Les prédicateurs du ciel les ont nommés Irma, Katrina ou encore Sandy. Ils sont tous passés en laissant leurs traces indélébiles, leurs cicatrices, leurs vides. Et leurs chances aussi. Et la vie a repris. Différemment, mais avec tout autant de force et d’espoir de continuer. Tout comme un volcan dessine ses langues noires, il crée aussi ainsi un terrain fertile pour que la vie reprenne de plus belle après une longue et lente convalescence. Un petit billet en l’honneur de cet espoir-là, celui de la reconstruction après la tempête.
Les cinq derniers mois ont été orageux, tempétueux, voire jusqu’à même cycloniques à certains stades. De lames de fond en écueils. De marées en vagues scélérates. De courants contraires en tsunamis inattendus. Une traversée au départ supposée être un rond dans l’eau, qui s’est transformée en odyssée au long cours contre vents et tempêtes.
Une vieille tradition familiale a voulu que je donne des noms à des objets ou des animaux. Pas un habitant de mon jardin ni des quelques babioles trônant sur les meubles n’y ont coupé. Les météorologues en font autant avec les ouragans. J’en ferai donc de même pour les diverses tempêtes qui se sont mises sans vergogne et à maintes reprises sur notre route depuis plus de dix ans.
“Le bateau qui ne résiste pas à la première tempête n'est pas fait pour le voyage.” (Moses Isegawa, Chroniques abyssiniennes)
Tout d’abord, il y a eu Jérôme, il y a dix ans.
Petit mais costaud et surtout très pressé d’avancer. Et pour repousser ce premier cyclone-crabe, on a fait appel aux fameuses Tuniques Vertes, qui lui ont radicalement coupé la route. Pour enrayer sa course, on l’a bombardé de rayons (pas verts ceux-là), de nuages chimiques et de larges coupes dans ses nuages les plus bas. Ces premiers ont non seulement fait décamper Jérôme, mais ils ont aussi, par mégarde, endommagé la plomberie de Norbert, le moteur de notre voilier. Tous ses pauvres tuyaux en étaient rapetissés. L’eau de refroidissement ne passait plus et le pauvre moteur toussotait et souffrottait sans cesse. Pour continuer à faire progresser le voilier malgré tout, emplâtres, interventions et réparations dans les profondeurs de ses entrailles se sont succédées tous les trois mois des années durant. Jusqu’au jour où une Tunique Verte plus savante et plus audacieuse que les autres a décidé d’amputer Norbert d’une partie de sa structure pour résoudre son souci de tuyauterie une bonne fois pour toute. C’était là une entreprise risquée et le voilier a bien failli sombrer durant l’intervention. Cependant, l’opération s’est révélée un succès fin 2015. En ont suivi quelques années de sursis. "Et dans la tempête et le bruit, la clarté reparaît grandie...” (Victor Hugo)
Et puis, en avril cet année est apparu Pacôme, un nouveau cyclone-crabe sur notre route...
Contre toute attente, (on pensait que Pacôme était du genre pacifique), le nouvel arrrivant a révélé sa vraie nature après deux semaines de séjour clandestin au-dessus de nos têtes. Toutefois, ses intentions étaient loin d’être aussi innocentes qu’il ne l’avait d’abord laissé croire... Le nuage-surprise. Et la décision de renvoyer ce passager clandestin dans son pays d’origine fut des plus pénibles à prendre. Et s’il n’allait pas tenter de poursuivre son périple plus loin ? Et s’il avait déjà repris la route ? Et si on attendait tout simplement qu’il reparte... Surtout que la solution pour l’extrader semblait lourde, radicale et surtout très risquée, sans garantie de succès. Dilemme. De plus, il fallait faire appel à de nouveaux météorologues en tunique verte pour y parvenir, Seront-ils suffisamment armés contre ce géant ? Pourrons-ils épargner le voilier durant l’intervention ? Décision particulièrement délicate.
© Photos – Rêvesdemarins
Enfin, le skipper prend son courage à deux mains et décide de faire éliminer Pacôme de sa trajectoire. Pour ce faire, il rappelle les Tuniques Vertes à la rescousse qui ont jadis débarrassé Norbert de son souci de tuyauterie. Et on croise les doigts... Y compris tous les doigts de pieds !
Après pas moins de onze heures de travail acharné en milieu stérile, nos météorologues de vert vêtus, parviennent enfin à repousser le cyclone malvenu et à le renvoyer vers d’autres cieux pour ses infâmes activités célestes. Une prouesse scientifique. Des nuits sans sommeil. Des semaines de délire. Des mois de folie. Des efforts à la limite de l'épuisement. Le look zombie avant Halloween. Tout cela pour une bonne cause.
Notre voilier en ressort, chamboulé et épuisé, mais sain et sauf, vers des eaux plus sereines. Il va pouvoir continuer sa route. Plus doucement, plus lentement, avec plus d'escales et moins sportivement qu'avant. Mais, son voyage peut se poursuivre.... Moins loin, moins audacieux, mais il ne s'arrêtera pas là.
Nous avons encore tellement de choses à voir, de destinations à atteindre, de bords à tirer. Moins souvent, moins longtemps et plus calmement. Mais peu importe, le voilier a tenu bon.
Toute ma reconnaissance aux Tuniques Vertes (et blanches de St Luc), dont le savoir-faire, la fibre humaine et le sens du service ont été fabuleux. Un tout grand merci à ma famille et à mes amis, proches ou moins proches, collègues, clients ou relations pour leur soutien admirable dans cette odyssée contre ce nouveau cyclone. Vous êtes formidables. J'ai beaucoup de chance.
Je vous souhaite un excellent dimanche, ensoleillé et sans cyclones.
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Dans les bars des ports, les vieux loups de mer se plaisent à conter des légendes marines. Ils y parlent ainsi quelquefois d'un mystérieux enchanteur au fond des abysses, ayant le pouvoir de métamorphoser les gens de mer passant à leur portée, en rochers ou encore en créatures marines les plus diverses. Et dans leurs récits les plus fous, certains vont jusqu'à affirmer qu'ils ont vu des marins se transformer inopinément en... escargots de mer.
