Il y a des années de cela, le lendemain d'un mariage familial en Suède, nous avons eu l'occasion de voir passer les manifestations du 1er mai. Une de leurs banderolles revendiquait le droit suivant "sex timmars arbetsdag". Ce slogan a fait jouer l'imagination de certains invités étrangers qui ne comprenaient goutte à la langue suédoise... (Ces Suédois, ils sont décidément très libérés ;-)). Je vous rassure, il s'agissait bien du chiffre "six" en termes de régime d'heures de travail journalier et non d'autres types de doléances sociales. Alors, cette date anniversaire m'a donné une idée de billet pour ce blog.
Un peu de géométrie ce WE. Alors, matheux, ingénieurs et trigonomes, à vos crayons ! Et quant à moi, inculte littéraire, je vais tenter de repousser une fois de plus les limites de ma zone de confort face aux chiffres ;-).
L'obsession du six et de ses rondeurs
Pourquoi la terre fait-elle 360° ? Pourquoi les méridiens sont-ils calculés en degrés, minutes, secondes, tous adeptes de l'incontournable six ? Pourquoi l’heure est-elle divisée en 60 minutes ? Bref, pourquoi ces systèmes différent-ils du simple métrique ? Ce serait tellement plus aisé de tout mesurer de la même manière.
Les géomètres, hommes de science et de mathématiques sont-ils donc à ce point biscornus que pour décider de tout jauger en portions divisibles par 6 ou par 60 ? Certes un beau chiffre, je vous l'accorde : rond dans son graphisme comme la terre (à moins que ce ne soit la forme de leur bouteille, de leur crâne ou encore celle des courbes féminines qui les aient inspirés... ). Ne sont-ils points sensés avoir l’esprit carré ou carrément angulaire ? D’oú vient donc cette manie de tout tourner au sphéroïde lorsqu’il s’agit de proportionner le temps et le globe terrestre ?
La création du monde en 6 jours
D'ailleurs, le monde n'a-t-il pas été créé en six jours selon les écrits (le septième étant un jour de repos du Créateur) ?
Dès le troisième ou quatrième millénaire AC, les Sumériens, Babyloniens et Mésopotamiens, avaient imaginé une base de 60 pour numérotation. On retrouve cette ancienne méthode sexagésimale dans la mesure des angles et du temps. Pour repérer l'écoulement du temps dans l'année et la journée, les Egyptiens, eux aussi, avaient divisé le ciel en 36 décans (plus tard ramenés à 12) associés à des divinités, chaque décan représentant une ou plusieurs étoiles. Le premier cadran solaire comprenait ainsi des graduations fixes, divisé en deux fois 12 heures pour la journée (sans tenir compte des différences de saisons). Ce cadran est demeuré jusqu'à nos jours. Hindous, chinois, arabes, puis grecs (par ex. Ptolémée), en passant par Fibonacci, ont tous opté pour ce système de mesure tournant autour du petit chiffre rond. D'ailleurs, ne dit-on point encore de nos jours "une once d'or, une douzaine ou une demi-douzaine d'oeufs " ?
Mais où cet amour pour le chiffre six trouve-t-il donc son origine ?
En tous temps, les mesures du temps ont été intimement liées à celles de l'observation des astres et du firmament, à l'astronomie et l'astrologie. La mesure moderne du temps correspond (en arrondi) à la durée de la rotation de la terre et de sa révolution. Etonnamment, les unités de temps qui sont plus petites que la seconde sont elles, par contre, mesurées selon le système décimal.
