En mangeant ma salade de fruits ce matin, je me faisais la réflexion : quel long voyage mes bananes ont-elles donc dû réaliser en mer pour arriver jusque dans mon bol ? (J'imagine déjà mon filleul me demander avec son air espiègle si les bananes, elles aussi, ont le mal de mer ;-)... ). En règle générale, nous tentons d'acheter des produits locaux. Mais certains aliments ne peuvent vraiment pas provenir de nos serres belges. Alors, c'est parti pour parler du voyage de mes bananes...
Selon les dires, ce fruit aurait été découvert par Alexandre Le Grand lors d'une expédition dans la vallée de l'Indus, alors que d'autres sources en donnent le privilège de la découverte à Marco Polo en Chine. Qui sait... Une chose est certaine, c'est que la banane ne vient pas de notre plat plays et a dû faire un long périple avant de se retrouver sur ma table de petit déjeûner. Aujourd'hui, on la trouve principalement en Amérique centrale, en Asie du Sud-Est, en Afrique et dans le Pacifique Sud. Elle aurait fait son premier voyage vers l'Europe occidentale au premier siècle via les Arabes. A la fin du XIXe siècle, sa culture devient un enjeu économique important et influant. En Amérique du Sud, notamment en Jamaïque, la culture s'intensifie. Une société, la United Fruit Company, se fonde pour sa commercialisation vers les Etats-Unis, dont la puissance devient magistrale, avec des enjeux conflictuels entre la puissance américaine et les pays d'Amérique centrale. C'est de là que daterait l'expression "républiques bananières".
Les bananes exportées représentent le numéro 4 des produits alimentaires de base et posent au podium des fruits (avec les oranges et les raisins). Son convoyage (délicat car ces denrées sont fortement périssables) forment donc un enjeu de taille dans l’économie mondiale. "Plus de 400 millions de personnes de 120 pays en développement dépendent de la banane, à la fois comme aliment de base et comme produit important pour le commerce local et international. De plus, les exportations de la banane sont une source de devises essentielle à l'économie de pays africains et américains, au point qu'elle y est qualifiée d'« or vert » (Source : Wikipedia).
Mes bananes de ce matin auront donc parcouru des milles et des milles en mer pour arriver jusqu’a moi, sur des océans tanguants et tempétueux. Dans des cageots, sacs ou caisses au fond d’une cale ou d’un conteneur, sans trop d’air ni de lumière, mais bien emmitouflées, pour ne pas trop souffrir de la gîte. Je mange donc des bananes au pied marin.
Alors, une petite devinette, quel est le mot manquant dans la suite logique suivante : convoyage en mer > cargaison > débarquement > sacs > quais > .... ???
Non, ce n’est pas « bar du port » ou « steak frites » ;-)... Il s’agit du « docker », sans lequel les bananes ne parviendraient jamais jusque dans nos cuisines.
Le mot "docker" (contraction du mot anglais "dock worker", ou "longshoreman" ), en français puriste "débardeur", représente bien la mondialisation du métier et de l'internationalisation du commerce par la mer. Certaines variantes du métier sont nommées "portefaix", ou "aconier", selon qu'il était également responsable de la manutention, de l'arrimage des navires ou de la préparation de l'acheminement des marchandises à terre.
Le travail manuel, à dos d'homme, représentait un dur labeur. De nature temporaire et précaire (dépendant notamment des conditions météorologiques) également, la profession a vu l'émergence de mouvements sociaux et corporations fortes pour la défense des conditions de travail dans les ports. Ce dernier point n'a pas changé aujourd'hui. Mais entre-temps, ces conditions se sont généralement améliorées dans l'hémisphère Nord et pas mal de pays encore en voie de développément tentent d'y alléger l'environnement du métier.
© Photos - Wikipedia & LAPorthistory.org
Le Chant des Dockers
Par tous les temps et températures, le navire doit être chargé et déchargé. Si aujourd'hui, ce travail a été remplacé par des machines dans la plupart des pays (riches), il fut une époque où c'était bien à la force de l'huile de bras (au lieu de celle de moteur) que les navires déplaçaient leur cargaison à terre et vice-versa, via des passerelles pas toujours très stables. Le travail des dockers n'était pas moindre. Et si le métier existe plus que jamais aujourd'hui (il suffit de vous rendre au port de Bruxelles ou d'Anvers pour une démonstration), il a relativement changé, s'étant technicalisé. Les anciens dockers aux tatouages marins sur les biceps sont à présent souvent des mécaniciens (toujours aux mêmes tatouages), dans des cabines de grues et aux commandes de forklifts.
Quoi de plus motivant qu'une petite chanson pour se donner du courage en portant les lourds sacs de bananes ? Vous souvenez-vous de ces airs que l'on sifflotte encore aujourd'hui ? Quelques belles chansons en relation avec la vie de ces marins et dockers du passé. (Et pour le plaisir, trouvez l'erreur dans les quatres chansons ci-après).
Day-O (The Banana Boat Song)
Harry Belafonte Day-o, day-o Daylight come and me wan' go home Day, me say day, me say day, me say day Me say day, me say day-o Daylight come and me wan' go home Work all night on a drink of rum Daylight come and me wan' go home Stack banana 'til de mornin' come (...) Come, mister tally man, tally me banana (...) Lift six foot, seven foot, eight foot bunch Daylight come and me wan' go home (...)
Que ces quelques refrains illuminent votre dimanche de grisaille, et sans peau de banane ! Et soyez prudents si vous comptez quitter les quais pour prendre la mer ce WE, on annonce du gros temps...
Un excellent dimanche à tous.
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AuteurArchives
August 2023
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