Rien ne sert de courir, il faut partir à point
Vous savez, ce petit mollusque qui porte sa maison sur son dos... Celui qui avance plus lentement qu'une tortue (et particulièrement en mer). Celui qui met des heures à se déplacer de quelques centimètres ou à sortir sa tête de sa coquille. Celui pour qui le moindre effort coûte une tonne d'énergie. Celui pour qui les heures semblent des jours et les nuits semblent interminables. Celui qui se traîne péniblement d'un point à l'autre et doit rester immobile durant de longs moments parce que son corps ne le porte plus ou le fait péniblement souffrir. Celui pour qui chaque mouvement demande une concentration et un labeur de titan. Celui qui endure le moindre souffle comme une gifle, ou l'animation autour de lui comme un banc de thons qui l'assaille. Celui qui ne trouve plus même la force de parler ou d'écouter et qui se protège dans un mutisme réconfortant. Un petit être qui semble tout à coup porter les septs mers de ce monde sur son dos.
"La patience est une médecine de la vie... " (Proverbe allemand)
Une créature fragile, mais admirable pourtant malgré son air engourdi, chétif et traînard. D'ailleurs sous ses airs de fossile, il porte souvent des teintes et des formes surprenantes. Sous son armure nacrée se terre un être courageux et tenace. Il n'abandonne pas face aux rochers, aux vagues, ou aux courants marins. Et en présence de prédateurs, il se pelotonne prudemment dans sa carapace. Pas à pas, centimètre par centimètre, il gagne du terrain et se rapproche de son but. Et pour y parvenir, il rassemble toute son endurance et sa persévérance. Une créature qui mérite un grand respect.
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"Festina Lente, Hâte-toi lentement... " (Adage latin)
Lorsqu'un marin a subi telle métamorphose, il pense devenir fou. Il ne sait plus comment se mettre, il voudrait sortir de ce nouveau corps qui n'est pas le sien et qui lui semble si pesant à porter malgré son poids plume. Il se sent minable et tellement vulnérable, alors qu'en fait il possède en lui d'énormes capacités de survie. Il s'imagine déjà emporté par le courant, atterrissant dans les pinces d'un crabe affamé ou d'une étoile de mer vorace. Il déteste son nouvel aspect. Il a l'impression d'avoir cent ans. Il voudrait se réveiller en se disant que ce n'est q'un mauvais rêve et qu'il retrouvera son physique d'antan en réouvrant les yeux.. Hélas, le sortilège prend toujours du temps à se résorber... Souvent beaucoup de temps... Parfois même énormément de temps...
Malfoy, le Crabe Fantôme
Un sortilège sorti tout droit du chaudron infernal de Malfoy, le crabe fantôme : un pernicieux sorcier invisible aux terrifiants pouvoirs. On ne sait jamais lorsqu'il va frapper de ses sorts. Il attaque souvent par derrière, au moment où l'on s'y attend le moins. Alors, pour combattre ses maléfices, on aura souvent recours à diverses incantations et potions magiques. Et à force de patience, de courage, de volonté, de mues et transfigurations successives, le petit escargot de mer retrouvera peu à peu sa forme humaine.
Debout les crabes, la mer monte !
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Alors, si comme moi, vous croyez aux récits de ces vieux loups de mer, vous verrez que le temps fera son travail pour les petits escargots de mer jusqu'à en refaire de solides marins.
Un excellent dimanche, aux escargots et aux autres.
Il y a deux ans, un marin au profil hors des sentiers battus, rencontré dans le cadre de mes activités à l'hôpital, me contait encore avec passion comment son rêve nautique avait dû prendre une pause à cause de la maladie. Un an et demi plus tard, Guy nous a quitté. Cependant, son rêve vit toujours... en nous et en moi. Et je compte bien le poursuivre avec ceux qui voudront encore y croire. L'occasion d'un billet pour le partager avec vous. (© Extrait de l'article publié dans Yachting Sud nr 952)
Dessine-moi un bateau, s’il te plaît, quémande l’enfant… Le Maître d’école trace quelques courbes sur le papier blanc et commence l’ébauche de ce qui deviendra un projet de vie…
Un instituteur, passionné de mer et de navires. Avide d’un monde meilleur, de liberté et surtout d’une existence plus en harmonie avec la nature profonde de l’homme, loin de notre monde de surconsommation, de plaisirs frivoles et d’enchaînements sociaux. Un homme proche de lui-même. Libre et autonome, simple. Un capitaine courage sans les galons. Un navigateur au long cours sans les généreux mécènes. Un skipper de régate sans les trophées. Simplement un marin. Un vrai.
Vaisseau d'Argent pour Rêve en Or
Il y a plus de treize ans, Guy avait imaginé un navire d’argent, pour parcourir les mers et emmener des jeunes en quête d’un avenir où ils pourraient enfin laisser parler leur véritable nature, face aux éléments et au dépouillement d’une existence en mer où l’on ne triche pas. Un projet : la construction du Voilier Pollen, pour « essaimer » à ces jeunes le courage de vivre leurs rêves à travers la voile en haute mer.
« Construire un bateau et voyager, ce fut d’abord un rêve d’enfant, ce rêve que tout le monde fait. A l’adolescence, il fut la réponse banale au manque de motivation ressenti face au moule dans lequel on tentait de me couler. Ce rêve était une échappatoire mais donnait néanmoins un sens à mes actions. Mes premières navigations furent l'occasion d'une première découverte : le bateau et sa lenteur me permettaient de vivre pleinement l'instant présent. » (Guy B.)
© Photos - Projet Voilier Pollen
Au départ, quelques croquis sur une table et de nombreuses discussions avec des amis de métier, dont un architecte naval. Les dessins se transforment ensuite en maquettes de carton, puis en technologie informatique 3D. Et le rêve commence à prendre forme. Après quelques années de cours du soir en soudure, le marin autodidacte se lance dans l’aventure durant son temps libre. Une entreprise qui se promet de longue haleine… Des tôles d’aluminium épais pour une coque, du matériel de soudure, des milliers d’heures de patience, des jours de méticulosité sans faille et une bonne dose de dérision de soi. Les voisins le voient un peu comme un original, mais le jour où son œuvre prend forme, ils restent ébahis du résultat de son travail : une coque argentée a pris naissance au milieu des vergers et des champs brabançons.
