Nous avons tous connu des personnes qui ont marqué notre vie. Les enseignants font partie de cette catégorie de privilégiés dont le métier peut exercer une certaine influence sur notre vision de l’univers. Certains de leurs mots demeurent indélébiles en nos mémoires. En hommage à l’un d’eux, je vous offre ici un point de vue sur une région de l’Asie un peu différente de celle des livres traditionnels d’histoire ou de géographie. Nous partons donc ce dimanche vers le pays du Soleil Levant : le Japon.
Akoya
Le processus est ingrat : sur une population de mollusques ainsi élevés à la ferme, la moitié périt en cours de culture et sur les survivants, seulement 5% seront considérés comme de qualité suffisante pour les standards de qualité de vente pour les bijouteries haut de gamme. La concurrence chinoise est puissante. Cependant, la persévérance, le savoir-faire et l’élégance nipponne ont conquis une clientèle à travers la planète.
Tel un Haïku :
Le Japon a pris l’exemple de notre huîtrier... Le pays va successivement « avaler » différentes cultures étrangères pour se refermer ensuite sur lui-même pour quelques temps. Un cycle qui s'est réitéré à plusieurs reprises à travers les siècles.
Le Japon. La taille des deux tiers de la France avec deux fois sa population (126 mio). Seulement 15% de terres cultivables, coincé entre montagnes et mer. Une activité piscicole insuffisante pour nourrir la totalité de ses habitants. Ni fer, ni pétrole, ni matières premières. Il doit importer le blé et le soja. Un pays dépendant des autres pour sa subsistance. Alors, il doit rivaliser de créativité pour alimenter les siens. Il compense alors par une force commerciale, une discipline bien rouée et une organisation sans failles. Et si l'on a longtemps accusé ce pays de n'être q'un pâle "copieur", le Japon peut se targer aujourd'hui d'avoir relevé le défi que lui a lancé son environnement naturel.
L'ère Taïka
Mais revenons un instant en arrière. Nous sommes en 640. Jusque là, le Japon est déchiré en un patchwork de clans disparates. La nation va alors connaître une évolution différente. Le nouvel empereur Kōtoku divise l'empire en huit provinces. Il revoit la structure hiérarchique et gouvernementale de manière ordonnée à travers le pays et déplace la capitale impériale dans la baie d'Osaka. C'est là une manière de centraliser le pouvoir autour de la cour impériale. Il ouvre une nouvelle ère, celle du "Taîka", qui signifie "Grand changement". Il s'inspire pour ce faire du modèle de la dynastie T'ang, basé sur le Confusianisme et les philosophies chinoises. L'influence de la Chine se retrouvera d'ailleurs à de multiples aspects au Japon : écriture, architecture, religion, arts, jusqu'à certaines habitudes alimentaires. Mais c'est bien le planning et l'implémentation méticuleuse japonaise des réformes qui permettra au pays de passer à un nouveau modèle de fonctionnement.
Des siècles durant, le Japon avance, pour ensuite céder à une série de guerres civiles et de dissentions internes. Au XVe siècle, il s'ouvre timidement aux premiers occidentaux à travers le christianisme. Mais le pays retombe ensuite dans un isolationnisme strict, le "sakoku", jusqu'en... 1853 ! Les frontières sont fermées aux étrangers sous peine de mort ! Seuls sont permis quelques liens diplomatiques avec la Corée et des relations commerciales avec la Chine et les Provinces-Unies. Quant aux Européens, seuls les vaisseaux de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales sont autorisés à commercer dans le comptoir à l'entrée du port de Nagasaki. L'huître nipponne se referme...
© Photos – Wikipedia & Britannica.com
L'ère Meiji
En 1854, l'ère Edo se termine et les Américains (le commodore Matthew Perry et sa flotte de guerre) forcent une ouverture aux ports nippons. Les Japonais acceptent à contre coeur, par peur d'une guerre par un refus.
