Une fois n’est pas commune, un petit billet en honneur d’une œuvre cinématographique, ce week-end. Si vous avez besoin de repos et de détente, pour quelques heures d’évasion du monde réel, ce billet est pour vous ! Je vous emmène en mer sur une frégate anglaise pour une odyssée délassante avec une relâche aux Îles Galápagos pour une découverte un peu en avance sur Charles Darwin.
Inspiré du roman de Patrick O'Brian de 1969, le film reprend une quête nautique, faite d'honneur, de courage, de batailles et d'explorations du monde comme seuls les siècles des grands marins ont pu en initier...
Batailles Napoléoniennes
1805. Quatre ans avant la naissance du père de la théorie de l’évolution. Nous sommes à bord de la frégate britannique de guerre HMS Surprise dans les eaux du Cap Horn. Son capitaine, Jack Aubrey, a été nourri de ses rencontres en Égypte avec le grand Lord Nelson. Sa mission : arrêter un navire français, l’Acheron, par tous les moyens. Ce dernier étant suspecté de vouloir saboter la flotte baleinière de sa Majesté.
Le navire ennemi semble intouchable. Tel un navire fantôme, il apparaît puis disparaît régulièrement dans leur sillage sans jamais se laisser rattraper. Il échappe plusieurs fois à ses poursuivants britanniques à la faveur du brouillard, du Cap Horn aux Galapagos. Ils sont alors pris dans la pétole durant de longs jours. La tension monte à bord du navire du capitaine Aubrey. L'équipage suspecte l'aspirant de marine Hollom de leur porter la poisse. Le jeune homme n'est pas populaire à bord, trop doux pour le travail... Ce dernier choisit de disparaître en mer. Et, contre toute attente, le vent reprend... La superstition a la vie dure dans le milieu marin. A bord se trouve Stephen Maturin, le chirugien de bord. Maturin est en réalité un médecin naturaliste, passionné par les découvertes qu'il pourrait faire aux îles Galapagos et bien peu intéressé par les projets militaires de son capitaine.
Les musiques du film sont particulièrement agréables et bien choisies dans le décor d'époque. Splendides duos d'archers dans une cabine marine en pleine mer. Je vous laisse juger.
Juste avant Darwin
Blessé dans un accident de tir à l'albatros, Maturin se meurt. Et le capitaine Aubry décide enfin de mettre un terme temporaire à sa poursuite du navire français pour pourvoir à sa guérison. Il fait alors relâche aux Galápagos pour permettre une opération chirurgicale à terre. Une pause pour reprendre des forces et enfin répondre au souhait du médecin naturaliste de découvrir une nouvelle faune. Les îles sont un sanctuaire unique au monde pour certaines espèces. Il est ainsi un des précurseurs fictifs de Charles Darwin qui fera escale dans ce petit paradis terrestre pour cinq semaines en 1835 et y en déduira la théorie universelle de l’évolution sélective. Mais nous prendrons le temps de narrer cette épisode majeur de l’histoire et celle du navire HMS Beagle, qui emmènera Charles Darwin vers la découverte scientifique qui changera la face du monde, dans un billet suivant, dont les fameux carnets de notes viennent d'être récemment retrouvés.
Durant ses observations de la nature fabuleuse de ces îles, le médecin remarque les capacités étonnantes de certaines espèces en matière de camouflage (notamment, celle des "phasmes", insectes à l'aspect de branche de bois). Il en fait part au capitaine Aubrey. Et c'est la révélation... C'est alors que Jack Aubrey s'en inspire pour déguiser son navire en bateau de baleinier et se faire aborder par l'Acheron, tendant ainsi une embûche à son ennemi. Il prend alors enfin pouvoir du navire ennemi qu'il poursuit depuis de nombreux mois. La nature n'en finit pas d'inspirer les plus grands. Elle est source d'inspiration universelle.
Je le visionne et le re-visionne sans jamais m’en lasser… Les images, le récit, le contexte historique, le langage nautique de l ‘époque et la musique continuent inlassablement de me charmer. J’espère vous avoir quelque peu sorti de vos tracas journaliers à travers cette fresque marine.
Un excellent dimanche à tous !
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Pour ce week-end de Pâques, un petit billet de circonstance. Partons à la découverte des traditions de Pâques dans mon pays de cœur, le Danemark. Une de ces traditions locales comporte un charme tout particulier, celle du « Gækkebrev « , ou de la « la lettre qui rend fou ».