Autodidacte jusqu'au Bout des Voiles
Et la création se poursuit au milieu d’une ancienne fonderie devenue hangar agricole, ensuite reconvertie en chantier naval. En plus de son solide bagage de navigateur (géographie, orthodromie, météorologie, géométrie, astronomie, arithmétique, mécanique…), Guy fait partie de cette race d’hommes assoiffés d’apprendre. Le travail de conception et de construction d’un voilier requiert du savoir dans un nombre fastidieux de disciplines aussi variées que techniques : mathématiques, trigonométrie, machinerie, électricité, architecture, métallurgie, soudure, chimie, voilerie, et tant d’autres. La difficulté ne le décourage pas : au contraire, le défi motive le marin autodidacte. Il ne cesse de peaufiner son expertise dans chacun des domaines concernés. Chaque pièce, chaque courbe naît de ses mains : boîtes dorades (aérateurs), aileron d’étambot, bulbes de lest, coulée de gueuses, barrots de pont, safrans, coffres de cockpit, capot de descente, couronnes de hublots, régulateurs d’allure, accastillage, listons, roof, bossage, haubanage… Fusion, soudure, charpenterie, chaudronnerie, électricité, ferronnerie, rien n’est laissé au hasard.
Va sans dire, que l’ouvrage passe par des phases d’apprentissage, des erreurs et des corrections, comme tout bâtisseur en herbe. Une coque rentrée littéralement au chausse-pied dans son hangar agricole (en descellant quelques briques pour qu’il passe sous le linteau). Des plans et des projets revus vingt fois au fur et à mesure que le créateur échange des idées avec des professionnels du métier : un autre type de voile, une autre longueur de mât, mono-quille ou bi-quilles latérales lestées, gréement cotre avec ou sans bout-dehors… Tant de questions auxquelles Guy choisit toujours la solution la plus adaptée. Dix mètres de courage, d’inventivité et de ténacité. Sept tonnes de ferraille, de passion et de volonté infaillible d’un constructeur naval amateur prêt à tout pour concrétiser le rêve d’une vie.
© Photos - Projet Voilier Pollen
Un Projet qui a largué les Amarres
Il m'attend dans son hangar... Peu m'importent mes chances. Peu m'importe le temps, ou ma désespérance, mais mon cœur serait tranquille. » (Guy B.)
Et puis frappe la maladie, implacable et fatidique, mais sans parvenir à dominer le rêve, juste à le ralentir… Et le songe se poursuit, moins souvent, moins intensément, mais sans jamais se faner. Les années passent. La coque est prête, les plans sont dessinés, le choix des voiles établi. Et c’est là que le destin décide de mettre le rêve en berme… En novembre 2017, le Pollen perd son père et capitaine avant d’avoir pu goûter à la mer…
Cependant, le rêve du Voilier Pollen continuera. Il a également pour objectif la création de reportages sur d’autres cultures, modes de pensée et arts de vivre différents sur notre planète, dans un souci pédagogique d’ouverture au monde, d’appel à l’acceptation de l’autre et à la tolérance. « (…) Le Pollen naviguera à la rencontre et à la découverte de ceux-ci… Nous tenterons alors de montrer au travers de reportages que cette "autrement" fleurit et qu'il est prometteur d'avenir et d'espoir. D’escale en escale, d'école en école, ces reportages seront présentés à d’autres, enfants et adultes, et une dynamique d’échange sera initiée. Concrètement, les voyages du Pollen se feront par bonds successifs avec des retours au pays consacrés aux témoignages et à la préparation du prochain voyage. Le premier voyage verra certainement le Pollen en Méditerranée, berceau de notre civilisation. (…) » (Guy B.)
© Photos - Projet Voilier Pollen
Bon vent, capitaine… Bon vent. Ton projet a largué les amarres et il arrivera à bon port. Tes équipiers qui restent à quai derrière toi, croient aujourd’hui fermement au rêve du Pollen et t’ont promis de le mener à bien pour qu’il passe de l’espoir à la réalité. Tu peux compter sur ton équipage pour tenir parole.
Quelques treize ans après son lancement, ce projet peut encore se matérialiser en souvenir de son skipper. Après de longs mois de recherches, un chantier naval semblerait en effet enfin être ouvert à la finition de l'ouvrage. Bien entendu, il faudra encore quelques années de travail et de sueur, avec ceux que fait vibrer la philosophie de la mission du Pollen, avec ceux qui souhaitent participer, poursuivre ou tout simplement encourager une incroyable aventure digne d’attention. www.facebook.com/Projet-Pollen
Si vous êtes de ceux-là, l’équipe du Pollen, dont je fais partie, n’attend plus que vous. Un excellent dimanche à tous.
Hercule, toi qui n'a jamais reculé devant rien. Toi qui a défié les Dieux belliqueux. Toi, qui leur a prouvé ta force et ton courage. Je te dédie ce billet.
Hercule, Coeur de Lion
Hercule, Héraklès... Tu as voyagé durant des années dans des contrées hostiles, jusqu'en Enfer et jusqu'au domaine d'Hadès dont tu es revenu épuisé, mais triomphal.
Au cours de tes pérégrinations, les Dieux t'ont confronté à des obstacles sans précédent et des travaux dont personne ne pensait qu'il était possible de réaliser. Et pourtant... Tu l'as fait. Durant dix longues années, à chaque tâche accomplie, surgissait de nulle part alors une autre, imprévue, insaisissable, implacable, souvent plus pénible que la précédente. Et parfois, la même tâche se défaisait, te demandant de recommencer ton labeur, de repasser par les mêmes dangers, les mêmes embûches, inlassablement... Et sans relâche, sans te décourager ni baisser les bras, à chaque coup de théâtre du Sort, tu as repris tes efforts, tu as repris ton bâton de pèlerin pour affronter les guets-apens qu'il avait placés sur ta route.
A chaque épreuve, tu as dû te contenter des armes que l'on voulait bien te procurer. Des moyens de défense pas toujours efficaces ni aisés à manier. Des potions revigorantes pour te rendre des forces. Des boucliers maniés par d'autres et à qui tu as dû faire confiance pour ta défense. Et souvent, c'est à la force des poings et de l'esprit que tu as résisté.
