Il y a de ces voyages qui nous emmènent loin de nos marques. Certains sont désirés, d'autres sont entrepris par nécessité, d'autres encore s'accomplissent en dépit de nos volontés. Tous pourtant définissent qui nous sommes au fond de nous et gravent leur empreinte dans une existence : les Exils.
A la Recherche de la Terre Perdue
Avez-vous jamais rêvé de vous expatrier ? Moi oui. Non pas parce que je ne me sentais pas bien chez moi, mais par attrait d'une autre région, d'une autre culture, par besoin d'élargir mon horizon. Si vous rêvassez probablement d'un petit coin de Paradis au climat plus clément, voire une petite île au sud du Pacifique aux eaux turquoises et où le soleil brille toujours, mes rêves d'exil à moi sont un peu plus septentrionaux : le Danemark et la Scandinavie en général, le Nord-Est des États-Unis (Boston, New-York, la région des Grands Lacs... ), le Canada (Vancouver... ), le Québec, Paris ou encore même quelques idées folles (lors d'une journée sans pluie ! ) comme la Bretagne ou les Highlands écossais (rien à faire, le Nord et le froid m'attirent inexorablement... Je dois décidément avoir du sang Viking dans les veines... ).
J'ai eu l'occasion de voyager et séjourner intensivement à travers le monde pour mon métier et mon privé. Et si j'ai eu la chance de recevoir des propositions professionnelles de m'expatrier, les circonstances de vie m'ont cependant fait prendre le choix de fixer mon domicile dans mon petit plat pays, que j'aime beaucoup, cela dit. J'ai connu des endroits où je me suis sentie "chez moi" et où j'aurais pu en effet envisager de poursuivre ma vie. Des lieux fortement liés à des éléments culturels, personnels ou historiques. Des regrets de ne jamais avoir fait le pas définitivement ? Jamais. Je pars du principe que toute action et choix que l'on fait dans sa vie a toujours un sens et une raison particulière à un moment donné. Ce qui ne m'empêche pas de continuer à rêver pour la cause.
© Photos - Rêvesdemarins
Terre Promise
Certains avaient embarqué sur un radeau de fortune. D'autres avaient traversé des déserts à pied. D'autres encore avaient tenté de rallier une autre rive en bravant les flots, à la nage ou sur un cargo bondé payé a prix d'or à des trafiquants d'hommes sans scrupules. Tous portaient en eux cette insigne espérance de parvenir à une vie meilleure au bout de leur périple. Cependant, nombreux sont ceux qui ne virent jamais leur Terre Promise... Et chacun de leurs récits nous fait trembler le cœur, surtout en cette période où le nombre de candidats à tenter leur chance ailleurs ne fait que se multiplier.
Les pérégrinations de ces infortunés migrants nous semblent bien loin de nos vies d'aisance et de facilité. J'ai autrefois vécu d'un peu plus près une de leurs errances à travers une belle amitié avec deux pèlerins de l'exil. Ils étaient jeunes, beaux et pleins d'espoir, avec pour tout bagage une vieille guitare. Une peau d'ébène, de longs cheveux nattés, un sourire à faire pâlir la neige. Il s'appelait Dominic. Elle se prénommait Marlène. Ils chantaient comme des rossignols avec une émotion bouleversante dans leurs deux voix qui se mêlaient parfaitement, aux intonations polyrythmiques. Il avait quitté sa Zambie natale et elle son Haïti adoré pour trouver une vie meilleure en Europe. Ils s'étaient rencontrés en chemin. Je jouais à l'époque avec un groupe de musiciens à Paris, qui les avait accueillis. Et la parfaite harmonie de ces voix aux rythmes du Kilimanjaro et de la savane me donnaient des frissons à chaque fois. Malgré un chemin semé d'embûches et de batailles administratives avec les services de l'immigration, ces deux jeunes exilés ont fini par trouver leur "chez eux". Une de leurs chansons ne m'a jamais quitté la tête. Je vous l'offre ici avec quelques autres qui m'ont fait découvrir la culture et la musique du grand Continent du Sud.
