"Les fleurs du printemps sont les rêves de l'hiver racontés, le matin, à la table des anges." (Khalil Gibran)
C'est enfin le retour du printemps... Il commençait vraiment à se laisser désirer. Alors, voici un billet pour vous parler de nature. Et qui dit retour du printemps, dit notamment retour des... insectes ! Alors, pourquoi ne pas leur offrir un petit billet et en plus particulier aux abeilles... Je sais... Je vois déjà certains lecteurs froncer les sourcils à propos du sujet. Et non, je ne compte pas vous donner un cours d'apiculture ni de... euh..., enfin, vous savez bien quoi....
Restos du Coeur Marins
S'il est commun de croiser des volatiles lors de navigations à la voile, d'habitude, il est plus fréquent de recevoir la visite d'oiseaux de mer, de terre (ceux-là ont souvent l'air d'avoir un peu perdu leur boussole), ou voire de poissons volants (clairement en panne de sonar vu leur propention à se poser brutalement sur le bateau ou à choisir le visage des membres de son équipage pour piste d'atterrissage). Par contre, les insectes sont souvent plus rares en mer. Contrairement aux ports d'ailleurs, où les moustiques adorent me rendre visite à des heures tout à fait indécentes, dans une tenue et à des endroits, tout aussi impudiques ! Surtout lorsque le voilier en question (Merena, pour ne pas le nommer) ne possède pas de portes et où le navire fait toute la nuit office de resto du coeur pour ces bestioles en mal de partouses-gueuletons nocturnes gratuits.
Lors d'une navigation cotière en Turquie il y a deux ans, nous avons été littéralement envahis par une troupe de guêpes, en mal de trouver un endroit où se reposer en mer. Et tout naturellement, notre voilier leur a paru le refuge idéal, pour une petite pause. Qui sait, nos visiteuses jaunes et noires se sont-elles senties à la maison sur un voilier piloté par un équipage majoritairement originaire de Flandre (sans jugement politique aucun ! ). Mais voilà, ... La vie à bord étant ce qu'elle est et notre repas venant d'être servi dans le cockpit, nos petites amies bicolores ont tout naturellement demandé l'asile politique et gastronomique... Et c'est là que les marins s'empoignèrent... D'accord pour l'asile flamand. Mais pas d'accord pour l'asile gourmand. "Touche pas à ma tartine de confiture " ! Inutile de vous faire un dessin, l'ambiance à bord tourna rapidement au rouge (toujours pas de politique ici). Et nos invitées clandestines durent battre en retraite après une solide leçon de sémaphore par quelques membres d'équipage (avec les bras et le son s'il vous plaît ! ).
Abeille à Bord
Au retour de Cowes, où nous avions participé à la Round The Island Race en juillet passé, nos invitées surprises du moment démontrèrent, heureusement, de bien meilleures manières et politesses que leurs cousines à la taille fine. Ce fut donc, avec soulagement, que nous apercevâmes la silhouette plus menue de quelques abeilles dans le cockpit. Ces dernières s'étaient faites très discrètes et semblaient jouer au caméléon avec les écoutes rangées au bas du piano. Elles auraient pu se poser n'importe où d'autre à bord (ce n'étaient pas les écoutes en spaghetti par terre qui manquaient à bord ni la couleur jaune sur la bouée, mais elles choisirent un endroit stratégique : celui qui correspondait à leur aspect. Etonnant, non ? Ces passagères clandestines furent une compagnie des plus aimables à bord et nous ne nous en sommes plaints à aucun moment. Arrivés à hauteur de Nieuport, elles quittèrent alors le bord pour rejoindre la terre ferme dans un battement d'aile et un "bzzz, bzzz" amical.
© Photos - Rêvesdemarins
Maya & Lady Bug
Lors d'un conte narré en 2016 dans un billet antérieur - L'Abeille, La Coccinelle et le Dragon des Mers - , certains lecteurs de ce blog m'ont demandé, "mais pourquoi donc une abeille et une coccinelle" ??? Alors, chers lecteurs, je vais vous révéler ici un petit secret familial...
© Photos - Isabelle Burguet
Alors, si vous croisez un abeille ou une coccinelle en mer, soyez indulgents et accueillez-les chaleureusement sur votre combinaison de voile (la coccinelle sur la rouge et noire, comme la mienne, ou l'abeille sur votre veste de quart jaune. Et ceux, qui préfèrent les vêtements de voile bariolés, attendez-vous à héberger un joli papillon ou un scarabée multicolore !
Un excellent premier dimanche de printemps à tous !
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Histoire de varier les sujets, les styles et les plaisirs, que diriez-vous d’une petite fable pour billet ce WE ? Hélas, ni le grand Molière, ni l'éloquent De La Fontaine ne sont de mes ancêtres. Cependant, la version moderne d'un menu poète vous plaira-t-elle peut-être quelque peu aussi...