Tu en as des cicatrices, des bleus, des bosses et des morceaux en moins. Ton corps en est empli. Il en a supporté des blessures, des entailles et des morsures de tes ennemis. Et si ton image de lutteur a quelque peu changé au cours de tes affrontements, ton tempérament a toujours su surmonter la tentation d'abdiquer face à l'adversaire. Ni les lions affamés, monstrueuses hydres, serpents, sangliers, taureaux ou juments sauvages, ni féroces cerbères, terrifiants centaures ou ni même les sanguinaires Amazones ne sont parvenus à te faire mettre genou à terre. Tous ont dû se plier à ta force et ta résilience.
Le Treizième Travail
Douze Travaux de Titan. Et tout ceux additionnels que l'Histoire ne narre pas. Et tu espérais enfin prendre un repos bien mérité, sans luttes ni batailles après tant de servitude.
Mais, voilà, les Dieux en ont décidé autrement. Et voici qu'ils te défient à nouveau, pour une treizième fois. Et tu te retrouves aujourd'hui face à face avec un autre crabe invisible, de l'immonde sorte de celle qui t'avait assailli il y a dix ans déjà, mais que tu avais vaincu haut la main. Dix ans où tu avais pu bénéficier d'une rémission hors de vue de ce monstre sans visage. Dix ans, avec d'autres combats, mais quelque peu moins instrusifs que celui que te lance aujourd'hui cette petite créature ignoble et insaisissable, renaissant ainsi de ses cendres, contre toute attente. (...) "I'll be there someday, I can go the distance
Je refuse de céder à la superstition. Et le treizième travail sera ta chance. Celui-ci également, tu en viendras à bout ! Tu va lui flanquer une bonne raclée à cette sale bête et la faire disparaître pour de bon ! Une fois de plus, tu ne seras pas seul pour y parvenir. Il te faudra une fois de plus de la patience, du courage et de la persévérance. Mais je sais que tu les trouveras le moment nécessaire pour surmonter ce nouvel ouvrage. Et nous fêterons ensemble ta victoire héroïque !
Parce les Héros n'existent pas uniquement dans la mythologie... Ils sont là, près de nous, chaque jour. Il faut juste savoir les reconnaître.
Prenez bien soin de vous. Un excellent dimanche à tous.
Une large barbe blanche. Des cheveux parsemés d’argent, animés de boucles rebelles. Des yeux clairs, vifs. Un regard qui pénètre. Un physique imposant. Une redingote sombre. Un gilet couleur d’ardoise. Sur sa chemise immaculée, un fier nœud papillon.
Jules regarde par la fenêtre. Le vent s’est levé sur la petite ville du Crotoy. Sur la table près de la fenêtre à croisillons, une lampe à huile et des plumes à écrire. Un manuscrit de pages jaunies gît ouvert sur le bois foncé. Quelques lignes imprimées à l’encre noire, garnies de ratures. La bise du soir qui tombe mugit contre les volets de chêne. Comme une plainte, une lamentation qui n’en finit pas. Il repense à sa ville natale, Nantes et son port où il a passé sa tendre enfance. L’eau, les rivières et la mer font partie de lui. Il a fait l’acquisition d’un petit navire – le Saint Michel, avec lequel il va faire des tours d’Europe. Au loin, l’homme peut imaginer le murmure de l’eau qui se retire doucement de la baie sous le soleil couchant. Le jusant… Fort et insaisissable à cet endroit. L’eau. Un élément qui l’attire et l’intrigue. Une force de la nature renfermant des trésors et des dangers indescriptibles. Et si… Pas si indescriptibles que cela, se dit l’homme. Et il se remet à sa table. L’inspiration arrive. Soudain, elle coule à flots. Elle le submerge. Et les pages jaunies se remplissent soudain avec la rapidité d’un torrent qui dévale une montagne. Jules vient d’entamer l’écriture du second volume de ses « Voyages Extraordinaires », débuté six années plus tôt. Les aventures du Capitaine Nemo et de son sous-marin deviendront une des plus grands références littéraires de romans d’aventure.
A la Recherche de Nemo
La presse regorge de récits quant à un monstre marin géant à la force titanesque qui aurait causé une série de naufrages dans plusieurs mers du globe. Une grande chasse est alors organisée pour débarasser les océans de cette créature monstrueuse. Un navire américain – l’Abraham Lincoln - est affrété pour se mettre en expédition. Après des mois de recherches et une collision frontale entre le navire et le monstre, quelques marins sont projetés par-dessus bord et faits prisonniers du monstre, qui n’est en réalité qu’un sous-marin en acier – le Nautilus, dirigé par un capitaine pas comme les autres : Nemo.
Nemo en veut à la planète toute entière. Il a choisi le monde sous-marin pour nouvelle patrie. Il emmène les prisonniers découvrir son monde. Ils partent ainsi à la rencontre de merveilles englouties au fond de l’océan et de créatures de cauchemar, telles que des calmars géants (qui sait, la progéniture du fameux « Kraken » ? ). "Ce ne sont pas de nouveaux continents qu'il faut à la terre, mais de nouveaux hommes ! " (Vingt Mille Lieues sous les Mers, Jules Verne, 1870)
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Visionnaire
S'il était visionnaire sur les découvertes scientifiques qui allaient révolutionner le monde des années plus tard, Jules l'était également en ce qui concerne l'environnement et les terribles dangers qui le guetteraient à notre époque... J'aimerais qu'il se soit trompé à ce propos... Hélas...
"Cependant, le capitaine avait raison. L'acharnement barbare et inconsidéré des pêcheurs fera disparaître un jour la dernière baleine de l'Océan. " (Vingt Mille Lieues sous les Mers, Jules Verne, 1870)
Le Jusant
Le soleil brille au bord de l’horizon. Il fait scintiller le sable à marée basse. Durant la journée, cette immense plage se transforme en mer où bateaux de pêche et amoureux des vagues se baladent gaiement. Un peu comme le Mont St Michel, la baie du Crotoy change de paysage deux fois par jour, totalement. On se croirait à un autre endroit. Les marées sont puissantes et envahissent toute la superficie qui borde les maisons aux couleurs et parfums de mer. Même les prés où broutent tranquillement les moutons ont ici un goût de sel. L'océan n'est pas loin... L'endroit parfait pour l'inspiration d'un roman sur la mer.
