manteau blanc et le blizzard soufflait avec rage. La glace avait emprisonné les ruisseaux et les flaques de la Fagne. Le givre avait transformé les cascades des Nutons (les petits elfes de la région) en statues translucides jusqu'au plus profond des bois. Et le loup était las. Il ne sentait plus ses pattes. Il avait froid malgré sa fourrure généreuse. Il tremblait et sentait ses forces l'abandonner. "Mon temps est venu", se disait-il. j'ai bien vécu après tout. Peut-être est-il temps pour moi de m'endormir dans la grande prairie. Et il se coucha le long des berges de la Neûre Êwe (l'eau noire), à la limite de la Hoegne, une des deux rivières qui traversaient la région. Il ferma ses yeux dorés et se laissa emporter par la fatigue. Il resta ainsi sans bouger et le battement de son coeur ralentit progressivement. Il était prêt à partir.
Au crépuscule, un bûcheron passa par là avec son fils et se rapprocha de la rivière pour y remplir leurs gourdes d'eau après une dure journée de labeur dans la forêt avoisinante. Quelle ne fut pas leur surprise d'y trouver... un loup ! Leur première réaction fut la peur. L'homme recula prestement et tient son fils derrière lui pour le protéger. Mais l'animal ne bougea pas d'une once. Il gisait là, tranquillement, dans les herbes hautes parsemées de givre. Le fils de l'homme, intrigué, se rapprocha du loup. Le bûchuron le tint pour mort. Son fils le regarda de plus près et rétorqua : "Mais, il respire encore, père... Il a l'air blessé et très faible. Et si nous le ramenions à la maison pour le soigner ? ". Le bûcheron regarda son fils, interloqué. "Mais, mais... il s'agit là d'un loup, mon fils ! Pas d'un simple chien ! Allons bon, repartons. La nature fera son travail. S'il doit s'en remettre, il se réveillera. Sinon, il s'endormira à jamais. "
Les deux hommes reprirent le chemin vers leur chaumière où brillait déjà une lanterne dans l'obscurité tombante. Durant la nuit, une terrible tempête de neige se leva sur le plateau et au petit matin, le sol était totalement recouvert d'un manteau blanc. Leurs traces avaient disparu. Jean-Noël - ainsi se prénommait le petit garçon - se leva et enfila ses bottes et sa redingote. Il n'avait pas fermé l'oeil de la nuit, pensant au pauvre loup, seul dans le froid et le blizzard. Il voulait en avoir le coeur net. Il repartit dans la Fagne avec un bâton, pour voir si le loup avait survécu à la nuit. Arrivé au bord de l'eau, il remarqua quelques traces fraîches dans la neige. Clairement, le loup avait tenté de se lever pour boire. Mais s'était recouché, à bout de forces. Jean-Noël n'y tint plus. Il avança sa main vers le museau pointu. "Je ne te veux pas de mal. Je vais t'aider. Tu verras, je vais te ramener au chaud et tu pourras guérir chez nous". L'animal huma la main enfantine qui se présentait à lui, ouvrit ses yeux de feu et lui lècha les doigts. "Tu n'es pas méchant, je vois cela dans ton regard... ". Et le loup posa délicatement son museau dans la paume de sa petite main.
Jean-Noël fit boire le loup dans sa gourde et posa sa redingote sur l'animal pour le tenir au chaud. Son pelage était doux... "Je reviens avec mon père pour te chercher. Ne bouge pas. " Et il repartit en courant vers la chaumière. Ses parents, inquiets de son escapade, le réprimandèrent à son retour. "Il est hors de question d'aller chercher cette bête ! ". Alors, Jean-Noël fondit en larmes. Le père finit par abdiquer face au chagrin de son fils. Ils ramenèrent alors le loup dans leur maisonnée sur une bâche et l'installèrent dans le fumoir à viande sur un tas de foin. Il y faisait bien chaud. Et durant dix jours et dix nuits, le loup, incapable de se lever, resta couché et refusa de manger quoi que ce soit. Durant cette période, le jeune garçon refusa de quitter son ami à quatres pattes et dormit à ses côtés. Le onzième jour, la veille de Noël, il ne respirait plus que très faiblement et n'avait presque plus la force d'ouvrir les paupières. Jean-Noël était despespéré de voir son ami dépérir ainsi sans pouvoir l'aider.
