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Tempête

17/9/2017

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Tu avais surgi de nulle part, avec ta robe de soie blanche pointillée de noir, tes longues jambes et tes fines mains. Tes grands yeux marrons aux longs cils et ton air mélancolique m'avaient envoûté sur le champs. Je t'ai nommée Slona, en référence au petit port - Slano - où je t'ai rencontrée. Tu avais peut-être déjà un autre nom, ou pas, mais peu importe. C'est ainsi que tu demeureras dans ma mémoire.

En route vers le Nord-Ouest de Dubrovnik, entre les îles Elaphites. ce dimanche-là de septembre, les Dieux des vents étaient clairement en colère. En rage, même... Une barre de plus en plus dure à tenir, des sautes de vent incessantes, des moutons bien formés sur les vagues. Des instruments qui jouaient au yoyo : baromètre en descente à pic et anémomètre qui dépassait de plus en plus régulièrement les trente noeuds de vent. Les messages de sécurité à la VHF se suivaient, annonçant jusqu'à cinquante cinq noeuds de vent en mer dans les heures à venir avec des éclairs à illuminer toute la côte et invitant tous les embarcations à chercher un abri dès que possible. Même la ligne de ferries avait été temporairement stoppée. Probablement un "pet" de vent pour des marins professionnels, mais un tantinet trop pour nous, simples voileux du dimanche, sur un voilier que nous ne connaissions pas encore, dans une région inconnue. Nous décidâmes donc de miser la prudence et de faire relâche dans le port le plus proche, à savoir Slano, qui se targuait d'une toute nouvelle marina, relativement abritée, le temps que les Dieux se calment un peu. Tant pis, nous retarderions notre arrivée à destination d'une journée ou deux.

Nous voici donc solidement amarrés au milieu de la marina, désolés de devoir ainsi interrompre nos projets de voile alors que le soleil brillait encore. Il faisait une chaleur étouffante. À peine le temps de s'installer et d'effectuer une balade de reconnaissance des lieux.
C'est là que tu apparus...
​

Tu te réchauffais au soleil avant la tempête. Dans un coin. Loin de la foule. Nos regards se croisèrent. Quelques civilités. Un bonjour prudent. Un peu hésitant à t'aborder ainsi, par crainte de t'effrayer et de te faire fuir. Tu me paraissais tellement belle... Un premier contact. Tu me semblais sauvage un peu, téméraire un peu aussi. Je ne savais tes origines. Roma ? Fille du voyage ? Ou encore t'etais-tu perdue, enfuie ? Ou pire, avais-tu été maltraitée par les tiens ? Ta taille un peu trop fine et cette sale blessure visible sur ta jambe ne présageaient rien de bon et m'affligeaient de ne pouvoir soulager ton état, t'imaginant ainsi un passé et une âme malheureuses.

© Photos – Rêvesdemarins
L'air était lourd, la chaleur accablante. Je t'offris donc un verre d'eau fraîche, que tu t'empressas de vider. Tu avais l'air assoiffée. En revenant à la marina un peu plus tard, tu n'avais pas bougé. Je n'hésitai cette fois plus et t'invitai à partager un repas, au grand dam de mes compagnons de voyage. Une fois passé ton étonnement de l'offre d'un parfait inconnu, étranger de surcroît, tu acceptas et je vis avec délice que mon cadeau te faisait plaisir. Ensuite, tu t'installas à mes côtés et posas ta fine tête sur mes genoux. Je n'osais pas bouger. Je caressai ta joue doucement, pris tes doigts dans les miens et nous restâmes ainsi pour un long moment de bonheur, immobiles, blottis l'un contre l'autre.

Le ciel bleu tourna au blanc, puis au gris, pour terminer par un noir orangé dans son entièreté. Le souffle d'Eole se transforma en mugissement puis en sourd grondement au loin. Et le spectacle débuta. Les mâts des voiliers s'entrechoquaient à présent dans un vacarme métallique assourdissant. Les voiles mal ferlées menaçaient de se détacher et les premières gouttes firent leur apparition, lourdes et puissantes. En fin de compte, la météo locale ne s'était pas trompée.. La mer commença à bouillonner. La mer à l'entrée du port avait fait place à une rivière continue avec des vagues déferlantes à l'écume baveuse. Le capitaine nous attendait à bord, inspectant avec angoisse les amarres (les nôtres comme celles de nos voisins ! ) en espérant qu'elles tiennent bon. Une seule ligne de mouillage qui lâcherait, entraînerait inévitablement le restant des navires dans un jeu de dominos géants que nous osions à peine imaginer. Toutes nos amarres avaient été doublées par sécurité. Les voiles avaient reçu un ferlage additionnel et tout ce qui pouvait s'envoler retiré du bord. Le voilier dansait la samba dans son emplacement et la grosse Bertha (notre plus gros pare-battage) tanguait et roulait comme une gigantesque boule de billard bleue et blanche sur l'eau en furie entre le ponton et l'étrave.
© Photos – Rêvesdemarins

Mon cœur se serra. Il était vraiment temps de rentrer au voilier. Je t'écartai de moi le plus tendrement possible pour ne pas te brusquer et t'embrassai longuement sur le front. Ton regard triste me transperça au plus profond. Tu me murmuras quelques mots que je crus comprendre malgré nos langues distinctes. Je dus faire un effort de Titan pour ne pas laisser couler mes larmes. Je me levai et t'enjoignis à te mettre à l'abri. Je partis sans me retourner par crainte que tu ne tentes de me suivre. Et je m'en retournai donc rejoindre le reste de l'équipage de retour à bord, à contre-cœur de te laisser seule derrière moi, dans la tourmente. J'insistai auprès des autres d'un regard pour t'emmener mais leur réponse fut sans pitié. Alors, je n'eus d'autre choix que de t'abandonner à ton sort. Tu avais certainement un endroit où t'abriter, pensai-je pour me rassurer.