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"Marin" rime avec "Train" à Saint-Valéry
Un peu plus loin dans la baie : Saint-Valéry sur Somme. Une charmante bourgade médiévale. La pucelle de Rouens y aurait été emprisonnée brièvement. L'idéal pour y bourlinguer un dimanche matin ensoleillé le long de l'eau. Malgré ses touristes, l'endroit y reste attrayant. Le train à vapeur qui relie les ports de la baie semble tout droit sortir d'un roman de Jules... Les ruelles colorées y portent la marque de la mer. Aucun portique sans son caractère nautique. Tout pour me plaire...
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Envole-Moi
Enfin, Le Crotoy, c'est aussi la première école de pilotage au monde. Un peu comme pour faire hommage à Jules... En 1910, les frères Gaston et René Caudron se lancent comme pionniers de l'aviation et créent la première école de vol avec des traversées Le Crotoy - Le Touquet. Ils sont également à l'origine du premier hydravion.
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C’est ce WE l’anniversaire d’une amie chère, américaine vivant en France, qui m’a fait découvrir l’année passée ce très bel endroit de baie de Somme qu’est Le Crotoy et sa région. Alors, ce billet est pour toi, chère D.
Je vous souhaite tous un excellent dimanche. Et peut-être l’occasion de planifier un voyage dans la région où Jules a écrit ce merveilleux roman, ou encore de lire (ou de relire) cet ouvrage très en avance sur son temps.
"Loin des yeux loin du coeur... " déclare l'adage. Et pourtant, je revendique haut et fort que cette expression est inexacte. Les femmes de marins qui partent de longs mois en mer, en oublient-elles pour la cause leur bien-aimé ? Les marins en mer se détachent-ils pour autant des leurs qu'ils laissent à terre ? Je ne crois pas. Alors prenons le temps d'un billet pour étayer cette conviction.
Les marins font partie de cette race d'hommes qu'on ne peut tenir en laisse, qu'on ne peut garder près de soi chaque jour. Ils ont besoin de liberté, d'aventure, d'espace et de mer. Être femme de marin demande du caractère, de l'indépendance et de la patience. Et de l'amour, du vrai.
Lorsqu'ils larguent les amarres, leurs mondes se déchirent un peu, mais pas assez que pour les séparer. Les femmes de pêcheurs resteront sans nouvelles durant de longues nuits, de longs mois parfois. Certaines, qui auront plus de chance, savent qu'elles pourront exceptionnellement communiquer via la radio locale. Lorsqu'ils reviendront, ils ne resteront parfois que quelques nuits, quelques jours. Le temps de revoir, de faire ou de refaire un enfant. Le temps d'aller échanger leurs récits de navigation au café avec d'autres marins. Le temps d'aller embrasser leur femme puis de repartir au large. Souvent, elles gèrent seules le ménage, le travail, la famille et la vie tout court. Parfois même, elles donnent la vie en l'absence du père parti sur l'océan. La synchronisation des agendas de la mer et de la nature à terre n'étant pas toujours possible. Elles ont appris, à la dure, il est vrai, à apprivoiser l'absence, le silence et la distance. Elles savent que, si la providence le veut, leur homme leur reviendra. Pas de reproches, juste le manque, l'attente et l'espoir de leur retour. Les femmes de marins sont fortes et tenaces. Elles ont la capacité d'endurer beaucoup, à commencer par la crainte pour leur homme par gros temps. Un exemple de vie qui donne à réfléchir. "(...) Dat ze je graag ziet, weet je maar op het moment dat je vertrekt (...)" (Vissersvrouwen, Katrien Vervaele)
L'amitié ne se mesure pas en fréquence, mais en longévité...
Que de personnes à qui je pense très fréquemment, mais à qui je ne parle que trop rarement et dont je ne croise pas, plus ou que trop peu la route. Trop peu de temps, trop d'autres activités et obligations, trop peu d'efforts, trop compliqué. Et pourtant... Et ni les réseaux sociaux, ni internet ne peuvent réellement remplacer le manque. Il peut juste l'atténuer et laisser entendre qu'on ne les oublie pas à travers les bonnes intentions. Cependant, la vie n'est pas toujours simple. L'amour et l'amitié véritables ne se comptent pas en nombre de messages, visites, repas, fêtes ou coups de fil. Ils se comptent en présence dans les moments critiques, en intensité et surtout en longévité. Peu importe de ne plus s'être vus durant des années tant que les retrouvailles demeurent comme si c'était hier et que le sentiment d'intimité reste préservé.
Lorsqu'en automne, je voyais passer un vol d'oies sauvages en partance pour le Grand Sud, toujours mon coeur se serrait. Cette vision m'émeuvait toujours. Et aujourd'hui plus que jamais. Je ne savais pas pourquoi. A présent, je sais... Elles s'envolent, pour toujours retourner, plus tard. Fidèles aux saisons et à leurs transhumances. Elles partent pour mieux revenir.
© Photos – Rêvesdemarins
Contrairement aux anciennes traditions dans les familles, la mienne a toujours été un peu en marge des standards classiques en matière de distances. Ma famille proche a vécu à l'étranger et s'est régulièrement installée aux quatre coins de la planète, à une époque, où cela était encore assez hors normes. Les réunions de familles étaient donc parfois compliquées à organiser (et le restent aujourd'hui d'ailleurs), mais n'en rendaient les retrouvailles que d'autant plus cordiales. En lieu de fréquence, il y avait toujours une intensité bien plus profonde que si nous nous voyions tous les deux mois ou toutes les semaines. Et je chéris cette profondeur bien plus que le nombre de fois où j'ai revu mes proches.
Aujourd'hui, c'est l'anniversaire de mon grand frère, que je ne vois que de temps en temps. Lui, vivant à Milan depuis des années et moi 1.000 km plus au Nord. Avec une vie bien remplie, des modes de vie radicalement différents, des obligations et des agendas qui ne coïncident que très rarement. Aujourd'hui, notre grand-père (de son surnom "Monseigneur"), à qui ce blog est dédié, aurait, lui également, fêté un nouveau printemps. Son 105e exactement. Et je sais qu'il aurait été le premier à revendiquer avec moi ce postulat personnel qui affirme que...
Loin des Yeux, Près du Coeur...
Alors, frérot et Monseigneur, un très joyeux anniversaire ! Quoiqu'on puisse penser, vous êtes tout près de nous !