Malaika est une chanson populaire en Swahili. Probablement la chanson d'amour Swahili la plus connue au monde et en Afrique orientale (Kenya, Tanzanie... ). Dans son contexte, le mot "Malaika" signifie "Ange", ce qui réfère dans cette culture à la beauté d'une femme. Et lorsque Dominic la chantait en regardant Marlène, elle prenait vraiment tout son sens...
Exil d'un Futur Roi
Si les belles polyphonies rythmées vous parlent, à découvrir absolument sans modération : le Musical "The Lion King/Le Roi Lion", de préférence en version originale. Un des plus beaux spectacles musicaux jamais réalisés... L'occasion d'un petit séjour dans les Broadways de Paris, Londres ou New York... Un récit d'exil poignant, en plein continent africain dont voici quelques extraits moins connus que "Hakuna Matata".
Exil de Soi
"Je reste là, les yeux dans le vide. Ils sont devant moi, mais je ne les vois pas vraiment. Une voix qui m'appelle "maman", "grand-maman" ou qui s'adresse à moi par un prénom que je ne connais plus. Si mes souvenirs lointains sont encore très clairs dans ma mémoire, pourtant je ne sais pas où je suis. Est-ce une prison? Est-ce un hôtel ? Que fais-je ici ? Pourquoi ceux que j'aime ne viennent-ils donc pas me voir et me ramener chez moi ? Je ne reconnais pas cette chambre, ces meubles, et tous ces inconnus qui viennent me rendre visite. Je me sens loin de moi-même. Loin du présent... Je me sens tellement perdue. Pourquoi ne puis-je retourner dans ma maison, et à ces endroits où je me sentais "chez moi" ?
Et vous mes mains, pourquoi tremblez-vous à ce point ? Et vous mes jambes, pourquoi ne me portez-vous donc plus ? Et puis, cette vieille dame toute ridée dans le miroir qui me regarde toujours avec ses cernes et son regard hagard, je ne la connais pas. Que me veut-elle donc ? Pourquoi m'épie-t-elle à chaque fois que je veux me regarder dans la glace ? Combien de temps cet exil va-t-il donc durer ? Je voudrais tant qu'il cesse. Dieu qu'il est long d'être loin de soi-même... "
© Photos - Wikipedia
Exil du Coeur
Enfin, l'exil du cœur demeure, à mon sens un des plus poignants à vivre. Devoir rester loin de ceux qu'on aime, sans savoir si l'on les reverra et si l'on les retrouvera un jour. Sans pouvoir les contacter. Sans savoir ce qu'ils deviennent. Un exode du coeur qui ronge et déchire. Une déportation que chacun voudrait ne jamais avoir à endurer. Cet exil-ci peut toucher tout un chacun. Pas besoin d'être dissident, libre penseur, héros ni prix Nobel de la Paix. Je pourrais bien entendu vous parler du Grec Ulysse, du Xhosa Mandela ou Stephen Biko, de la Birmane Aung San Suu Ky ou encore d'autres grands hommes ou femmes bannis pour leurs actes de bravoure ou leurs opinions à l'encontre de leur entourage. Cet éloignement-ci est bien plus proche de vous et moi. Il existe dans nombre de familles, frateries, en amour ou amitié...
Un exil volontaire dans ce sens semble encore bien plus long lorsqu'il s'est mué en indifférence ou rancoeur. Combien de familles ne comptent-elles pas de membres qui ne se parlent plus. Et comme je ne prêche vraiment pas la rancune, ces banissements-là m'attristent donc profondément. Je fais alors toujours un voeu pour que ces êtres-là reviennent un jour de leur exil, se réconcilient et se retrouvent enfin.
Sur ces quelques paroles, je vous souhaite un excellent dimanche à tous.
Où que vous vous soyez exilés pour la journée : bon vent !
0 Comments
Leave a Reply. |
AuteurArchives
May 2023
Catégories
All
Suivez Rêves de Marins sur Twitter
|