Nous assistâmes alors á un spectacle impressionnant. Le vent devint si puissant qu'il était impossible de s'entendre parler. Des trombes d'eau s'abattirent sur le petit port, soudainement, sans crier gare. Les éclairs zigzaguaient au loin derrière les collines environnantes. Tout d'un coup, un claquement sec suivit par un faseyment inhabituel : le génois d'un voilier voisin venait de se détacher et était en train de se faire littéralement déchirer en lambeaux. Un second suivit. Notre skipper regardait le nôtre d'un œil inquiet, mais il tenait bon. Le clapot de l'eau s'était fait tintamarre. Le chuintement du vent s'etait mué en chambard. Et tout le petit port dalmate n'était plus que cacophonie des éléments, dirigée par un chef d'orchestre céleste sans oreille musicale. L'impressionnant numéro de Music-Houle se poursuivit toute la nuit. Le bateau craquait de partout. Et la houle nous trimballait d'un bord sur l'autre de manière erratique. La marina était pleine à craquer, ayant accueilli les embarcations en dernière minute jusqu'à ses emplacements les plus reculés pour leur offrir refuge durant l'ouragan.
Les tempêtes sont souvent prévisibles. Sauf celles du cœur. Ces dernières sont inexplicables...
Toute la soirée, je ne cessai de penser à toi. Je me demandais où tu avais trouvé refuge dans cette météo tempétueuse. Je craignais pour toi. Serais-tu encore là à m'attendre à mon retour ? Ou un autre t'aurait-il finalement emmenée avec lui ? Serais-tu retournée aux tiens si tu avais une famille sur cette île ? Les idées les plus folles me passaient par la tête : et si je revenais te chercher malgré la tempête (et l'interdit ) et t'emmenais tout de même ? Peu importe les tracas administratifs et douaniers. Peu importe ta santé fragile. Peu importe mes obligations sociales. Je ne pouvais imaginer t'abandonner seule, qui sait sans ressources et sans toit dans ce coin perdu, loin de moi. Et si le Destin avait voulu que je te rencontre ? Et si... Et si...

Le soir, lors d'une brêve accalmie entre deux trombes de vent, je refis un tour à quai sous la pluie pour te revoir, sans succès. Et si ma nuit fut blanche, ce fut bien moins la tempête qui battait les pontons que ton image qui me tint éveillé. Le lendemain matin, avant notre départ, j'arpentai une dernière fois les pontons pour te retrouver, en vain. Tu avais disparu. Pas de trace de ta présence. L'endroit où je t'avais laissée quelques heures auparavant avait été nettoyé par les pluies et ne me restait de toi que le souvenir. Je regardai dans tous les recoins, sans trouver la moindre trace de ta présence. Tu avais dû attendre mon retour en vain dans l'orage et le coup de tabac. Et lasse de ne point me voir revenir, tu avais dû te dire que je n'étais que comme tous ces autres hommes de passage, désinvoltes et superficiels, seulement intéressés d' un bref jeu avec toi. Mais, je ne suis vraiment point de ces gens-là, Slona...


Le moment venu de larguer définitivement les amarres, je scrutai l'horizon en espérant entendre ta voix ou apercevoir ta robe banche et noire, en vain. Durant de longues minutes, alors que notre navire s'éloignait vers le large, je ne pouvais détourner mon regard du quai du port. Si la tempête s'était enfin tue au-dehors, elle faisait encore rage dans mon cœur. Et ses vagues me donnaient la nausée. Le mal de mer, le mal du vide que tu laissais. Le mal de ne point avoir pu suivre mon cœur et te sortir de cet endroit. Le mal de toi...

Les jours qui suivirent, les nuages avaient déserté la région et fait place à un soleil radieux. Et notre périple reprit ainsi sa course, d'île en île, de baie en baie. Nous y avons découvert nombre de charmants villages et ports locaux. Mais aucun d'eux ne m'a laissé la même impression que Slano. Le plus beau port restait bien celui balayé par cette mini-tornade. Et de tous les souvenirs de notre voyage, c'est bien cet ouragan imprévu sur le Sud de la Croatie qui restera le plus poignant dans ma mémoire.

Et voici Slona... (© Photos – Rêvesdemarins)
Une tempête qui laissera encore longtemps tanguer mon cœur. Et tout au fond de moi, une petite voix me dit que nous nous retrouverons peut-être un jour, Slona...

Bien entendu, aucune comparaison avec Irma, José ou autres monstres météo qu'ont connu les îles atlantiques dernièrement. Cependant, si vous passez jamais par un petit port et qu'un mini-tempête vous fait chavirer le cœur, souvenez-vous de Slona, et s'il vous plaît, emmenez-la... Bon dimanche (sans cyclone) à tous !

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