Les mois passent et les billets ne se ressemblent pas (pas trop, du moins, je l’espère). Le temps s’écoule, comme du sable entre nos doigts.
Dans un billet précédent, je vous disais que le temps prend souvent une toute autre dimension en mer. En réalité, sur terre, il peut parfois aussi revêtir d'autres proportions... Un exemple dans ce billet.
A la Recherche du Temps Perdu...
Je sors d’une période de huit longues semaines de travail d’arrache-pied pour un client, où j’ai fini par perdre la notion du temps, ne voyant plus de différence entre les heures du petit matin, de la nuit, des jours de semaine, fériés ou du week-end. Les jours se ressemblant tous devant un écran de pc ou les yeux rivés dans un dossier. Je viens enfin d’émerger ce WE, ce projet professionnel arrivant à sa fin. Pas de réveil demain matin. Pas de repas pris en toute hâte. Pas de nuits sérieusement écourtées. Pas de délai de folie ni course contre le temps pour délivrer selon les attentes élevées du donneur d’ouvrage. C’est naturellement un choix d’accepter ou non ce genre de mission et ses contraintes horaires déraisonnables. Et quelque part, j’avoue que le défi d’y parvenir en ce temps record imposé a titillé mon intérêt pour prendre le risque de m’y lancer. Il est toujours satisfaisant de réussir une épreuve requérant un dépassement de soi et de parvenir à la relever. Durant toute cette période, on fonctionne à l’adrénaline. Le corps et l’esprit tiennent étonnamment bien par rapport aux sacrifices que le jeu leur impose. Un peu comme (mais en bien moins extrême ! ) les coureurs de la Route du Rhum en cet instant face aux tempêtes consécutives qui les assaillent sur la route (on les encourage à tenir bon la barre). On ne pense qu’à l’arrivée, concentré, dans sa bulle. Et chaque minute compte alors. Merci à vous qui m'avez soutenue (et surtout supportée ! ) durant cette période très intense.
Cependant, dans ce cas particulier personnel, il ne s’agit là que de boulot... Et même si l’on aime ce que l’on fait, ce n’est là qu’un type de métier dont l’occupation remplit de nombreuses heures, utilement. Rien dont le monde se souviendra, ni qui changera drastiquement la vie des gens. Rien qui ne sauvera le monde, ne figurera au Guiness Book des records, ne mènera à un prix Nobel, à un nom sur une stèle ou même qui ne vaudra une dédicace dans l’introduction d’un livre. Alors, à la recherche du temps perdu ? Me direz-vous ? Pas vraiment. Plutôt du temps passé. Et surtout la conscience plus vive après coup, des sujets qui comptent vraiment. Les retrouvailles avec l’essence des choses : prendre le temps d’une conversation, d’une caresse, d’un regard. Prendre le temps d’admirer et de redécouvrir la beauté simple, celle de la nature, des couleurs, de la lumière, du bruit du vent, de la présence des êtres aimés, de savourer des instants de repos, de se sentir vivant... Bref, cette fameuse « perte » temporaire du temps et de sa notion par l’hyper-activité rend la perception du réel encore bien plus belle après l’effort.
Alors, pour ceux qui ne comprennent pas tel mode de fonctionnement, qui ne voient là que journées au remplissage frénétique, ne vous fiez pas aux apparences... Tant que l’on garde le contrôle de ses choix et surtout qu’on les assume avec satisfaction pour retrouver ensuite le goût du calme et des vraies valeurs de vie, à mon sens, on peut brûler - temporairement - la chandelle par les deux bouts. Tout l’art réside à garder conscience de consacrer les précieuses minutes du sable qui s’écoule à des choses qui nous donnent de l’énergie positive au lieu de nous en coûter. Et de pouvoir quelque peu arrêter le temps lorsqu’on en a assez des rythmes effrénés. Et puis surtout... profiter de chaque instant !
© Photos - Rêvesdemarins (ce que j’ai redécouvert lorsque j’ai émergé de ma « recherche du temps perdu »... )
L’Urgence de Vivre
A l’inverse, prendre conscience du temps qui file, c’est aussi celle de l’urgence de vivre. Ne plus attendre le meilleur moment, le meilleur jour, le meilleur endroit. Ne plus attendre indéfiniment d’être prêt, de ne plus avoir peur, de rencontrer l’idéal, de rassembler les meilleures conditions pour réaliser les choses qui nous tiennent à cœur. Ne plus attendre de trouver les meilleurs mots pour dire les choses cruciales à ceux qui comptent vraiment. Ne plus attendre que le meilleur vienne plus tard. Le meilleur est ici et maintenant... Savoir saisir sa chance. Savoir saisir le présent.
Cette semaine, durant ma journée de travail à l’hôpital, j’ai revu un patient que je n’avais plus rencontré depuis de longs mois. Lors de notre dernière discussion, il allait bien, le traitement anti-cancéreux fonctionnait avec succès et il était bourré d’énergie pour poursuivre ses activités professionnelles durant sa maladie. Cette semaine, c’est un autre homme que j’ai ainsi retrouvé... Après m'avoir dit être ravi de me revoir, il m’annonce posément que la tendance s'est malheureusement inversée, avec des pronostics de futur à très court terme. Et qu’il a donc décidé d'arrêter son travail pour enfin réaliser son rêve d’enfance avant qu'il ne soit trop tard : construire un réseau de trains électriques. Il se consacre donc entièrement à son projet et tout le reste ne semble plus avoir d'importance pour lui. Il n’est jamais trop tard pour poursuivre ses rêves, même aussi brièvement ne puissent-ils durer. Et je ne peux que comprendre sa philosophie face à la situation. Je saisis à présent un peu mieux pourquoi ceux dans une situation similaire peuvent nous sembler centrés sur eux-mêmes ou même égoïstes. En réalité, ils sont simplement avides de saisir le temps là et tant qu’il se laisse encore retenir. Ils concentrent toute leur énergie à capter les grains de sable avant qu’ils ne soient tous écoulés dans le sablier. Et pour ce faire, ils n'ont pas beaucoup d'autres options que de faire des choix dans leurs priorités. On ne peut pas leur en vouloir pour cela. A la recherche du temps qu'il reste...
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AuteurArchives
August 2023
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