Comme toutes les veilles du 24 décembre, la famille avait placé du pain et de l'eau dehors pour qu'il soit béni par l'Ange à minuit. Au petit matin du 25 décembre, Jean-Noël se réveilla avec un sentiment de froidure. Le loup avait disparu ! Il se précipita au-dehors, persuadé d'avoir perdu son compagnon à jamais.... Il scruta l'horizon dans le soleil levant. L'enfant était aveuglé par ses propres larmes. Il tomba assis par terre, inconsolable. Puis, un murmure retentit dans le silence glacé de la plaine : "houououououou...." Et une forme rousse et noire apparut derrière la maison. Elle s'approcha de lui en trottinant. Il sentit alors une caresse humide et douce sur sa main. Il releva les yeux et se trouva face à face à un regard de feu bordé de longs cils noirs, qui le regardait d'un air attendri. Il prit l'animal dans ses bras et le serra contre lui. "Merci à l'Ange ! Il m'a rendu mon loup ! Noyé. Nous te nommerons Noyé...", dit alors l'enfant au loup.
Depuis ce jour, le bûcheron et sa famille vivèrent heureux, en lisière des Fagnes, avec leur nouveau compagnon. Le village d'où leur grande famille était originaire était un petite bourgade nommée "Stembert". Depuis ce jour, les habitants du village furent surnommés les "Leûps" (les loups).
Noyé signifie "Noël" en wallon de la région. Et Jean-Noël n'était autre que mon grand aïeul...
Alors, je vous souhaite un très joyeux Noël si vous le célébrez. Qu’il vous soit tendre et paisible. Et aussi doux et chaleureux que la fourrure de Noyé contre ma joue ce soir.
Faute du billet dominical, je vous offre un petit billet du mercredi en guise de défilé national. Soyons un peu chauvins... une fois, dis...
Un petit point sur la carte de 30.600 km carrés, avec moins de 12 millions d’habitants et dont on fait le tour en moins de 300 km avant d’arriver à une frontière. Pas de quoi en faire un plat (pays... ). Une minuscule goutte dans l’océan qu’est le continent européen. Cependant, un petit point qu’on voit de l’espace la nuit. Un petit point où sont centralisées les discussions européennes et de l’OTAN. Un petit point international entouré de mentalités villageoises.
Une marque géographique qui se targue d’avoir une tradition de bière et fromagère unique, avec presque 1.200 bières différentes et 500 fromages pour les accompagner. Une tradition culinaire, si pas de haute et fine cuisine, du moins de tradition goûteuse et qui réchauffe les sens. Une image accueillante et chaleureuse à travers ses cornets de frites, ses gaufres, ses chicons au gratin ou encore son lapin à la kriek.
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Un pays champion toutes catégories en tables de multiplications aussi : 3 régions, 3 communautés et un gouvernement fédéral (enfin lorsqu’on trouve une majorité politique pour en former un), 48 ministres dont 9 de la santé publique, trois langues nationales, 10 provinces et 581 communes, avec chacun des autorités différentes... Un vrai casse-tête...
Un tout petit littoral long de 60 km à peine. Mais l’endroit idéal pour larguer les amarres d’une de ses belles marinas, se promener dans les dunes, où s’adonner à une des spécialités locales telles que char à voile ou le cuistax. Ou aller à la recherche de trésors enfouis dans le abbayes des dunes ou au fond des clochers carrés aux carillons mélodieux.
Une micro nation reconnue mondialement pour ses chercheurs, ses médecins, son chemin de fer, ses journalistes à la houpette, son ouverture au monde et aux cultures (quoi qu’en disent certains partis). Un peuple qui a connu des invasions successives et qui ne sait parfois toujours pas s’il doit se rapprocher de ses voisins du Nord ou ceux du Sud. Ou encore se déclarer indépendant pour devenir alors une nano-nation que le monde relèguera probablement aux oubliettes de l’histoire. Mais un pays riche de par sa diversité, ses différentes origines et ses aventures historiques. Un pays, si souvent empêtré dans ses discussions politiques et pourtant performant lorsqu’il s’agit de trouver des solutions diplomatiques et de consensus.