Maître Matelot, sur son mât haut perché, tenait dans sa main un cordage
Maître de Quart, par la vue alerté, lui tint à peu près ce language
Et bonjour Monsieur du Matelot,
Que vous êtes hardi ! Que vous me semblez haut ! Sans mentir, si votre courage se rapporte à votre haubanage, Vous êtes l'Alex (Thomson) des hauteurs de ces mâts. A ces mots, le Matelot se sent grisé de hisse Et pour monter dans le mât Il ouvre une large main et laisse tomber sa drisse Le Chef de Quart la saisit et dit : Mon bon Equipier Apprenez que toute voile vit au dépens de celui de son bout. Cette leçon vaut bien un cordage sans doute. Le Matelot, transi et confus Jura, mais un peu tard, qu’on ne l’y pendrait plus... (au mât... ) (VB, alias Jeanne de la Misaine)
© Dessins – Rêvesdemarins
Alors, gare à ne pas perdre votre cordage (ou fromage selon les cas), ce WE ! Un excellent dimanche à tous les corbeaux et les renards !
Puisque c'est à la mode du jour... Pourquoi pas un petit billet comme inspiration pour votre menu de ce dimanche. Je vous propose dès lors deux petites recettes faciles et conviviales. Tout aussi adaptées pour ces dames que ces messieurs, en toque de chef, que vous soyez doués ou non pour l'art culinaire. Prêts ? A vos fourneaux !
Etant donné mes origines liégeoises-verviétoises, ensuite reconverties en bruxelloises, mes tendances culinaires ont tout naturellement souvent eu tendance à se tourner vers les plats carnivores, voires légumivores. Je pourrais donc vous proposer ma recette maison des boulets sauce lapin, de la fameuse salade, du chou de Jalhay ou encore du stoemp carottes. Cependant, les circonstances de la vie m'ont amenée à découvrir les mets de la mer et à en devenir une véritable adepte. Seule exception à la règle : les coquilles St Jacques, qui me boudent depuis bien longtemps (elles demeurent le meilleur moyen de vous débarrasser de moi ni vu ni connu, si je ne me tiens pas bien à table). Je vous offre donc aujourd'hui de quoi vous emmener... à la mer au travers de votre assiette (thème du blog obligeant un peu).
Recette nr 1 (si les bébètes à coquilles ne vous rebutent pas) :
LES MOULES DU VOILEUX FOURBU
Un plat découvert un soir au club de voile, en rentrant d'une journée de navigation bien fatigante, où il fut accueilli comme une véritable Potion Magique pour réconforter les muscles endoloris (merci Thomas ! ). Imaginez une chouette terrasse en bois dans les dunes de la mer du Nord, une immense poële à paëlla sur le BBQ brûlant, une ambiance bon enfant et des marins en pleine verve, un délicieux petit (ou grand ! ) verre de vin blanc à la main.
Nombreux sont ceux qui se disent que la préparation des moules est compliquée. Détrompez-vous ! C'est un met simple comme bonjour à préparer !
Ingrédients pour 4 voileux affamés :
Préparation :
Le plus long dans les moules, c'est en réalité leur nettoyage. Placez les moules dans de l'eau froide à l'évier. Mélangez-les avec vigueur pour enlever le sable. Enlevez les "byssus" (barbes/fils) et parasites calcaires sur la coquille avec un petit couteau de cuisine. Changez l'eau 5 ou 6 fois jusqu'à ce qu'elle devienne très claire. Ajoutez une larme de lait si elles sont vraiment sales. Eliminez les moules qui remontent à la surface au nettoyage, ainsi que celles qui sont déjà largement ouvertes ou cassées. Egouttez les moules.
Faites chauffer la poêle avec une large portion d'huile d'olive (portion comme pour cuire des légumes). Lorsque l'huile frémit, faites-y revenir les échalottes coupées en petits morceaux et ajoutez les gousses d'ail écrasées, la ciboulette en rondelles, le persil et une bonne rasade de vin blanc. Ajoutez-y les moules dans leur coquille. Mélangez. Puis rajoutez du vin blanc pour les couvrir. Faites cuire 10 bonnes minutes (les moules doivent à présent s'être ouvertes, avoir pris une coloration plus jaune et une consistance plus ferme). Remuez régulièrement pour que toutes les moules touchent à leur tour le fond de la pôele et chauffent de manière égale. Servez à table dans la poêle, avec le pain et le reste du vin blanc à boire. Pour les moins regardants (les voileux comprendront), on mangera tous dans la même grande poêle en trempant son pain dans la sauce et en se servant de la première moule comme fourchette. Nul besoin d'assiettes ni de couverts. Juste le verre à vin reste indispensable. Et le tour est joué ! Et s'il vous reste des moules en trop non cuites ? Déposez-les simplement (nettoyées) 10 minutes dans un plat sur le BBQ (natures) et vous avez un apéro tout trouvé !
© Photos - Rêvesdemarins
Recette nr 2 (pour ceux que les moules boudent (ou le contraire)) :
DORADE EN MER DE SEL
Petite recette glanée lors d'un magnifique périple sur la côte atlantique du Portugal - ils sont forts ces Portugais ! - dans un charmant petit port de mer au nom évocateur : "Peniche" et son petit restaurant local sans comprendre un seul mot de ce que nous allions déguster. Et le résultat fut fabuleux. "No guts, no glory", donc...
