Des constructions majestueuses, élancées vers le ciel, ornées d'étranges gargouilles. Elles sont battues par les vents et résistent à travers les siècles. Leurs cloches sonnent le tocsin dans les moments critiques ou de célébrations. Edifiées à la sueur d'hommes de courage, elles continuent à inspirer aujourd'hui pour en bâtir de nouvelles, plus modernes, mais tout aussi impressionantes. Elles regorgent de mille recoins et de tours défiant la gravité et imposent le respect. Ces cathédrales-ci sont faites non pas de pierre, mais de bois. Elles rendent un culte à une seule et même religion: celle de la Mer. Et surtout... Elles flottent...
Qu'elles possèdent trois, quatre ou sept mâts, elles ont découvert le monde à une époque où la technologie en était encore à ses balbutiements. Par contre, l'inventivité et la ténacité des hommes qui les ont édifiées ou menées en mer n'ont que peu de comparaison avec ce dont notre monde moderne a été capable. Quelques chiffres, simplement: Imaginez-vous, sur un bateau, totalement en bois, rendu étanche à la poix, avec des mâts de plus de 50 mètres de haut (bonjour le vertige...), comprenant plus de 30 voiles distinctes, et jusqu'à 84 tonnes de cordages (!) pour le gréément: drisses, écoutes, étais, grelins, haubans.... (Euh, capitaine, laquelle dois-je tirer?!!!?).
Saviez-vous d'ailleurs que le mot "gréément" vient du norrois (ancienne langue scandinave/islandais) "greida", Pour les lecteurs non voileux, le "gréément" d'un navire à voile en réfère à l'ensemble du matériel situé sur le pont permettant sa propulsion par la force du vent servant à régler, établir et manœuvrer la voilure. Jusqu'à 4.000 mètres carrés de voilure. Des équipages de 300 gros bras musclés (et ils ne chômaient pas!). Certains de ces voiliers pouvaient atteindre des vitesses moyennes de 7 à 8 nœuds (13 à 15 km/h) et réaliser plus de 200 milles (320 km) par 24h. Evidemment, allez-vous me dire, ce n'est pas très rapide comparé aux bolides navaux d'aujourd'hui qui dépassent les 120 km/h (par ex. le Vesta sail rocket). Mais certaines de ces demoiselles pesaient aussi plus de 1.000 tonnes à l'époque (par ex. l'Hermione), ne l'oublions pas. Alors, la performance valait bien une révérence.
Un ami voileux racontait récemment qu'ils avaient du grimper dans le mât sur un voilier de course, ceci en pleine mer, et pour garantir le plaisir, de surcroît en pleine nuit pour effectuer une réparation sur une écoute de grand-voile (cordage) qui avait lâché. Pas évident. J'ai dû moi-même, effectuer un "bidouillage" de fortune à mi-chemin du mât, il y a quelques années, dans un port, à peine à 10m de hauteur et je n'osais surtout pas regarder en bas, mes pauvres compagnons d'équipage devant me hisser jusq'u'à cette hauteur dans un harnais, uniquement à l'huile de bras. Alors, imaginez l'infortuné mousse à qui on ordonne d'aller rafistoler un cordage à plus de 50m de haut sur un voilier en pleine tempête... (Et les cirés n'existaient pas à cette époque). Je n'ose imaginer dans quel état son estomac devait se trouver...
Et je vous passe tous les différents noms de cordages et voiles à retenir... Un vrai casse-tête chinois (ou plus probablement hollandais, russe, français ou anglais à l'époque...). Il fallait un dictionnaire pour retenir tous ces noms spécifiques pour être certain de répondre correctement aux ordres du capitaine : beaupré, misaine, artimon, foc, petit foc, grand foc, misaine, hunier fixe, hunier volant, petit perroquet fixe, petit perroquet volant, petit cacatois, petit contre-cacatois, grand-voile, grand hunier fixe, grand hunier volant, grand perroquet fixe, grand perroquet volant, grand cacatois, grand contre-cacatois, brigantine, voile barrée, hunier fixe de fougue, hunier volant de fougue, perruche fixe, perruche volante, cacatois de perruche, contre-cacatois de perruche, voile d'étai... Bref: un vrai zoo! En parlant de zoo... Voici qui j'ai rencontré lors d'une semaine de voile au sud de la Turquie cet été... Il n'a pas pris une seule ride, notre ténébreux Capitaine Jack Sparrow...
Des damoiselles flottantes aux noms mythiques: Amerigo Vespucci, Sedov, Cutty Sark, Peking, Joseph Conrad, Sigyn, Pelican of London, Etoile, Fryderyc Chopin, Asgard II, København, Simon Bolivar, Mir, Staatraad Lehmkuhl, Great Republic, Cisne Branko, Sagres II, Dar Mlodziezy, Eendracht, Europa, Shabab Oman, Mircha et bien d'autres... Sans oublier notre Mercator national. Certains voguent encore, d'autres servent de navire école. ou dont il ne reste aujourd'hui que le fabuleux souvenir. Il y a quelques années, j'ai découvert Valery Vasilevskiy, un artiste russe, dont la passion est précisément la photographie de ces "Tall Ships", anciens ou nouveaux grééments, qu'ils battent pavillon russe ou autre. Il gagne à être connu. Vous trouverez quelques uns de ses magnifiques clichés marins dans ce site dans la section rêves en images/rêves de marins/cathedrales des mers (http://www.revesdemarins.com/catheacutedrales-des-mers.html). Si ses oeuvres vous parlent, allez donc jeter un coup d'oeil à ses sites web (www.photonord.ru ou https://www.facebook.com/valery.vasilevskiy).
Sur le même thème, le Figaro Magazine a édité en 2008 en un numéro spécial consacré à ces joyaux de la navigation, agrémenté de moultes images fabuleuses. Voici ici un extrait de cette publication hors du commun. (http://www.canalacademie.com/ida3171-Les-cathedrales-des-mers.html). Dans une publication ultérieure, je vous conterai le récit d'une d'un Grand Voyageur sur l'une de ces perles de la navigation. Je vous parlerai également de l'amour des Russes pour les navires d'époque et les conséquences pour le tourisme dans certaines régions. Mais ceci sera pour un prochain billet. En attendant, j'espère vous avoir donné, si pas (encore) la foi dans l'église maritime, du moins l' envie de mieux connaître l'histoire de ces magnifiques Cathédrales des Mers.
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AuteurArchives
August 2023
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