Des forêts et des bocages à n’en plus finir. Et même des montagnes... (proportiellement équivalentes à sa petite taille, d'accord !) Des plateaux et des méandres que le Grand Jacques n’aurait pas pu mieux chanter. D’ailleurs, parlons-en du Grand Jacques. Et de la grande Claudine et du grand Jean-Philippe Léo et de tant d’autres qui nous ont laissé un héritage musical ou artistique fabuleux. Une tradition d’auteurs et de dessinateurs fantastiques. Je pourrais vous en citer des pages et des pages. Connaissez-vous d’ailleurs cet auteur verviétois (ma région d'origine) de BD animalières au pinceau fabuleux : René Haussman. À découvrir sans modération si vous aimez les récits fantasmagoriques, les animaux, la nature et les belles images.
© Photos – Wikipedia
Je vous souhaite un excellent 21 juillet, que vous soyez belge ou non, de cœur ou d’ailleurs. Une bonne fin de semaine à tous.
Pourquoi pas un petit billet de saison, ce WE ?
Dans les chaumières ces derniers soirs, on voit une apparition inhabituelle de légumes sur les pas des portes, de silhouettes fantomatiques et de bougies à la flamme vacillante. Les magasins sortent leurs meilleurs slogans, les fleuristes leurs plus beaux pots et les enfants préparent leurs grands paniers pour les remplir de pétales ou de bonbons. Bref, une période particulière.
Halloween, Fête de la Toussaint, Fête des Défunts. Trois célébrations qui se suivent en une et seule même période de trois jours consécutifs ou « triduum». Une célébration religieuse devenue opportunité commerciale, se plaindront certains. Une commémoration importante, affirmeront d’autres. Rien à voir avec la mer ni les voyages, me direz-vous ? Détrompez-vous.... Ces traditions nous emmènent en Irlande, Ecosse, Bretagne ou encore en Amérique latine... A d’autres dates et sous d’autres formes, on retrouve leurs équivalents locaux en Chine, au Japon ou en Inde notamment.
Et puis, si nous transformions le mot « Hallowtide » en « Hallow Tide » en le traduisant librement en « Marée des Souvenirs »... Traduction très très libre, j’en conviens. Mais plus joli, non ?
Samhain
Halloween. Le 31 octobre, c’est le moment de retrouver ceux qu’on a aimé. Les Celtes croyaient en une nuit où une porte s’ouvrait entre le monde des vivants et celui des morts (gardé par le dieu Samhain). Un peu comme une mer qui s’ouvre pour laisser remonter à la surface les marins engloutis dans son linceul d’azur, pour une nuit à bord avec leur équipage. Une seule nuit enchantée qui s'échappe une fois par an entre les méandres du temps pour permettre aux deux mondes de se réunir. C’est pourquoi nos ancêtres laissaient leur porte ouverte, une place à table et une lanterne allumée pour les guider.
Par tradition, les villageois celtes éteignaient le feu de cheminée dans leur foyer puis se rassemblaient en cercle autour du feu sacré de l'autel, où le feu était aussi étouffé pour éviter l'intrusion d'esprits maléfiques dans le village. Après la cérémonie, chaque foyer recevait des braises encore chaudes pour rallumer le feu dans leurs maisons pour ainsi protéger la famille des dangers de l'année à venir. (Source Wikipedia)
Imaginez une seconde... Une nuit où nous pourrions retrouver un instant ceux qui nous ont quitté, qui nous manquent. Une nuit où nous pourrions les serrer une fois encore dans nos bras, entendre leur voix, toucher leur main... Combien d’entre nous donneraient tout pour bénéficier d’un moment de grâce pareil. Un remake de "Ghost", sans Patrick Swayze ou Demi Moore avant la lettre. Comment ne pas souhaiter croire à une tradition permettant tel miracle. Pas étonnant que tant de populations aient perpétré la tradition.