Je vous rassure, il ne s'agit nullement d'une lettre à l'anthrax ou au produit des frères de Kih-Oskh (Tintin et les Cigares du Pharaon ou le Lotus Bleu). Il s'agit d'une lettre bien plus innofensive et surtout plus mystérieuse !
Missive d’un auteur inconnu
La « gækkebrev » est une vieille tradition danoise datant du début du XVIIIe siècle, encore perpétuée par quelques rares enfants aujourd'hui dans ce pays du Nord. Elle pourrait découler du folklore séculaire danois, qui stipule que lorsque les « vintergække » (perce-neiges) émergent du tapis immaculé hivernal, il est alors temps d'envoyer un message à quelqu'un qu’on aime. Le mot "gæk" fait référence à la notion de "rendre fou, taquiner, plaisanter". Comme le perce-neige taquine l'été en fleurissant en hiver. Les danois sont friands de mots d'esprit, d'humour et de divertissement.
Le principe en est simple. Un inconnu envoie une lettre à un être qui compte pour lui. La missive est faite de papier fin, fabriquée à partir d'un morceau de papier carré, plié 4 fois, habilement décoré de formes découpées dans le papier (cœurs, carrés, rayures, hexagones et triangles, etc.). Lorsqu’on déplie la lettre, apparaissent alors de jolis motifs élaborés. Certaines de ces lettres ont l'aspect d'un véritable chef d'oeuvre de dentelière. La lettre est parfois accompagnée d'une fleur, un perce-neige ou une autre des premières fleurs de l'année. Sur la lettre est écrit un poème dont le texte doit rimer. La lettre doit demeurer non signée. Seul indice pour le destinataire : un point pour chaque lettre du nom ou du prénom de l'expéditeur. Si le destinataire parvient à deviner l'identité de l'expéditeur, l'expéditeur doit alors lui offrir un œuf en chocolat. Le délai pour deviner l’identité de l’expéditeur et l’appeler est généralement d’une semaine environ. Faute de quoi, l’expéditeur de la gækkebrev prendra les devants pour révéler son identité. Dans ce dernier cas, ce sera alors au destinataire de devoir un œuf au chocolat à l’auteur de la lettre. Certaines de ces lettres se révèlent de véritables petites merveilles. Délicates, sensibles et inspirantes. Avec ce piment de mystère pour rendre l’expérience encore plus enivrante. Une recette de Pâques gagnante à tous les coups. "En Giæk lader hun sig kalde, det monne mit Hjerte befale, min Giæk skal hun være fra Vintren til Somren med Ære."
© Photos – simplylivingdanish.com - videnskab.dk - wikipedia
Dans les campagnes danoises des années 1800, cette tradition n'était pas réservée aux enfants à Pâques ; c'était en fait une manière de faire sa demande en mariage... Les lettres n'étaient pas toujours décorées mais contenaient à la place un long poème et un perce-neige. De ce cas, la missive était rarement véritablement anonyme :-).
Puis, à la révolution industrielle, lorsque la population rurale s'est déplacée vers les villes, ces types de lettres ont été commercialisées. Et au lieu d'un œuf de Pâques, le prix à obtenir en en devinant l'auteur s'est transformé en une invitation à prendre un café ou à aller à un bal.
Lettre de Liaison
Dans un registre similaire, il existait également la tradition de la « lettre de liaison ». Un autre exemple de lettre en rimes, comportant une énigme à résoudre. Celle-ci était le précurseur de la "gækkebrev". Cette tradition originaire d'Allemagne au départ, avait été reprise au Danemark entre 1600 et 1800.
La lettre de liaison se lisait comme un poème, contenant généralement une énigme, qui était envoyée aux personnes le jour de leur fête nominale ou l'un des jours des quatres temps (Sainte-Croix, Sainte-Lucie, Mercredi des Cendres, Pentecôte), jours de jeûne entamant chaque saison dans la tradition chrétienne. Les deux personnes étaient alors déclarées "liées entre elles" jusqu'à ce qu'elles aient résolu l'énigme, soit en personne, soit en s'invitant à une fête. Typiquement adressées à des adultes, les énigmes de ces dernières lettres étaient plus sophistiquées que celles des "gækkebrev". Dans les recueils de poèmes des XVIIe et XVIIIe siècles, on trouve de nombreuses lettres de ce style aujourd''hui encore visibles au musée de la poste danoise. Au lieu d'une énigme, certaines requéraient de leur destinataire de défaire une série de nœuds sur une ficelle de soie ornant la lettre. Des noeuds marins, bien entendu... Jolies traditions, non ? "Jeg binder dig hverken med baand eller bast
© Photos – Enigma.dk - wikipedia
Alors, si vous recevez une lettre anonyme énigmatique, bordée de noeuds marins, ce dimanche, dites-vous que quelqu'un vous veut du bien. A moins que son expéditeur n'aie simplement envie d'un bon festin en votre compagnie !
