L'essentiel est invisible pour les yeux... Ainsi en est-il de ceux qui demeurent dans les souvenirs. Un petit billet en hommage de ces derniers.
Cette semaine, j'ai envoyé un petit message à un ancien collègue. Je le savais malade, mais fort et battant face au méchant petit crabe qui lui rongeait la moëlle osseuse depuis quelques années déjà. Deux greffes lui avaient offert un répit pour de nombreuses années. Nous nous connaissions depuis plus de vingt cinq ans via le travail et avions régulièrement des contacts durant sa maladie. Et cette année, j'ai pensé souvent à lui envoyer un petit mot, sans pourtant jamais finalement en prendre le temps. Son profil sur les divers réseaux sociaux indiquait qu'il était toujours bien actif dans notre société où tout tourne tellement rapidement. Et cela avait suffit à calmer ma conscience.
Cependant, le message en réponse à ma missive à son addresse professionnelle cette semaine, m'a laissée sans mots... "Nous sommes au regret de vous annoncer que ... ". J'étais atterrée : j'avais attendu trop longtemps. Je n'avais pas vu passer les mois importants. S. nous avait quitté, il y a presqu'un an déjà, sans que je ne le sache. Et cela m'a réellement attristée : de son départ, de mon ineptie à reprendre contact plus tôt, de mon ignorance dans ma vie trop pressée. De mon incapacité à prendre le temps pour les petits gestes importants, pour quelqu'un qui méritait de l'attention au nom de la gentillesse humaine, même si nous n'étions pas très proches.
Casper
Et pourtant, cher S., ton nom est toujours bien lisible sur ces fameux sites web. Ta photo te montre dans tes meilleurs jours. Ton profil semble avoir immuablement traversé le temps et les évènements sans avoir été affecté par ton absence. Ton image et ton souvenir planent doucement, comme une brume tamisée sur les voies du monde digital. Tel un gentil fantôme qui continue à veiller sur nos vies empressées et à errer dans les couloirs de l'immense bâtisse aux milles portes qu'est l'internet.
Gentils fantômes des couloirs de nos vies,
Les réseaux sociaux constituent une source intarrisable d'informations. Des véritables amis aux supposées connaissances. Des anciens collègues aux futurs patrons. Des nouveaux profils aux noms d'emprunt. Ils regorgent de personnes bien réelles et de personnages factices. Ils conservent également la trace de notre passage dans cette société de consommation. Même encore bien longtemps après notre départ.
On peut critiquer cette pratique. Devrait-on systématiquement enlever ces noms du monde actif ? (Et ceci n'est pas chose aisée vu les réglementations sur le sujet). Devrait-on effacer toute trace de leur existence ? Mais, quelque part, la présence de ces gentils "Casper" sur les médias sociaux, permet au souvenir de perdurer. Elle supplée le deuil, et la remémorance. Elle offre une porte aux besoins de ceux qui restent, de continuer à faire vivre la mémoire. Elle accorde un chemin aux messages aux disparus et de soutien à leurs proches. Elle fait parfois autant de bien que de tort. Le débat demeure entier.
A tous ces "Casper" qui veillent sur nous à travers leur souvenir et dont la tendre pensée me tient chaud dans mes froides nuits sans sommeil comme une tiède mer d'été.
Un très bon dimanche à tous.
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AuteurArchives
August 2023
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