Le mythe de la citrouille ne fut importé que des siècles plus tard par les immigrants irlandais aux Etats-Unis. Cependant, au départ, ce furent navets, raves, rutabagas ou betteraves qu’on vidait pour y placer la flamme d’une bougie.
À l’origine, le symbole d’Halloween était un navet contenant une bougie pour commémorer la légende de Jack-‘o - lantern (Jack à la lanterne), condamné à errer éternellement dans l'obscurité entre l'enfer et le paradis en s'éclairant d'un tison posé dans un navet. (Source Wikipedia)
La fête des Défunts, un rite joyeux
Personnellement, les films d’horreur et déguisements macabres qui font aujourd’hui foison lors de Halloween (« le soir avant la Toussaint ») ne me tentent pas trop lorsqu’ils exacerbent le côté lugubre de l’événement. La plupart des célébrations catholiques de la Toussaint me semblent souvent sinistres ou du moins sombres. Les cimetières me rendent triste et je n’y trouve pas la paix d’âme qu’ils sont censés apporter. Mais je respecte ceux qui les visitent et l’opportunité pour les familles de se retrouver à cette occasion. Ceux qui y dorment pour un sommeil éternel sont absents de leurs allées pour moi. Ceux que j’aime sont partout avec moi, dans mon cœur, et surtout ailleurs que sous une pierre gravée : en mer, en montagne, en forêt... Ils sont dans les endroits croisés ensemble ou ceux où ils aimaient jadis se rendre. Et très rares sont mes visites en ces officiels lieux funéraires, même pour des êtres adorés. Ce n’est pas là un manque de respect ou d’intérêt mais juste une sensibilité différente vis à vis du souvenir. Et à quoi bon y reposer si personne ne vient jamais en visite. Donc, probablement pas un endroit que je choisirai pour mon long repos le jour venu.
En Amérique latine. au Mexique, par contre, cette célébration représente une fête joyeuse, festive et mémorable. Elle est l’occasion de danses, chants, repas et costumes dignes du carnaval. Elle constitue, elle aussi, une réminiscence du passé et des traditions aztèques. En 2003, l'UNESCO ira jusqu’à déclarer les fêtes indigènes dédiées aux morts « chef-d’œuvre du patrimoine oral et immatériel de l'humanité ». Finalement, pourquoi pas. Le Grand Jacques n’a-t-il donc pas un jour chanté de très jolis vers en ce sens ?
Marins perdus en mer
Et que faire pour les marins perdus en mer? Ceux qu’on n’a pas retrouvés, ceux qui sont loin de nos terres. A Ouessant, dans le Finistère breton, existait jadis un rite particulier pour célébrer ses gens de mer. Les « Croix de Proêlla ». Une menue croix de cire que l’on donnait à la famille pour symboliser le disparu en mer, puis qui était déposée dans un petit oratoire dans le cimetière local où reposaient emblématiquement tous les marins disparus. Une manière de les rapprocher de leurs proches à terre.
Moi, je proposerais de leur faire une belle fête avec du champagne symbolisant l’eau de mer et ses bulles et où tout le monde entonnerait des chants de marins égayants pour leur rendre hommage. Ne serait-ce pas bien ainsi ? Le plus bel hommage auquel j’ai jamais assisté à été celui d’un marin, disparu, lui à terre. Émouvant, réunis autour de son bateau. Gai dans les mots et dans le souvenir de sa joie de vivre et sa passion pour les flots. Autour de cette date automnale (période toujours étonnamment faste pour les départs ou annonces funestes), je boirai donc un bon verre à sa santé et à celle de tous ces anges qui veillent sur moi (à commencer par mon grand-père adoré qui, de tout là-bas lit peut-être ce billet et par ma grosse peluche à quatre pattes qui est partie le rejoindre il y a deux semaines). Mon Hallowtide à moi, ma « marée du souvenir » sera résolument un moment lumineux et festif. À votre santé, mes anges !
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August 2023
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