Alors, peu importe la distance et le temps qui nous séparent, je vous souhaite à tous un excellent week end !
Ce dernier lundi a emporté une grande dame pour son tout dernier voyage. Qu’on aime ou non ses créations, sa voix unique ne pouvait laisser indifférent. Alors, je t’offre ce petit billet, chère Claudine. Tous ces rêves que tu as éveillé en nous à travers tes notes et qui continueront à nous faire vibrer après ton départ.
Du blues jazzy aux préludes de Bach en passant par les comédies musicales, les grands classiques de la chanson française et les musiques ethniques. Un cœur ouvert aux belles choses et aux belles causes. Une voix profonde, troublante, faite d’émotions et de sensibilité. Une artiste pleine d’humilité et de virtuosité. Une musicienne comme on n’en fait plus.
Toi la Mama pas comme les autres, toi la femme différente, surtout lorsque tu chantais. Toi, la Marie-Jeanne partie trop tôt. Toi, celle dont jamais le timbre ne cassait et qui avais décidé de poursuivre ta passion même après que ta vie dévie vers ton mal, au lieu de renoncer et de te rouler en boule. Toi qui avais toujours la pêche même lorsque les autres avaient tout faux. Toi qui avais tout pour une seule femme, non pas trop forte mais bien sereine dans tes nuits d'encre et dont jamais la promesse ne pouvait mentir. Toi, qui nous avais rassemblés les uns contre les autres, des millions de fois autour de la magie de tes mélodies. Toi qui nous as fait une sacrée fleur en nous offrant ta passion pour les notes et en nous faisant boire dans ton même rêve, toujours amie, jamais ennemie. Toi qui nous a fait frémir d'émotion, tant c'était bon. Toi et ton imagination sans pareil pour faire danser les salles et éclore les rimes au clair de ta plume. Ton humour et ta dérision désopilants dans tes chansons : celles pour les autruches ou pour les taupes, sans oublier ton mémorable concerto pour ton Arnould, qui partageait ta vie musicale et ton art depuis toutes ces années. Toi et lui étiez faits l'un pour l'autre... Quelque part, ton fidèle pianiste, lui aussi, était ton autre...
J'tai pas tout dit encore. Mais tous les mots ne suffiraient pas à te rendre hommage. Il y a tant d'amour qui se perd maintenant que tu es partie et que tu es rentrée chez toi. Peu importe ce que les médias raconteront à ton propos. Peu importe les bruits de couloirs quant à ta vie. Pour moi, c'est ta voix à la tessiture unique et chaleureuse qui restera dans mes souvenirs. L'interprète toujours aussi généreuse dans tes soleils autant que dans tes orages.
Tu t'es envolée cette semaine pour ton Dernier Voyage. Qu'il te soit doux, très doux, chère Maurane.
Ce sera comme un dernier voyage. Un changement de paysage, ensemble. Ce sera notre dernière odeur. On se sent proche de cet amour qui meurt. Et sans éloigner nos visages. Sans se détourner des images. Ne pas rayer les souvenirs. Ce sera comme un dernier désir ensemble. Inutile de s'aimer sans se voir. Inutile d'avancer dans le noir. C'est la fin de notre histoire...
Ce sera comme s'aimer davantage. Avoir le temps et une page en plus. Ce sera plonger dans la rivière. Naviguer loin en plein hiver, en plein hiver. Et sans oublier qu'on se quitte. Que notre amour a ses limites. Ne pas se blesser le sourire. Ce sera difficile à tenir, ensemble. Inutile de s'aimer sans se voir. Inutile d'avancer dans le noir. Impossible de donner sans recevoir. Dans nos yeux les étoiles sont trop rares. C'est la fin de notre histoire...
L'occasion de découvrir une grande artiste (belge de surcroît), ce WE. Bon dimanche à tous.
"Mer des Sargasses" : zone de l'Océan Atlantique Nord, découverte par Christophe Colomb, tenant son nom des algues dites Sargassum, qui ont la particularité d'y flotter, et de s'y accumuler en surface. Le mot même de « Sargasse » vient du mot italien "Sargazzo" qui signifie varech.
La Mer des Sargasses est une zone calme, sans vent ni vagues. Les navires de Colomb naviguèrent ainsi parmi ces herbes qui ralentissaient leur progression durant trois semaines à la vitesse d'un escargot de mer et leur donnant le sentiment qu'ils n'en sortiraient jamais... Malgré la prolifération de ses algues, cette mer est souvent considérée comme sans vie, car très salée et au milieu pauvre (notamment en chlorophylle) sous sa surface.
Plasticsphère
Dans cette étendue nommée "Jungle flottante" ou encore "Désert flottant", a été découvert en 2010 un tourbillon de déchets, portés par les eaux depuis les rivages de l'Europe et de l'Amérique. Sous l'effet de la force de Coriolis, trois courants y font converger les détritus flottants, transformant l'endroit en une imbuvable "soupe" de plastique. Un septième continent plastique d'une taille plus grande que la France... Il existe cinq gyres de pollution au monde où s'agglutinent les déchets. La Mer des Sargasses en est une. Selon la fondation Ellen Mc Arthur, il flotterait plus de 150 millions de tonnes de détritus plastiques dans nos océans et ce chiffre pourrait bien doubler d'ici à 2050. Cela signifierait que nos mers contiendraient plus de plastique que de poissons !
La fondation Ellen Mc Arthur milite en faveur d'une transition vers une économie circulaire qui recyclerait un maximum de matières, à commencer par le plastique. Et je ne peux que lui donner raison... Mais les habitudes ont la vie dure. Et modifier les comportements sociétaux sans que le consommateur n'aie à fournir d'efforts financiers, économiques ou de facilité comporte un défi de taille. Sans parler du lobby des fabricants de plastique ou encore des enjeux politiques. Le premier forum sur l'Economie circulaire (WFCE) a d'ailleurs eu lieu en juin de cette année en Finlande. Plus de 1.500 experts s'y sont réunis pour y débattre des problématiques et tenter de trouver ensemble une ébauche de solution. Notamment, un premier pas vers la disparition des sacs plastiques, à travers leur taxation ou leur recyclage. Certains pays ont d'ailleurs déjà pris des mesures dans ce sens (France, Mauritanie, Mali, Haïti, Danemark, Bengladesh, Italie... ). Chacun d'entre nous peut ajouter sa petite pierre à l'édifice vers des océans plus bleus et l'éradication progressive de zones de pollution. Bien entendu, il s'agit là d'un exercice global et où tous les acteurs mondiaux ont un rôle à jouer, à commencer par les plus gros pollueurs. Mais, tout effort, même minime, en vaut la peine. Alors, la prochaine fois que vous allez faire vos emplettes, si cela ne fait pas encore partie de votre rituel, n'oubliez pas votre sac réutilisable ou vos bocaux de verre !