Bonne fête de Pâques ! Un excellent dimanche à tous. Vent de souffle et de vagues
Enfilez votre combinaison de plongée ce dimanche. Je vous emmène découvrir un monde à la limite du monde connu. Nous nous immergeons dans les profondeurs abyssales ce WE.
Tout débute tout au fond de la mer...
Abysse fut le tout premier dieu marin...
Abysse fut le tout premier dieu marin dans la mythologie grecque. Mais au fil du temps, il fut oublié. Et comme son nom l’indique, il fut envoyé au fond des abysses et désigne les profondeurs sous-marines. Les plus éloignées se situent à 11.000 mètres sous le niveau de l'eau (Fosse des Mariannes).
95 % des abysses restent aujourd'hui encore inexplorés. Et contrairement aux mers de surface, les grands fonds sont cartographiés avec bien moins de précision que la surface de... la Lune. On pourrait donc considérer que d'avantage d'astronautes ont exploré l'espace que de marins le fond des océans. Insondables abysses, souleurs d'Ulysses...
Cape d’invisibilité
Plus je brille, moins on me voit…
Dans l’océan, il n'y a nulle part où se cacher. Cela signifie que l'invisibilité y est primordiale pour la survie d’une espèce. Les créatures abyssales ont décrypté le mystère de l'invisibilité. Dans les couches supérieures de l'océan - la partie où la lumière pénètre - toute forme de vie qui ne parvient pas, d'une manière ou d'une autre, à se fondre dans l'eau risque d'être repérée par un prédateur - en particulier un prédateur nageant en dessous, regardant vers le haut. Pour se protéger des prédateurs, certains organismes évitent la zone lumineuse pendant la journée, ne remontant vers la surface que la nuit. Beaucoup d'autres se camouflent par leur aspect transparent. En plongée, la plupart des premières formes de vie que l'on rencontre, telles que des méduses aux escargots nageurs, sont transparentes. D’autres créatures marines, dont certains poissons, comme les sardines, camouflent leurs silhouettes par leurs flancs argentés. La couleur argentée fonctionne comme un miroir et permet à l'animal de se fondre dans son environnement en reflétant l'eau qui l'entoure.
Ensuite, plus on descend vers les abysses, plus la lumière du soleil disparaît. Le rouge est absorbé le premier. Ensuite, les parties jaune et verte du spectre disparaissent, ne laissant que le bleu. À 700 pieds de profondeur, l'océan est devenu une sorte de crépuscule perpétuel, et à 2.000 pieds, le bleu s'estompe également. Cela signifie que la majeure partie de l'océan se retrouve dans l'obscurité totale, toute la journée et toute la nuit. Alors, une autre manière de ne pas mourir de faim et de survivre dans les profondeurs abyssales, est justement de se rendre attirant pour ses proies, en produisant de la lumière... Et la rencontre avec ces animaux hors du commun devient à la fois fascinante et inquiétante : manger sans être mangé.
La mer en feu d’azur
Nous traversons la Manche de nuit, en route vers l’Angleterre à la voile. La mer est bien formée et je souffre honteusement du mal de mer. Je monte sur le pont et prends la barre pour fixer mon attention sur autre chose que mon estomac qui joue la samba. Je me souviens du compas qui devient soudainement flou sous mes yeux embués puis je m’accroche à la filière pour me soulager en donnant à manger aux poissons. C’est alors que le miracle s’opère… La mer s’illumine d’un bleu profond. Les vagues s’enflamment d’un azur brillant (aucun lien avec mon estomac ni mon repas du soir :-)). La houle scintille de la phosphorescence créée par le mouvement du voilier sur les flots. Et mon mal de mer s’essouffle, bluffé par la beauté luminescente que je découvre dans les flots.
La première rencontre avec les créatures marines lumineuses me frappe comme un coup de foudre. La splendeur de leur luminosité est irréelle, improbable. Je me demande si je rêve et si mon estomac dérangé joue sur mon esprit. Mais mon skipper me rassure et rit de mon émerveillement en m’expliquant que la présence de plancton bioluminescent est mise en lumière par le brassage de l’eau le long de la carène et dans le sillage du voilier. Magique… Un moyen parfait d’éliminer mon mal de mer. Mais ceci n’est que le dessus de l’iceberg…. Les fonds marins sont, eux, bien plus riches encore en aventures lumineuses fantastiques.