En 1858, l'huître nipponne va enfin se réouvrir volontairement pour une période de modernisation à travers l'ère "Meiji" , qui signifie "lumière". Cette période de changement amène le Japon d'un système féodal vers un système industriel à l'occidentale. Une évolution radicale en termes sociaux, politiques et culturels permettra diverses avancées de l’industrie, de l’économie, de l’agriculture et d’échanges commerciaux. Une ouverture sur le monde extérieur. Une réforme importante y sera l’abolition de la classe guerrière des samouraïs, dont bon nombre se reconvertiront en hommes d'affaires. Libération des religions, développement du chemin de fer, nouveau modèle politique, abolition des privilèges, création d'un armée nationale, création d'une monnaie unique (Yen), adoption du calendrier grégorien, obligation de l'enseignement...
© Photos – Wikipedia & Britannica.com
L'ère Mac Arthur...
Et puis dans les années 1930, tout bascule à nouveau... L’époque est marquée par l’influence du fascisme, du totalitarisme et du nationalisme, du militarisme, avec une promotion de l’idéal guerrier japonais traditionnel. L'empereur Hiro-Hito monte sur le trône.
Et l'huître nippone se referme à nouveau, avec les conséquences désastreuses que l'on connaît en 1945.
© Photos – Wikipedia & Britannica.com
En 1945, le Japon est un pays totalement détruit par les bombardements américains, sous occupation. Ses dirigeants sont mis en procès et l'empereur échappe de peu aux poursuites. Cependant, Mac Arthur propose un plan de relance hors du commun : pas question de réitérer le scénario allemand de l'après-première guerre mondiale. Les Américains mettent en place une occupation pacifique. Ils maintiennent l'empereur en place sans toutefois lui laisser de réel pouvoir politique. L'objectif des Américains est d'y favoriser la reconstruction rapide. Et surtout d'éviter que le communisme n’y triomphe...
Un miracle économique édifié sur un esprit de fourmilière" (Pr. Jacques Rifflet)
Et le plan fonctionne. La culture nipponne de briller ensuite par l'excellence, la discipline de fer ainsi que le travail d'équipe pour créer une société "kaisha" (social et harmonie). Le Japon devient une puissance commerciale évidente, puissante et solide. Il s'ouvre enfin au reste du monde, pour même y exporter une partie de sa propre culture. Le pays du Soleil Levant a réussi le défi de se transformer pour un mieux, sans vraiment perdre ses propres valeurs et traditions profondes en cours de route.
La grande question aujourd'hui reste donc : combien de temps l'huître nipponne va-t-elle rester ouverte ? Seul l'avenir pourra répondre à cette inconnue. En attendant, j'ai goûté à ce mets aux accents subtils. J'en ai réellement apprécié la saveur et j'espère pouvoir continuer longtemps encore à en déguster les finesses.
Divers personnages ont laissé une trace plus profonde que les autres dans mon existence. Grands voyageurs, esprits ouverts au monde, à la tolérance et au rapprochement des esprits et des idéologies. Professeurs universitaires, journalistes internationaux, scientifiques ou encore musiciens. Ils rient de nos insignifiantes querelles politiques locales face à l'immensité des problématiques du monde. Ces hommes me laissent admirative de tant de soif de connaissance et de philanthropie. Ils m' ont élargi l'esprit.
Celui d'entre eux à qui je souhaite rendre hommage aujourd’hui à travers ce billet a laissé en héritage à son public un incroyable appétit de découverte du monde, une volonté d’en embrasser la diversité à travers la connaissance de son histoire. Un orateur qui a su captiver son audience avec une trace indélébile. Au lieu de raconter l'Histoire, il racontait Une histoire... Qu’on l’ait aimé ou non pour son franc-parler, il n’a pas laissé indifférent. Docteur en droit, politologue, conférencier, journaliste, professeur d’université, libre penseur, il a été un de nos meilleurs spécialistes en matière de comparaison des religions et de leur influence sur les faits politiques et l'économie internationale.
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AuteurArchives
August 2023
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