© Photos - Wikipedia
Métamorphose des Sargasses
La Mer des Sargasses n'est pas toujours aussi loin que vous pensez... Elle peut surgir dans nos vies, à n'importe quel moment.
La Mer des Sargasses, ce sont aussi ces moments où nous n'avons plus l'impression d'avancer. Ces instants où nous nous enlisons dans une mer de pensées négatives, d'interrogations, de découragement, de douleur (qu'elle soit physique ou morale) et où nous ne voyons plus la sortie de ce labyrinthe gluant qui nous paralyse. Cet état second où nos démons nous poursuivent, où nous nous sentons traqués par des monstres imaginaires. Ces heures que nous voudrions voir passer en un éclair, mais qui durent et durent encore. Ces nuits où le plafond n'a jamais paru si clair malgré l'obscurité nocturne. Ces jours où nous prions le ciel que tout s'arrête enfin pour que la douleur cesse. Et c'est alors que les effets de ce Désert Flottant font de nous quelqu'un d'autre... Cette Mer-là possède ce pouvoir terrifiant de nous transformer en un autre nous Et selon les personnes, la métamorphose qui s'opère ainsi prend les formes les plus diverses. Chez l'un, elle fera de lui un ours bourru, qui ne dit mot mis à part borborygmes, renfermé sur lui-mème, ou une plante, muette, incapable du moindre geste. Chez l'autre, elle le transformera en lion enragé, agressif et mordant pour son entourage. La Mer des Sargasses fera poser à un troisième des actes émotionnels, déraisonnables et parfois incompréhensibles. Elle transfigurera le dernier en pantin injustement irascible avec ceux qui prennent soin de lui, par faute de ne pouvoir traduire sa souffrance autrement qu'à travers maladroitesse des mots, ingratitude et reproches. C'est notre manière d'exprimer notre désir profond de nous échapper enfin de cette Mer des Sargasses qui nous retient prisonniers de notre corps, de notre esprit ou de notre vie. Et plus la Mer s'épaissit, plus ses eaux sont profondes, plus nous nous éloignons de nous-mêmes. (...) Atlantique nord, 26° nord, 65° ouest : la Mer des Sargasses, une position qui terrifie les marins... La légende dit en effet que les varechs géants peuvent bloquer gouvernails et hélices et que les navires s'y retrouvent pour toujours prisonniers, formant comme une cité flottante à la merci des bêtes monstrueuses qui grouillent sous les algues (...) (Sargasses, Al Coutelis/Rodolphe)
Alors, si vous êtes un jour confronté à un marin englué dans sa Mer des Sargasses, ne lui en voulez pas. Soyez tolérant, patient et doux. Il a besoin de vos soins et de temps pour mener son navire hors de ce bourbier. Ne lui en voulez pas de son language un peu vert ou de ses gestes malhabiles pour se sortir de son océan marécageux.
Je vous souhaite un excellent dimanche, sur une mer bien bleue, translucide et paisible, sans plastiques, ni Sargasses.
Dernièrement, un de mes lecteurs m’a laissé entendre que mes billets requéraient un certain effort de lecture pour les moins férus de lettres et qu’une petite variation de longueur et style tonal serait la bienvenue de temps à autre. Il en faut en effet pour tous les goûts et toutes les couleurs. Alors, voici un billet tout court, et surtout beaucoup moins littéraire.
Et donc, quel est l'âge du capitaine ? ...
Ce vendredi 20 octobre était la date d'anniversaire d'un grand explorateur de mon histoire, ainsi que de son premier petit-fils...
Et qui dit explorateur, dit Capitaine Archibald Haddock ! Alors, je vous laisse deviner son âge... Et pour ce faire, une fois n'est pas coutume, je vous propose un petit exercice de calcul mental ce dimanche. Voyons ceux d'entre vous qui se souviennent encore leurs tables d'arithmétique ! Surtout que ceux qui me connaissent bien, savent qu'il s'agit de ma discipline préférée ;-) ... Alors, crayons et calepins sont les bienvenus pour ceux qui ont besoin d’écrire, mais les calculatrices, tableurs et autres engins de calcul par contre, doivent rester dans leur étui ! Alors, il vous suffira d’additionner les chiffres mentionnés ci-après pour deviner l’âge de notre capitaine. Piece of cake !
© www. tintin.com
Le capitaine Haddock est apparu pour la première fois dans les aventures de Tintin en 1941. Il a voyagé dans plus de 79 pays différents et dirigé plus de 45 grands navires dont le Karaboudjan, le Pachacamac, le Sirius et bien entendu, la Licorne... (Vous souvenez-vous encore dans quels voyages ? )
Notre ami barbu à vidé dans sa vie plus de 3.542 bouteilles et accompagné Tintin dans plus de 15 aventures et 26 nations. Il a 1 fidèle serviteur : Nestor et 1 admiratrice sans bornes : la cantatrice Bianca Castafiore. Son château, Moulinsart, compte 44 chambres et 5 salons. Sans oublier ses 11 redingotes de capitaine et son éternelle 1 et unique casquette ancrée de chef de bord. Sans oublier ses impérissables jurons : 253 pour être exact ! : « Bachibouzouk, boit-sans-soif, cataplasme, cornichon, ectoplasme, escogriffe, flibustier, macaque, moule à gaufres, phylactère, mille milliards de milles sabords, tonnerre de Brest, zouave » et bien d’autres... Vous suivez toujours ?
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Certains diront qu’il y a des sujets à propos desquels on ne peut pas écrire. Et pourtant, je voudrais ici tenter d'aborder un thème ardu, très ardu même. J’espère que mes lecteurs ne m’en voudront pas, même si leur opinion diffère.
