Il était une fois un petit crabe...
On ne savait ni d'où il provenait, ni pourquoi la nature l'avait envoyé chez les humains. Il avait un caractère inégal, des formes les plus diverses et la faculté de modifier son aspect au cours du temps. Une créature bizarroïde que l'homme avait du mal à combattre, repousser ou à apprivoiser. Et pourtant...
Crabe Fantôme
Invisible à première vue. Le petit crabe peut apparaître instantanément et puis se dissimuler à nouveau, pouvant courir à des vitesses virtigineuses en changeant constamment de direction. Un système de mimétisme impressionnant. Et lorsque l'on s'aperçoit de sa présence, il s'est déjà confortablement installé dans votre habitation, s'est approprié vos charentaises, a déjà grignoté vos victuailles et endommagé quelque peu vos biens. Pas évident de se débarrasser de ce locataire clandestin.
C'est souvent par hasard, lors de menus travaux ménagers que l'on s'aperçoit de sa présence. Des symptômes de fuite ou de lézarde quelconque dans un mur, et hop, on y découvre un hôte indésirable, discret, mais bien tapis au chaud, à l'abri des regards. Pour d'autres, c'est la tuyauterie qui se bouche, ou pire, la charpente qui s'écroule inopinément. Et parfois, alors que l'on n'a rien remarqué, ce n'est qu'en faisant expertiser l'habitation, que l'on découvre le pot aux crabes (qui sont roses, bien évidemment... ).
Des locataires envahissants
Certains manifestent une préférence pour des endroits particuliers de votre logement: le frigo (le gastrocrabe), les voies d'irrigation (le leucocrabe), le grenier (le cervocrabe), la plomberie (l'intestinocrabe), le garde-manger (le mammocrabe), la cave à vin (le cirrhocrabe), voire la charpente et les murs porteurs (le myelocrabe et le Kahlercrabe), et même jusqu'à votre cabinet de toilette (le colorectocrabe). Ils font preuve d'un sans-gêne absolument indécent.
Certains se sentent d'ailleurs tellement bien dans leur nouveau domicile, qu'ils n'hésitent pas à essayer plusieurs pièces de la maison, jusqu'à parfois s'infiltrer absolument partout. Une fois installés, ils s'incrustent. Une vraie plaie.
Egalitaire, mais pas démocratique
Vous croiriez bien que ces petits monstres ne prennent possession que d' habitations en relativement piteux état, voire insalubres. Mais non! Ils pratiquent l'égalitarisme: tous sont logés à la même enseigne. Les propriétés les mieux entretenues n'y échappent pas non plus... Même une hygiène de vie impeccable n'évite pas le risque de les voir débarquer un jour sans invitation aucune. Egalitaires, mais pas démocratiques, les bestioles.
Gros gourmands
Ces petits gloutons trouvent souvent un moyen pour se développer. Ils muent notamment. Souvent fréquentes au début de leur vie, chacune de leurs mues peut correspondre à un doublement du poids et de la taille de l'animal. Ils n'en ont jamais assez. Il leur faut toujours plus de nourriture, plus de place, plus d'espace. Ils étendent leurs pattes partout où ils peuvent. De véritables petits goinfres voraces. De vrais bouffeurs d'énergie. Le savant Hippocrate les avait décidément bien décrits.
Patience et persévérance
Pour vous en débarrasser, il va alors falloir faire appel à des spécialistes de la décrabisation. Certains étant plus aisés à consulter et à comprendre que d'autres. Ces techniciens utilisent souvent un jargon incompréhensible pour la majorité d'entre nous. Et puis, surtout, il va falloir leur faire confiance. Leurs méthodes sont plus complexes, onéreuses et longues les unes que les autres. Il s'agit là d'un marathon. Alors, prenez votre mal en patience. Et ne vous découragez surtout pas si le traitement proposé ne fonctionne pas tout de suite. Il faudra parfois vous y reprendre à plusieurs tentatives et parfois avec de nouveaux ingénieurs pour parvenir à jeter dehors vos invités indésirables.
Et lorsqu'une méthode s'avère inopérante (en sus de ses effets secondaires souvent désagréables dûs aux produits utilisés ou à l'ingérance des travaux et la grande fatigue qui les accompagne), n' hésitez pas à tenter autre chose. Ne perdez surtout pas le moral. Car très souvent, la persévérance et le courage paient. Et au bout de longs mois ou d'années d'efforts, les vilaines bébêtes finissent par déloger et vous laisser enfin tranquille. Bien sûr, de temps à autre, elles finissent par réapparaître. Mais alors, reprenez votre bâton de pèlerin et relancez vous dans la bataille. Les techniques de décrabisation ne cessent d'évoluer et de s'améliorer avec les années. La recherche dans ce domaine s'intensifie et avance chaque jour. Et vous avez toutes les chances de parvenir à chasser à nouveau les intrus.
Crabby but bearable
Enfin, dans les cas les plus récalcitrants mais gérables, à savoir lorsque certains petits crabes acceptent de cesser leur croissance et de se faire très discrets, peut-être apprendrez-vous à cohabiter en paix. Dans ces cas-là, parviendrez-vous, qui sait, à les tolérer chez vous, et à vous accomoder de leur présence permanente.
Crabbatruc!
Une astuce? Vous entourer de personnes bienveillantes durant ce genre d'entreprise vorace d'énergie, de temps et de moyens. A commencer par la famille, qui supportera les contraintes, vos plaintes, vos jurons et votre caractère plus difficile durant la période. Les amis, qui comprendront que vous n'aurez plus le temps ou l'envie de les voir si souvent, mais qui continueront à prendre de vos nouvelles régulièrement, à vous soutenir à chacune des étapes. Votre employeur, qui acceptera de vous donner la flexibilité pour vous permettre de combiner vos activités aussi longtemps que nécessaire et de vous accueillir à bras ouverts à votre retour. Et même de personnes plus éloignées ou inconnues, pour vous encourager tout le long.
C'est aujourd'hui la Journée du Crabe... Une journée où mes pensées sont toutes à vous, vous dont un petit crabe a, un beau jour, choisi la vie comme chambre d'hôtel, et s'est installé sans vergogne.
Le 4 février: une drôle de journée, car également celle de mon patronyme. Alors, je me sens d'autant plus proche de ceux dont le petit crabe a investi l'existence bien malgré eux. " Quand la mer lutte contre le sable, celui qui trinque, c'est le crabe... " (Là où les tigres sont chez eux, Jean-Marie Blas de Robès).
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May 2023
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