Dans cet univers en perpétuel changement, peu à peu nos certitudes volent en éclats. En un instant, une tornade peut tout balayer d'un seul geste de sa main éthérée. Et tout devient potentiellement ouvert à se modifier ou à disparaître. Les gens, les choses, les connaissances, les endroits, les situations. Les marins et les montagnards en sont particulièrement conscients. Mère Nature possède un agenda qu’elle ne laisse voir à personne, qui recèle son lot de surprises, même pour les plus grands météorologues. Un petit billet sur les ouragans, la précarité du présent et quelques manières de l’aborder.
Casserole Infernale
"Une tornade est un tourbillon de vent isolé prenant la forme d'un entonnoir sortant d'un nuage convectif, le plus souvent un cumulonimbus, et dont la pointe est tournée vers la surface terrestre (...). En touchant la surface terrestre il prend l'aspect d'une colonne d'orientation à peu près verticale, mais souple et mobile horizontalement. Celle-ci, en balayant la terre ferme ou l'eau, soulève sur son passage toutes sortes d'éléments solides ou liquides qu'elle entraîne à sa base en une excroissance bouillonnante, appelée le buisson de la trombe et constituée soit par une nuée de gouttelettes au-dessus de la mer, soit par des poussières, du sable et une multitude de débris au-dessus du sol. On parle de tornade si l'air en rotation entre en contact avec la terre ferme ; lorsque le phénomène ne touche pas le sol, on parle simplement d'un entonnoir nuageux. Lors d'un contact sur l'eau plutôt que sur le sol, on parle alors de trombe marine. " (Source : Wikipedia)
La première tornade recensée daterait du VIe siècle dans un écrit de Grégoire de Tours, puis du XIe siècle à Londres. Au XIIIe siècle, les écrits relatent une tempête maritime féroce au port de la Valette à Malte, qui réduit l'armada des Chevaliers de St Jean en petit bois... Ce n'est qu'à partir du XIXe siècle que des études approfondies, notamment par le corps des chercheurs de l'armée américaine, seront lancées pour analyser, expliquer et surtout prévoir, ce type de manifestation météorologique. Depuis lors, la technologie a été mise au service de la science, notamment grâce à la modélisation informatique,
La tornade naît près des courants ascendants d'orages à basse altitude. En effet, elle s'y trouve dans un environnement où les vents changent à la fois de force et de direction avec l'altitude (on dit qu'ils sont "cisaillés"). Elle se caractérise par un vortex de l'air en rotation horizontale causée par le cisaillement des vents avec l'altitude. La plupart du temps, sa rotation va dans le sens anti-horaire dans l'hémisphère nord. Le mouvement de l'air en rotation est soumis à l'interaction entre différentes forces : la force de Coriolis, la variation de pression atmosphérique, la gravité, la force centrifuge et la friction. C'est, entre autres, la combinaison de ces facteurs qui influencera l'intensité de la tornade. Bref, une casserole infernale...
Les régions du monde les plus favorables à la naissance de tornades sont diverses. Cependant, les Etats-Unis et les régions sub-tropicales sont particulièrement propices à leur formation. Les Etats du Texas, Oklahoma, Kansas et Nebraska sont ainsi surnommés"Tornado Alley" avec un tiers des tornades aux États-Unis à leur palmarès. Et si elles sont habituelles au Paraguay, en Argentine, au sud du Brésil, en Inde ou au Bengladesh, elles sont également fréquentes aux Pays-Bas ainsi qu' en Grand-Bretagne (20 à 30 tornades/an) bien que d'amplitude relativement plus faible dans ces régions du monde.
La plus longue tornade jamais enregistrée fait 325 km de long et s'étend sur trois Etats américains en 1925 (Missouri, Indiana, Illinois). La plus meurtrière sévit en 1989 au Bengladesh où elle fait plus de 1.300 victimes. En 1999, on enregistre des vents de pas moins de 484 km/h dans l'Oklahoma ! Tout simplement apocalyptique...
© Photos – Wikipedia
Leur Petit Nom
"Tornade", une expression relativement récente (XVIe) provient probablement de l'espagnol "tornado", des colonies américaines. Ces phénomènes sont en effet prévalents dans ces régions. Avant cette époque, l'on parlait d'orages ou de violentes tempêtes se formant généralement en mer. Un ouragan ou une tempête ne prend le nom de "tornade", qu’une fois qu'il/elle touche terre.
Irma, Gabriel, Katrina, Harvey, Carmen, Florence, Mich, CIndy, Usagi, Koguma et bien d'autres... L’organisation météorologique mondiale (OMM) délègue à cinq organismes régionaux le choix des prénoms, qui doivent alterner masculin et féminin. Pour l’Europe, c’est le service météorologique de l’université libre de Berlin qui nomme tous les anticyclones, dépressions et ouragans tandis que l'OMM fait autorité pour le reste du monde. En revanche, elle ne baptise un vent que s’il dépasse la vitesse de 119 km/h et qu’il est accompagné de pluies torrentielles. Le choix de leur donner un prénom (familier à la région où il va frapper) vise à aider à identifier rapidement les tempêtes dans les messages d’alertes, car les noms sont beaucoup plus simples à retenir que des nombres ou des termes techniques. Les prénoms sont utilisés en boucle. On ne retire un prénom de la liste qu'en cas extrême, par exemple particulièrement meurtrier.
© Photos – Rêvesdemarins
Même si l’on peut généralement déterminer sa force, mesurer l'amplitude ou la violence réelle sur place d'un ouragan demeure toujours complexe : Type F1, F2, F3, F4 sur l'échelle de Fujita ou l’absolue F5, « le Doigt de Dieu »... Les divers scientifiques, même les meilleurs, font des prévisions comportant toujours une marge d’erreur. Et surtout, comme les tremblements de terre, les tornades amènent parfois à leur suite d’autres dangers comme les raz de marée, tsunamis ou fortes houles. Nul ne sait ce qu’elles emmèneront dans leur sillage.