La Mer, telle un immense miroir qui reflète la couleur du ciel, la silhouette des navires ou encore l'ombre des nuages. Et parfois, lors d'un grain qui n'en finit pas et que le navire tangue dans tous les sens au bord du naufrage, l'envie prend aux marins de sauter par dessus bord et de passer de l'autre côté de la surface, d'aller voir de l'autre côté du miroir et de s'enfoncer dans la douceur de l'onde pour ne plus remonter. Une envie difficile à cerner, un souhait insoutenable à accepter pour ceux qui restent à bord. Souvent même inacceptable ou totalement incompréhensible pour ceux qui demeurent à terre.
Et pourtant, chaque marin a le droit de décider. Chaque homme de mer a le droit de souhaiter sortir de la tempête par n'importe quel moyen, d'amener son navire vers des eaux paisibles, des fonds marins pacifiques et silencieux, vers un océan de quiétude qui mette fin à sa souffrance pour sortir d'un ouragan interminable. Mais ce droit ne peut lui être accordé que tant qu'il est lucide, ce qui en rend la décision d'autant plus ardue. Deux proches patients de cancérologie, dont je m'occupe chaque semaine, viennent d'annoncer leur décision d'aller voir spontanément de l'autre côté du miroir. Et si je comprends leur demande, elle me déchire, car je voudrais les retenir encore un peu plus longtemps à bord. Mais, la vie sur le navire est devenue tellement pénible. Elle n'est plus que souffrance, changement de toile, de cap, puis de voiles encore, pour irrémédiablement revenir au point de départ sans espoir d'atteindre un port à l'abri. Un cycle permanent. Et la lassitude se fait sentir. Pourquoi prolonger le calvaire d'un mal de mer alors qu'il ne peut plus disparaître et ne fait que s'empirer ? Pourquoi faire traîner une traversée qui ne mènera le bateau nulle part ? Pourquoi éterniser une traversée incroyablement douloureuse à travers orages et cyclônes et qui ne peut retrouver un ciel serein ? Durant des années, loin des gens qui le vivaient, ma première réaction, primaire, avait d'abord été le mépris puis, le refus. Naïvement, je trouvais à travers ce genre de souhait un manque de volonté, de courage, voire de lâcheté. Je ne pouvais tout simplement pas imaginer qu'on puisse désirer tout arrêter. Et j'avais tort de juger... Puis, un jour, j'ai compris. J'ai compris qu'il existe des douleurs telles qu'elles paraissent insurmontables, à un point de ne plus pouvoir, de ne plus vouloir. Même si cela va à l'encontre de la nature humaine. Avec le temps, les discussions et les rencontres, j'ai fini par traduire et accepter leur décision une fois toutes les alternatives épuisées. Même si elle m'attriste profondément. La science et la philantropie se sont tellement battues pour le salut de l'humanité depuis ces dernières décénnies qu'elles en ont parfois oublié que leur acharnement à prolonger des vies parfois va à l'encontre du droit primordial de l'homme : celui de décider de sa propre existence. On ne peut sauver tous les marins d'une fortune de mer. On ne peut pas toujours retenir un marin attiré par l'appel de l'océan. Tout ce que l'on peut, c'est l'accompagner le plus tendrement possible dans sa descente vers les abysses et son passage de l'autre côté du miroir. Et c'est bien ce que je ferai si tel est leur souhait. Même s'il m'est tellement bizarre qu'on puisse programmer son naufrage... Même s'il me semble tellement surnaturel de pouvoir décider de la date de fin de son propre voyage...
Je connais à peine ces marins-là. Mais, les liens que nous avons tissés en si peu de temps me semblent bien plus profonds que beaucoup d'autres que je cotôie depuis des lustres. Les circonstances, probablement : on vit les événements à trois cents pour cents. Et puis surtout... Ils me rappellent que les autres, ces autres marins que j'aime, pourraient eux-aussi, en arriver là un jour. Et cette éventualité m'est cruelle. Trouverais-je le courage d'accéder à leur demande? Trouverais-je la force, le jour venu, de les jeter à la mer comme ils le souhaiteront peut-être ? Je ne sais. Je présume qu'on fait ces gestes-là par amour. J'espère simplement que le destin m' épargnera d'avoir à devoir y recourir un jour et que la Nature suivra son cours tout en douceur, sans devoir être forcée. De toute manière, je ne les abandonnerai jamais dans la tempête, peu importe les circonstances.
De tous les Voyages, il en est un qui se fait seul...
Je disais à l'un de ces marins : "Tu n'es pas seul, nous sommes là, près de toi.". Et sa réponse m'a laissée sans mots : " Si, pour cette décision-ci, on est totalement seul au monde...". Et il avait raison. Et pourtant...
Pour l'un d'entre eux, une date a été fixée. Et cette semaine, je ne pourrai pas empêcher un marin de sauter par dessus bord. Et je me sens tellement impuissante... Si seulement, je pouvais... Mais, je ne peux... Je n'ai pas le droit d'aller à l'encontre de sa volonté. Je n'ai pas le droit d'entraver son désir de bonheur, là-bas, ailleurs. Alors, tout ce que je puisse faire, c'est de te souhaiter bon voyage, petit Papillon de Mer... Que ton voyage de l'autre côté du miroir te soit doux et paisible. Et que tu trouves enfin un jardin de douceur et de paix au fond de la mer...
Je descends lentement, mon corps enfin se repose,
Les cheveux longs dans le courant, ondulent en caressant Dans le silence libre et sans lien, doucement me balance Un berceau bleu étincelant au fond de l’océan... Si tu as rêvé dans les eaux sombres, dans la pénombre où nage Ophélia, Si la lueur des profondeurs t’attire aussi, ne me retiens pas, Même si les bras froids du tendre océan te saisissent, englacent ton cœur, Tu me rejoindras, ne me sauve pas, coule avec moi, ne me retiens pas... Je n’entends ni ne respire, les vagues se retirent, Sur l’oreiller blanc des abysses, je peux me laisser partir... D’un coquillage blanc, on renaîtra émerveillé dans la lumière, On ouvrira nos paupières closes, devant la beauté d’une autre mer. Je retourne à la mer, je retourne à la mer... (Ophelia, Nolwenn Leroy)
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August 2023
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