Ingrédients pour 4 non-voileux faisant attention à leur ligne (pour l'équivalent voileux affamés, doubler les rations) :
Préparation :
© Photos - Rêvesdemarins
Voilà de quoi vous faire vous pourlècher les babines. Et si le menu ne vous convient toujours pas, il doit bien y avoir une baraque à frites dans le coin ! Bon appétit et un excellent dimanche !
Des lunes durant, les eaux sont paisibles dans une mer calme. Le bateau avance avec fluidité vers l'horizon. La vie est belle, les vents favorables. Les fortunes de mer sont loin derrière. Le navire poursuit sa route en paix vers la douceur du soleil levant.
Soudain, venu de nulle part, un remous brise le silence, brusque et violent. Comme un immense murmure, un seul. Un murmure qui hurle. Et la mémoire ressurgit. La vague remonte du fond des abysses. Et de ces profondeurs ressortent des créatures aux allures de monstres. La vague est lourde, écrasante, oppressante. Le marin se sent projeté dans l'onde et dans son passé. Il se revoit auparavant, déchiré par les éléments, jouet des déferlantes maglré lui, au bord de la noyade, qui jamais ne parvient vraiment à l'emporter. La lame de fond l'entraîne vers le tourbillon d'écume. Elle l'étouffe. Le marin happe l'air pour recouvrer sa respiration. Il voit désespérement son voilier poursuivre sa route sans lui. A-t-on seulement remarqué son absence à bord ? Il voudrait crier, mais l'eau a déjà empli sa bouche. Il voudrait nager et remonter à bord, mais les tumultes aqueux l'attirent toujours plus loin, toujours plus fort vers le fond de l'océan. Il entend le vacarme de son coeur qui tambourine en désordre dans ses tempes. La panique le gagne. Il halète frénétiquement sans parvenir à retrouver son souffle. Les flots fourbes le submergent lentement. Ses bras et ses jambes battent convulsivement sans parvenir à le ramener à l'air libre.
© Photos - Rêvesdemarins (Portugal : côte atlantique, Cabo San Vicente & Sagres)
Ses peurs ancestrales le rattrapent. Il revoit en un instant ces fortunes de mer qui l'ont autrefois terrifié. Il revit ces situations d'où il ne s'est jadis dépêtré qu'à grand peine et à forts coups de pieds dans l'eau. Ces naufrages qu'il avait espéré ne jamais plus revivre. L'histoire se répète, une, deux, trois fois, de manière inopinée, en dépit de ses actes de raison et de son extrême prévenance. Toutes les mers sont-elles donc les mêmes ? Je ne suis coupable de rien... Je n'ai pas même offensé les dieux des flots ! Tous les océans sont-ils donc tous impitoyables ? Pourquoi dois-je donc repasser par les mêmes vicissitudes ?
La mer a ses raisons que la raison ne connaît pas...
Alors, il ferme les yeux, et prend une grande inspiration lorsque son visage parvient enfin à brièvement sortir de l'eau. Il vient de décider de jouer avec la vague plutôt que de la laisser le malmener. "Si les poissons et les surfers le peuvent, je le peux aussi "! Il se débarrasse alors de ses vêtements. Un à un, il les enlève et les laisse s'enfuir dans l'onde. Il se retrouve nu. dans l'eau. Il se sent plus léger, plus libre de ses mouvements. Et lentement, son souffle se ralentit. Son coeur se tranquilise. Il retrouve peu à peu l'usage de ses membres. Et il se met à nager au coeur de la houle, sous l'eau, au creux de la vague scélérate. Mètre après mètre, il gagne du terrain. Il nage avec la mer. Il apprend à jouer avec la vague et à suivre ses ondulations. Puis, lasse de ce jouet qui ne joue plus son jeu, la lame de fond se fatigue de son pantin : elle le laisse prendre de l'écart. Et elle finit par repartir dans une autre direction. Et il reprend confiance en lui. Le navire se rapproche. La distance diminue. Et la vague se distancie de lui. Il sort du remous. Il revient vers des eaux plus sereines. Et là, son voilier le guette. Il l'a attendu. Il l'a tenu à l'oeil. Jamais, il ne l'a pas laissé s'enfoncer. Il pourra remonter à bord. Tout n'est qu'une question de temps, de courage, de persévérance et de patience. Avec un équipage de navire qui ne l'a en rien laissé pour compte à la merci des flots, prêt à le repêcher.
"Il y a souvent plus de choses naufragées au fond d'une âme qu'au fond de la mer... "(Les Contemplations, Victor Hugo)
La lame de fond ne l'engloutira pas, ni son voilier. Elle n'aura fait qu'une apparition, pour le tester, pour l'éprouver, ou par désespoir de trouver une autre marionnette. Surtout ne pas la laisser prendre possession de soi. Ne pas la laisser jouer son chantage. Elle finira par repartir, lasse, comme elle est venue. Et si elle revient, le marin aura enfin appris à la dompter, comme un animal traqué que l'on parvient à apaiser. Le marin sera devenu capable de nager et de négocier les la(r)mes de fond.
Bon dimanche à tous... Qu'il vous soit paisible et sans déferlantes.
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August 2023
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