It's raining cats & dogs
Les ouragans ont ce pouvoir inouï, presque divin, de déplacer des objets et des êtres vivants, peu importe leur taille ou poids. Comme d’infortunés animaux se trouvant sur leur chemin. Les expressions française "il pleut des hallebardes" et anglaise "it's raining cats & dogs" proviendrait, à ce que l'on affirme, de ce terrifiant pouvoir...
Annonce d’un Ouragan en Mer
L'Ouragan est annoncé. Les diverses stations météo et images satellites ont confirmé sa présence dans les parages à relativement court terme. Reste à voir s'il va éclater juste sur nous ou s'il va décider d’aller faire un tour ailleurs. Une fois en mer, une chose est certaine, lorsque nous le croiserons, nous ne pourrons pas l’éviter. Il faudra passer à travers sa masse et espérer que le navire tiendra bon.
Alors, que faire avant son arrivée ? Selon les types de marins et de personnalités, les réactions diffèrent. Et à chacun sa manière. Il n’y en a pas de meilleures que d’autres car elles doivent correspondre aux besoins de leur acteur. À chacun de découvrir ce qui lui convient le mieux. Avec l’expérience, les styles peuvent aussi s’adapter et se modifier. Analysons quel genre de marins l'on peut trouver à bord dans telle situation.
© Photos – Armand Burguet & Alexis Guillaume
L'Intrépide
Face à l’annonce d’un danger majeur et imminent, il y a d’abord le marin qui préfère ne pas s’en faire de trop et se dire « on verra bien, on gérera au fur et à mesure ». Inconscience ? Légèreté ? Présomption ? Pas nécessairement. Plutôt la capacité à appréhender un événement funeste comme un défi et faire confiance à son expérience, sa créativité, sa bonne étoile, la chance et ses capacités pour s’en sortir.
L'Averti
Ensuite, il y a le marin qui se prépare, reprépare, vérifie trois sytèmes météo différents et recoupe les informations. Celui qui débriefe l'équipage sur la procédure de secours, remplit leur journal de bord un peu plus souvent que d'habitude avec leur position. Celui qui prend la peine de prévenir les bateaux environnants du grain qui arrive. Celui qui arrime tout à bord, prépare les grab-bags et prend toutes les mesures nécessaires pour être prêt à affronter le pire. Le rationnel, l'organisé, l'hyper prévoyant. Même s'il n'est pas toujours des plus comiques à bord, celui-là agit sur tout ce qui demeure en son contrôle pour son bien-être et celui de l’équipage.
Le Défaitiste
Il ya aussi le marin qui baisse les bras et se dit qu'il n'y parviendra pas. Que de toute manière, le bateau ne tiendra pas et qui décide de faire demi-tour en mer. On ne peut pas le lui reprocher. C'est une option comme une autre. Cependant, il est souvent déjà trop tard que pour rebrousser chemin une fois sur la trajectoire de la tempête. Donc, cette option-là ne fonctionne pas toujours.
L' Emotif
Il y a également le marin qui se laisse guider par ses émotions et perd tout sens rationnel dans l’attente de la bagarre. Celui qui ne sait plus où donner de la tête, s'énèrve, se fâche et a tendance à ne pas garder la tête froide pour se préparer à la lutte contre le Titan planté un peu plus loin sur sa trajectoire. Personne n'est à l'abri d'un moment de désespoir, de panique ou d'incompréhension. Toutefois, ces moments-là font souvent perdre un temps précieux et renforcent le sentiment d'impuissance face aux éléments. Sans oublier qu'ils rendent l'atmosphère ambiante tout aussi électrique que celle de l'orage qui les attend. Cela dit, nous ne sommes qu'humains...
Le Philosophe
Enfin, il reste alors le Philosophe. Ce marin-là qui écoute, reste calme, rassure, se veut objectif et voit le verre à moitié plein sans verser dans l’utopie ni la rêverasserie. Surtout durant l’attente de l’abordage de l’ouragan.
Je vous laisse méditez sur le ou les types qui s’accordent le mieux à votre cas. Et de toute manière, on ne sait jamais vraiment à l’avance comment l’on va réagir face aux événements. On ne peut pas cataloguer les gens dans des « boîtes » (et heureusement ! )
« Mais si les langues se sont tues enfin, les cœurs, eux, n’ont pu s’arrêter de battre. Comme le calme avant la tempête... » (P. M)
La vie prend parfois des détours inattendus ou redoutés. Cependant, généralement, on s’y adapte plus ou moins aisément par l’action, la décision et les choix, même ces derniers peuvent s’avérer ardus. Tout va plus facilement tant que l’on contrôle un minimum les événements et leurs conséquences. Là où cela se complique, c’est lors du lâcher prise contraint et forcé. C’est là où l’on devient dépendant des autres ou du bon vouloir du Destin: l'attente, longue et insoutenable avant de se trouver face à l'ouragan. Alors, un moyen d'endurer cette période d'attente est de profiter de chaque instant, de focaliser son esprit et ses gestes sur des choses positives, utiles ou ayant un quelconque impact satisfaisant. Et prendre tout ce qui peut nous permettre d'emmagasiner des forces pour le moment de passer à l'abordage.
Sur ce toubillon de réflexions cycloniques, je vous souhaite un excellent dimanche, sans tornades ni grains (mis à part ceux de sable si vous profitez d'un beau WE en bord de mer).
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AuteurArchives
August 2023
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