Feux follets abyssaux
"Some flash, some sparkle. Others simply glow..." (National Geographic)
Certains brillent, clignotent ou scintillent. D'autres rayonnent tout simplement. Cependant, tous relèvent du miracle de la nature. Lanternes japonaises, explosions d'étincelles, rocket ships, fumée bleue, procession de flammèches. Ces créatures nous font à la fois rêver et cauchemarder. Monstres marins ou angelets des vagues.
Les océans comptent pas moins de 4/5 des organismes vivants au monde capables de créer leur propre lumière. 76% des animaux marins sont bioluminescents, ce qui signifie qu'ils produisent leur propre lumière grâce à une série de réactions chimiques ou par l’intermédiaire de bactéries qu’ils transportent, Les mers demeurent donc un univers radieux jusqu’au plus profond de leurs gouffres et de leurs entrailles. Les créatures marines dépendent de la bioluminescence pour communiquer, trouver des proies ou encore se camoufler. Au moins 1.500 espèces de poissons sont connues pour être bioluminescentes, y compris les requins et les poissons-dragons, et les scientifiques en découvrent régulièrement de nouvelles. Parmi les plus emblématiques figurent les poissons des grands fonds comme la baudroie, dont les femelles arborent un leurre de chair rougeoyante ou une "lanterne" qui agit comme appât pour toute proie suffisamment proche (souvenez-vous de la rencontre de Dory et Nemo avec ce monstre abyssal dans "finding Nemo"). Le cténophore Leidyi (macroplancton ressemblant à une méduse mais sans dards) possède des photophores à l'intérieur de sa cloche, ou corps principal, qui réfractent la lumière, produisant un arc-en-ciel scintillant pour effrayer les prédateurs. Le requin-lanterne, le plus petit requin au monde, en est également pourvu. Certaines espèces de dinoflagellés s'allument en utilisant une réaction chimique similaire à celle des lucioles ; tous deux utilisent une molécule naturelle appelée luciférine, du nom de Lucifer ("le porteur de lumière"), en combinaison avec une enzyme, la lucifèrase, et de l'oxygène pour produire des photons lumineux. Il y a les poissons éclaireurs, les calmars, les méduses, les crevettes, les cténophores susmentionnés, plusieurs types de vers, les concombres de mer ou encore des siphonophores lumineux - de sinistres prédateurs en forme de cordes avec de longues tentacules piquantes en forme de rideaux. Certains sortent tout droit d'un film d'horreur. Et pourtant ces créatures sont fascinantes par leurs propriétés. Chaque espèce reflète un motif lumineux spécifique, une sorte d’identité unique leur permettant d’attirer et de trouver des partenaires dans les profondeurs sombres de l'océan. Les organismes bioluminescents ne tolèrent pas un taux bas de salinité de l’eau et sont ainsi très rarement présents en eaux douces. (Source : National Geographic)
© Photos – Stories undersea - National geographic - LeLombrik.net
Certaines autres créatures s'illuminent lorsqu'on les touche ou lorsque l'eau à proximité est perturbée. Un éclat soudain de lumière peut en effet effrayer un prédateur, donnant à la proie une chance de s'échapper. Un calmar des profondeurs, par exemple, peut émettre un gros jet de lumière avant de s'élancer dans l'obscurité. Les fameux "bombardiers verts" (Swima bombiviridis), sortes de vers marins, peuvent lancer leurs grenades lumineuses, puis s'enfuir dans l'obscurité tandis que leur prédateur est brièvement distrait par la lumière. Camouflage assuré.
D'autres encore, utilisent le principe de "l'ennemi de mon ennemi est mon ami" en émettant de la lumière pour attirer le prédateur du prédateur. Ce mécanisme de défense est connu sous le nom d'effet "alarme anti-vol". Ce type de méthode peut être particulièrement important pour les formes de vie minuscules incapables de nager rapidement. Leurs flashs attirent ainsi des poissons en attente dans les parages. Une fois illuminés par le flash, ces derniers deviennent eux-mêmes plus aisément repérables par les prédateurs. Et le tour est joué...
© Photos – Wikipedia - Bioxegy
Je vous invite à visionner deux documentaires de National Geographic à propos de ces étranges créatures... Il vous emmènera dans un monde parallèle et pourtant bien réel. La nature est magnifique et n'en finit jamais de nous émerveiller. Une raison de plus de la protéger.
Je vous souhaite un dimanche scintillant à souhait.
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August 2023
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