Une seconde hypothèse de l'origine du système sexagésimal se base sur la croyance que les Sumériens comptaient avec les mains... En faisant défiler le pouce sur les 3 phalanges des 4 autres doigts, soit 12 phalanges, on comptait ainsi de 1 à 12. Ensuite, on utilisait les doigts de l'autre main pour les retenues. Le pouce, en opposition à l'un des quatre autres doigts, permettait de compter de 1 à 4 douzaines. Avec les deux mains, on comptait ainsi jusqu'à 5 x 12 = 60. CQFD... Une troisième supposition relève de l'utilisation du triangle équilatéral (en réalité la forme géométrique la plus simple, bien plus que le cercle) comme référence de calcul. La somme des angles d'un triangle étant égale à un angle plat, l'angle plat est donc égal à 3 angles de triangle équilatéral et vaut 60 x 3 = 180 degrés. Un tour complet vaut donc deux angles plats, à savoir 360 degrés. D'autres encore feront le rapprochement avec les 360 (approximatifs) jours de l'année du calendrier babylonien. Ces derniers étaient répartis en 12 mois de 30 jours. Comme il faut à la Terre 365 jours pour faire le tour du Soleil, chaque nuit les étoiles tournent d'une fraction de tour (1/365 environ) par rapport à l'axe. Le degré aurait été défini comme la fraction d'angle de décalage entre le ciel d'une nuit et celui de la nuit suivante, à une même heure, les étoiles bougeant ainsi d'environ 30° entre deux lunes successives. Une dernière explication réside dans la recherche d'un moyen pour simplifier (si, si ! ) les méthodes de calcul des fractions et des multiplications. En effet, 360 étant le multiple de 1, 2, 3 et 5 il se divise par ces nombres ainsi que par leurs multiples 6, 8, 9, 10, 12, 15, etc. et toutes leurs combinaisons, ce qui simplifie la plupart des calculs et des conversions. "En réalité, Soixante est un nombre qui a la particularité d'avoir un grand nombre de diviseurs entiers (1, 2, 3, 4, 5, 6, 10, 12, 15, 20, 30 et 60), ce qui facilite les calculs astronomiques." (Source wikipedia)
© Photos – Rêvesdemarins & wikipedia (numérotation mésopotamienne et égyptienne)
Le temps, c'est aussi la distance...
Les coordonnées d'une position géographique se basent sur sont deux angles, mesurés en "degrés", "minutes d'arc" et "secondes d'arc" et notés par les symboles ( °, ', ' ). A ne pas confondre avec les minutes et secondes horaires. La latitude d'une position est mesurée par rapport à sa distance à l'équateur selon cette méthode.
It is the star to every wandering bark, Whose workth's unknown, although his height be taken" - C'est l'étoile de toutes les barques perdues. Nul ne sait sa valeur, sa hauteur seule est connue... " (Sonnet 116, William Shakespeare)
La longitude, par contre, indique une position géographique par rapport aux méridiens. Ces derniers croisent l'équateur en reliant les deux Pôles. Et puisque l'équateur est un cercle graduable en 360 degrés, on prend la valeur de cette graduation, avec pour base de départ (0°), le méridien de Greenwich ("prime meridian"), près de Londres. Souvenez-vous, "meri" signifie "milieu" et "diem", "le jour". Les périodes de la journée sont donc dénommées "anté mériennes" ou "post méridiennes", les fameuses abréviations A.M./P.M.
Ainsi, la mesure du temps ne se limite pas au passage des jours et des nuits. Son calcul précis est absolument impératif pour la détermination d'une position sur le globe terrestre, et notamment pour la définition d'une longitude. Ce défi a fait l'objet de longues recherches durant des siècles de navigation. Ayant eu l'occasion de visiter l'observatoire ainsi que le musée maritime de Greenwich (que je vous recommande chaudement - mais après le confinement - ), nous reviendrons plus en détails sur cet aspect particulier dans une édition ultérieure de ce blog, le sujet valant vraiment d'y consacrer tout un billet. "Entre 1793 et 1798, le cercle de 360° a parfois été divisé en 400 degrés... " (Mesurer le monde, Ken Adler 2002)
© Photos – Rêvesdemarins & wikipedia (Johannes Vermeer, carte d'Ortelius)
Je pourrais terminer ce billet par une devinette de trigonométrie. Mais, je ne pousserai pas le masochisme jusque là (ouf pour moi ! ).
J'en profite pour souhaiter un très joyeux anniversaire (avec un beau 6 tout rond ! ) aux nouveaux saisonniers tels que la mariée suédoise qui m'a inspiré le thème de ce blog : Happy B, Sis !
Un excellent dimanche à tous.
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August 2023
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